Le ministre français des Armées Sébastien Lecornu entame une visite officielle en Indonésie. Au cours de son déplacement de quarante-huit heures, il doit entériner le renforcement de la coopération stratégique de la France avec l'Indonésie et l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (Asean). Objectif affiché : lutter contre les risques d'escalade en Asie-Pacifique.
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Il y a une intimité stratégique puissante qui est en train de naître avec l'Indonésie et la France (...) pour être dans une capacité de lutter contre l'escalade, pour se réarmer et pour être en situation d'avoir une diplomatie crédible", a expliqué Sébastien Lecornu dans une interview à l'AFP.
Selon le ministre français des Armées, la France va également devenir membre observateur de l'ADMM, la réunion élargie des ministres de la Défense de l'Asean. Cette organisation rassemble 10 pays d'Asie du Sud-Est. Elle inclut aussi huit pays observateurs, dont les États-Unis et la Chine.
Cette admission, actée pour la période 2024-2027, "
nous permet de contribuer avec nos partenaires aux groupes de travail mis en place sur des enjeux majeurs pour la zone, comme la sécurité maritime", a précisé le ministre dans un tweet samedi.
L'Asean est pour nous un espace de dialogue très important, ce sont les pays qui détiennent aussi les solutions pour la paix et la sécurité de la zone.
Sébastien Lecornu, ministre français des Armées.
La France veut renforcer sa présence dans la zone
L'Indonésie occupe l'an prochain la présidence tournante de l'Asean, dont le secrétariat permanent est à Jakarta. "
Nous avons vocation a être aussi politiquement dans la zone", a noté auprès de l'AFP Sébastien Lecornu. Le ministre appuie le fait que la France est un pays riverain qui “
souhaite avoir un rôle multilatéral dans la région, pas seulement bilatéral”.
"L'Asean est pour nous un espace de dialogue très important, ce sont les pays qui détiennent aussi les solutions pour la paix et la sécurité de la zone", a souligné le ministre.
Sébastien Lecornu a également rencontré son homologue indonésien Prabowo Subianto pour des entretiens vendredi à Jakarta, après une escale aux Émirats arabes unis. Il se rendra ensuite en Inde.
L’AESAN et le contexte de la guerre en Ukraine
L'Association des nations d'Asie du Sud-Est compte dix pays situés sur le continent asiatique. La plupart de ces pays participent aussi à l’APEC, le forum de Coopération économique pour l'Asie-Pacifique.
Le bloc régional de dix pays a fait de la non-ingérence un de ses principes fondamentaux. Mais l'invasion russe de l'Ukraine, en février, a fini par rattraper l'Asie du Sud-Est.
Depuis le début de la guerre, ces États sont contraints à un difficile numéro d'équilibriste avec la Russie, un partenaire économique qu'ils doivent préserver. Ils doivent notamment composer avec les pressions exercées par les États-Unis pour isoler Moscou.
"L'Asean continuera de coopérer avec la Russie, en maintenant le statu quo", analyse auprès de l’AFP Joanne Lin, chercheuse à l'Institut d'études sur l'Asie du Sud-Est à Singapour. "Beaucoup d'États membres de l'Asean sont doués pour cloisonner les sujets problématiques", estime-t-elle.
Une stratégie militaire entre Paris et Jakarta
En février de cette année, l'Indonésie a passé commande de 42 Rafale pour 8,1 milliards de dollars (près de 7,1 milliards d'euros) et négocie l'acquisition de deux sous-marins Scorpènes.
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L'acquisition de six Rafale est validée pour livraison en 2026-2027", ensuite les options seront levées par tranche, "
les Indonésiens nous ont confirmé qu'ils ne remettent pas en cause la cible de 42 Rafale", a indiqué le ministre.
La France et l'Indonésie discutent aussi d'un plan de formation pour les officiers indonésiens dans les écoles militaires françaises dès l'année prochaine. "
L'Indonésie veut faire monter en puissance son armée de l'air". Concernant les sous-marins "
les discussions se poursuivent, sur la capacité et sur le prix".
Le plus grand pays d'Asie du Sud-Est, qui cultive sa position de non-aligné, n'avait jamais acquis précédemment d'avions de combat français. Jakarta cherche désormais à diversifier ses alliances face à une hausse des tensions dans la région, notamment entre la Chine et les États-Unis.
L’Asie-Pacifique, un enjeu de taille pour Paris
Au sommet de la Coopération économique pour l'Asie-Pacifique (Apec) la semaine dernière, le président Emmanuel Macron avait mis en avant la stratégie de la France en Asie-Pacifique.
La France y détient la majeure partie de sa zone économique exclusive (ZEE), la deuxième du monde. Sept territoires et plusieurs régions françaises d’Outre-mer, de la Réunion à la Nouvelle-Calédonie et Tahiti, où vivent 1,65 million de citoyens français y sont notamment situés.
Paris y maintient une présence militaire permanente, qui reste cependant modeste par rapport aux poids lourds de la région, avec quelque 7.000 soldats, des patrouilleurs et avions de reconnaissance.