Fil d'Ariane
L'explosion a eu lieu peu avant 23 heures locales (15 heures TU) dans un marché animé où les gens dînaient, à proximité d'un hôtel prisé des touristes et des hommes d'affaires, qui, lui, n'a pas été touché. "Nous avons retrouvé des éclats provenant d'un engin explosif improvisé", a déclaré un porte-parole de la présidence. Bilan : 14 morts et 67 blessés.
Près des lieux de l'explosion, des corps étaient mêlés aux débris de tables en plastique et de chaises. "La force de l'explosion était telle que j'ai été arraché du sol", raconte Adrian Abilanosa, dont le cousin a été tué.Un peu plus tard, sa fille Sara Duterte, actuelle maire de la ville, a indiqué que "le cabinet du président" avait "confirmé qu'il s'agit de représailles d'Abou Sayyaf", un groupe islamiste qui a fait allégeance à l'organisation de l'Etat islamique (EI).
Dans un premier temps, le président avait évoqué deux groupes islamistes et des trafiquants de drogue comme possibles coupables. Le ministre de la Défense Delfin Lorenzana a également mis l'attaque sur le compte d'Abou Sayyaf. "Personne n'a encore revendiqué cet acte, mais nous ne pouvons que conclure qu'il a été commis par le groupe terroriste Abou Sayyaf, qui a encaissé de nombreuses pertes à Jolo au cours des dernières semaines", a-t-il dit.
Dans la foulée, le président a décrété l'"Etat de non-droit" sur l'ensemble de l'archipel philippin, ce qui, selon ses conseillers, confère plus de pouvoirs à l'armée pour mener des opérations de maintien de l'ordre normalement dévolues à la police.
Le président Duterte, qui devait partir dimanche pour sa première tournée à l'étranger depuis son élection, en a annulé la première étape, Brunei. Il devrait toutefois se rendre comme prévu à partir de mardi au Laos pour un sommet régional puis en Indonésie.
Par le passé, Davao a été le théâtre d'attentats meurtriers commis par des activistes islamistes ou des rebelles communistes. La ville se situe sur l'île méridionale de Mindanao, où des séparatistes musulmans mènent depuis des décennies une rébellion armée qui a fait plus de 120 000 morts.
Les rebelles communistes, en lutte armée également depuis 1968, sont présents dans les zones rurales près de Davao. Depuis son arrivée au pouvoir en juin, le président Duterte a lancé des pourparlers de paix avec les communistes. La rébellion et le gouvernement sont convenus la semaine dernière de prolonger indéfiniment la trêve décrétée en vue de ces négociations. Le gouvernement a également ouvert ces dernières semaines des discussions de paix avec deux des principaux groupes rebelles musulmans, dont le Front Moro islamique de libération (Milf).
En revanche, il a déclenché une offensive militaire contre le groupe islamiste Abou Sayyaf, créé au début des années 1990, qui a fait allégeance à l'organisation Etat islamique. Quinze soldats ont été tués lundi dans des affrontements avec Abou Sayyaf sur l'île de Jolo, l'un des principaux fief du groupe islamiste, à 900 km de Davao. Lorsque les journalistes l'ont interrogé sur les auteurs de l'attentat, le président Duterte a expliqué que les autorités s'attendaient à d'éventuelles actions d'Abou Sayyaf en représailles à cette offensive.
A la tête de la ville jusqu'à son élection, Rodrigo Duterte était parvenu à instaurer une paix relative à Davao, en alliant mesures de sécurité musclées et accords locaux avec les différentes rebellions. Cependant, en 2003, un bombe de forte puissance avait dévasté l'aéroport de Davao, faisant 22 morts et 155 blessés. L'attentat avait été imputé aux séparatistes musulmans.
Reste une autre piste, celle des trafiquants de drogue. Duterte a été élu président sur un programme ultrasécuritaire, s'engageant à mettre fin en six mois au trafic de drogue en faisant abattre des milliers de trafiquants de drogue présumés. La guerre contre la drogue a déjà fait près de 2000 morts.
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