Au Pakistan, les représentants de 40 pays plaident pour un meilleur accès des filles à l'éducation

Un sommet de deux jours a lieu au Pakistan pour l’amélioration de l'accès des filles à l'éducation dans les communautés musulmanes. Des dizaines de millions d'entre elles ne sont pas scolarisées dans les pays à majorité musulmane, notamment au Bangladesh et au Nigeria. 

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Des enfants pakistanais des bidonvilles de Lahore

Des enfants pakistanais des bidonvilles de Lahore étudient dans une école de fortune gérée par une ONG, au Pakistan, vendredi 29 mars 2019. Human Rights Watch a publié un rapport selon lequel des millions de filles au Pakistan ne sont toujours pas scolarisées, principalement parce que le gouvernement consacre moins d'argent à l'éducation. Le groupe international de défense des droits a déclaré que les filles sont privées d'éducation pour de multiples raisons, y compris une pénurie d'écoles publiques.

AP Photo/K.M. Chaudary
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Des représentants d'une quarantaine de pays, des militants et des organisations internationales ont appelé, samedi 11 janvier, au Pakistan à améliorer l'accès des filles à l'éducation dans les communautés musulmanes, lors d'un sommet de deux jours ignoré par les talibans afghans.

"Le monde musulman, dont le Pakistan, est confronté à de grands défis lorsqu'il s'agit d'assurer un accès équitable des filles à l'éducation", a déclaré le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif, à l'ouverture du sommet. "Refuser l'éducation aux filles équivaut à rejeter leurs voix et leurs choix, tout en les privant du droit d'avoir un futur brillant".

Des dizaines de millions de filles ne sont pas scolarisées dans les pays à majorité musulmane, notamment au Bangladesh et au Nigeria. 

Islamabad, au Pakistan

Des filles de localités pauvres attendent leur tour pour montrer leur travail scolaire à un enseignant, dans une école improvisée dans un parc de la ville d'Islamabad, au Pakistan, mardi 13 novembre 2018. 

AP Photo/B.K. Bangash

Le Pakistan est lui-même confronté à une grave crise de l'éducation et a l'un des taux de déscolarisation les plus élevés au monde : plus de 26 millions d'enfants sont concernés, principalement en raison de la pauvreté, selon des chiffres officiels.

L'Afghanistan, pays voisin, a été convié à Islamabad mais aucun représentant taliban ne participe aux rencontres, a indiqué à l'AFP le ministre de l'Éducation pakistanais, Khalid Maqbool Siddiqui.

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"Seulement quelques Afghans travaillant pour des organisations internationales", sont présents, a-t-il précisé. Sollicités par l'AFP, des responsables afghans n'ont pas commenté dans l'immédiat.

Aujourd'hui, l'Afghanistan se trouve en bas des classements de l'alphabétisation : 37% en général et 20% pour les femmes.

Roza Otunbayeva, cheffe de la mission de l'ONU en Afghanistan

L'Afghanistan est, depuis le retour au pouvoir des talibans en 2021, le seul pays au monde où les filles et les femmes n'ont pas le droit d'aller à l'école secondaire ou à l'université.

L'ONU dénonce un "apartheid de genre", ce dont se défend le gouvernement taliban qui affirme que la loi islamique "garantit" les droits des hommes et des femmes dans le pays.

"Aujourd'hui, l'Afghanistan se trouve en bas des classements de l'alphabétisation : 37% en général et 20% pour les femmes", a alerté la cheffe de la mission de l'ONU en Afghanistan (Manua), Roza Otunbayeva, appelant notamment les pays présents à Islamabad à offrir des bourses aux Afghanes.

"Crimes contre les filles"

Malala Yousafzai, militante pakistanaise et lauréate du prix Nobel de la paix en 2014, doit s'exprimer dimanche 12 janvier et a d'ores et déjà indiqué qu'elle insisterait sur le sort des Afghanes.

"Je parlerai des droits à protéger pour que toutes les filles puissent aller à l'école et de la raison pour laquelle les dirigeants doivent tenir les talibans responsables des crimes commis contre les femmes et les filles", a-t-elle écrit sur X vendredi.

Malala Yousafzai

Dans cette photo d'archive du 4 février 2016, la lauréate du prix Nobel de la paix Malala Yousafzai, du Pakistan, prend la parole lors du premier événement sur l'éducation à la conférence « Soutenir la Syrie et la région » au Queen Elizabeth II Conference Centre à Londres. Malala Yousafzai est retournée au Pakistan pour la première fois depuis qu'elle a été abattue en 2012 par des militants mécontents de son action en faveur de l'éducation des filles.

AP Photo/Matt Dunham, Pool, File

La jeune femme a été attaquée en 2012 par des talibans pakistanais dans un bus scolaire dans la vallée isolée de Swat, près de la frontière avec l'Afghanistan. Elle n'est revenue que de rares fois au Pakistan depuis son évacuation il y a 12 ans vers le Royaume-Uni, où elle vit désormais, et s'est dite "émue et heureuse" d'être de retour samedi.

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Son père, Ziauddin Yousafzai, a appelé "chaque dirigeant musulman (...) à défendre l'éducation des filles, surtout en Afghanistan", déplorant auprès de l'AFP ne pas avoir vu "de mesure ou d'action majeure de la part du monde musulman" sur cette question.

Ceux qui disent que l'éducation des filles ne correspond pas à l'islam se trompent.

Mohammed Al-Issa, secrétaire général de la Ligue islamique mondiale

Outre des ministres, des ambassadeurs d'une quarantaine de pays et des dignitaires religieux, des écolières et des étudiantes ont assisté à l'événement qui doit se poursuivre dimanche dans la capitale pakistanaise. "Au moins une bonne initiative en faveur de l'éducation des filles musulmanes", s'est félicitée Zahra Tariq, une étudiante de 23 ans en psychologie clinique. 

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"Celles qui se trouvent dans des zones rurales sont toujours confrontées à des problèmes", a-t-elle toutefois souligné.

"Ceux qui disent que l'éducation des filles ne correspond pas à l'islam se trompent", a aussi affirmé Mohammed Al-Issa, secrétaire général de la Ligue islamique mondiale, un organisme considéré comme le bras diplomatique de l'Arabie saoudite.