Fil d'Ariane
Cette vocation va marquer au fer rouge cette université qui, de par ses étudiants, mais aussi ses jeunes professeurs, va absorber comme une éponge tous les mouvements sociaux de l’époque, la contestation de l’ordre établi, etc.
L’UQAM depuis sa création est régulièrement agitée par des grèves - d’étudiants, de profs, de chargés de cours, de personnel administratif. Au "printemps érable" de 2012 par exemple (grève étudiante québécoise, ndlr), le cœur de la grève étudiante était à l’UQAM.
Pour moi, une des marques de commerce de l'UQAM, c'est son rôle social.
Joanne Burgess, professeure d’histoire à l’UQAM
« Si on pense à cette tradition de combativité « uqamienne », c'est aussi lié à ce projet inscrit dans ses structure, qui est de reconnaître une place plus grande pour les profs et les étudiants dans la gestion de l'université et une prise de parole plus grande dans les affaires de l'université », ajoute Joanne Burgess.
C’est une institution qui sort donc du cadre traditionnel des universités, dans sa structure, ses modes de gestion et ses étudiants. Ce côté rebelle lui a parfois joué des tours en lui donnant une réputation d’être une université où on n’apprend qu’une chose : faire la grève et des manifs !
« Pour moi, une des marques de commerce de l'UQAM, c'est son rôle social, explique Joanne Burgess. On crée l'UQAM avec une volonté de doter l'université d'une mission, avec la mise en place des services aux collectivités dont le rôle est de créer des ponts avec la communauté, des partenariats avec le mouvement syndical, le mouvement des femmes, les organismes communautaires pour que l'expertise universitaire soit davantage au service des besoins de la communauté ».
Ce lien avec la communauté va même servir de modèle à d’autres universités au Canada. L’UQAM a aussi été à l’avant-garde dans le féminisme et dans les études sur la sexualité : c’est d’ailleurs en matière de sciences humaines, dans les arts et les communications que l’université est réputée.
L'UQAM a aussi eu un impact important sur le développement de la ville de Montréal, car, tout comme sa consœur anglophone l’université Concordia, son campus est en plein centre-ville.
« Une des caractéristiques de l'UQAM, c'est de s'implanter au cœur de la ville », déclare France Vanlaethem, professeur émérite de l’école de Design de l’UQAM.
En 1969, c’est sous la pression du maire Jean Drapeau que l’UQAM ouvre ses portes dans l’est de la ville, car il voulait redynamiser le quartier. Mais c’est en 1979 que les deux bâtiments principaux du campus de l’UQAM sont inaugurés, le pavillon Judith Jasmin et le pavillon Hubert Aquin, en préservant les monuments existants.
L'un des défis pour l'avenir c'est l'interculturalité.
Joanne Burgess, professeure d’histoire à l’UQAM
« L'une des caractéristiques fondamentales du campus de l'UQAM est qu'il prend ses distances avec une pratique courante à l'époque qui était la tabula rasa, précise France Vanlaethem. On a donc conservé des éléments de l'église Saint-Jacques qui était la première cathédrale de Montréal, dans le pavillon Judith Jasmin ».
L’université se développe également stratégiquement autour de la station de métro Berri, au centre des deux principales lignes du métro montréalais. « Une des grandes caractéristiques de Montréal sur le plan urbain, c'est le Montréal souterrain. L'UQAM participe à ce Montréal souterrain parce que les deux pavillons initiaux sont irrigués par un réseau de circulation piétonnier intérieur », souligne France Vanlaethem.
Au fil des décennies, l’UQAM a étendu ses tentacules dans tout le quartier en construisant de nouveaux pavillons. Une université qui s'intègre parfaitement, donc, dans le paysage urbain montréalais et qui tient à préserver cette urbanité.
Cinquante ans, c’est jeune pour une université. L’UQAM a atteint sa maturité, mais elle a plusieurs défis devant elle : ceux liés au numérique, aux transformations de la clientèle scolaire, comme toutes les universités, « et peut-être pour l'UQAM la question de l'inclusion sociale, estime Joanne Burgess.
À l’origine, son mandat était d'accueillir une population québécoise francophone issue de milieux populaires. Maintenant, un des défis pour l'avenir c'est l'interculturalité. Comment accueillir plus largement dans les programmes le corps professoral ? Comment accueillir dans les structures de gestion les communautés culturelles qui vivent à Montréal ? ».