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Belgique : et si elle tentait l'aventure de la démocratie participative ?

Elections régionales et européennes, les Belges sont invités à se prononcer fin mai sur leur avenir politique. Listes centriste, socialiste, réformatrice, flamande, wallonne... difficile parfois d'éclaircir le paysage belge. Alors certains citoyens ont décidé de prendre le taureau par les cornes et d'inviter les politiques à partager leur pouvoir. Ils revendiquent une démocratie participative et délibérative.
Ils s'appellent Sieglinde, Jean, Julia David ou Olivier et sont citoyens de Bruxelles. Ils se sont donnés rendez-vous devant le célèbre palais de justice, toujours en travaux, à l'endroit même où ils devront déposer leur liste électorale. 17 noms de futurs candidats à l'élection régionale de Bruxelles prévue fin mai.

Ils parlent français et néerlandais, sont diplômés ou pas, jeunes ou moins jeunes, peu importe, ils ont décidé de se prendre en main et de changer le système pour revenir à une vraie démocratie.

"Agora" comme au temps d'Athènes

Leur mouvement s'appelle Agora et leur vision de cette démocratie remonte aux origines grecques.  Petites définitions de la démocratie signées Agora Brussels : "Pour moi en démocratie, les gens peuvent s'exprimer pour eux-mêmes. Tous devraient pouvoir se réunir pour débattre. C'est un endroit où le peuple a encore du pouvoir, un accès direct. A partir du moment où on veut donner le pouvoir au peuple, il faut que les organes de pouvoir soient représentatifs de celui-ci.  Ma vision de la démocratie c’est quand il y a une liberté de parole de décision par la population."

La clef de leur projet c'est le tirage au sort. Ce mode de désignation serait plus représentatif, plus démocratique. Fin mai Agora espère obtenir un siège au parlement bruxellois. L'heureux élu, si élu il y a, sera le porte-voix d'une assemblée citoyenne tirée au sort via l'annuaire téléphonique, le porte à porte.
agora bruxelles
Le groupe Agora Brussels. 

Tirage au sort

Une assemblée hétérogène qui, elle, décidera des thèmes à discuter. Une manière d'introduire la démocratie participative dans un système de démocratie élective.
Pour Olivier Vermeulen candidat sur la liste Agora, "il faut que le tirage au sort soit accompagné de critères pour pouvoir s'assurer d'avoir autant d'hommes que de femmes dans l'assemblée, autant de personnes de chaque tranche d'âge pour représenter la population. Un troisième critère que l'on suit ce sont les diplômes que les gens ont."
 
Il y a une urgence démocratique et des problèmes de répartition de la richesse mais ce qui est très important, c'est que, quand bien même j'ai une opinion personnelle, on va laisser le peuple s'exprimer par la voix que nous considérons comme démocratique. Jean Rosenfeld, candidat sur la liste Agora
Julia Grosman candidate, elle aussi, sur la liste Agora, témoigne de la méfiance grandissante des électeurs envers les élus et le système. "Le citoyen lambda n'est plus représenté car nos politiciens ont toujours été des politiciens. Le politique est décalé des réalités du peuple."

Sous l'impulsion du G1000

Ces idées, ces réflexions s'inspirent de l'essai de David Van Reybrouck " Contre les élections " publié en 2013. David Vanrey est aussi l'un des initiateurs du G1000, cette assemblée de citoyens clin d'œil au G20 et qui planchait sur une meilleure organisation de la démocratie belge.

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Participer mais aussi délibérer

Min Reuchamps est professeur de science politique à l'Université catholique de Louvain, spécialise du fédéralisme et lui même a adhéré aux idées du G1000.
Alors pourquoi est-ce le moment ?  "C'est parce qu'à la fois il y a ce grand désamour mais aussi en réaction à ce désamour, de dire non on peut pas laisser comme ça notre vivre ensemble il est trop important pour le laisser à quelques personnes élues ou représentant certains lobbies. Il faut alors que les citoyens reviennent dans la bagarre démocratique mais on ne peut pas le faire simplement comme ça, car on voit bien, comme les Réseaux sociaux nous le montrent, on a tendance à être mis dans des silos. Or ce qui nous manque c'est de pouvoir délibérer... C'est pourquoi il doit y avoir un gros travail pour repenser la démocratie, la renouveler."
 

A quelques kilomètres la frontière allemande, Eupen, une petite communauté certes tranquille mais qui fait preuve d'audace. Eupen, son cloché, son équipe de foot au cœur de la communauté germanophone de Belgique.

Audace de la communauté germanophone 

En septembre prochain, un conseil de citoyens siégera aux côtés des élus au parlement germanophone et une assemblée de citoyens tirée elle aussi au sort sera mise en place. On peut imaginer que cet homme qui fait son marché, cette femme qui tient un commerce pourront faire partie du conseil de citoyens si le hasard les désigne. Pendant 18 mois ils feront remonter les préoccupations des citoyens discutées dans l'assemblée. D'autres ensuite leur succéderont.

Oliver Paasch est le ministre-président de la communauté germanophone. Lui aussi a lu "Contre les élections" et avec d'autres hommes politiques de la région il a œuvré pour que cette autre forme de démocratie participative et délibérative soit instaurée. "
Le but est de créer une plate-forme pour les citoyens qui leur permette de participer à la vie politique, de suivre la politique, de contrôler la politique, explique Oliver Paasch Ministre-président de la communauté germanophone. En même temps notre ambition c'est de lutter par ces instruments complémentaires de notre démocratie contre le populisme, l’extrême droite, l’extrême gauche qui sont des ennemis de notre système représentatif actuel."
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Un conseil et une assemblée de citoyens

Et c'est donc dans l'hémicycle du parlement occupé ce jour-là par des étudiants, comme en prélude à la future assemblée, que le conseil débattra avec les députés.

assemblée
L'hémicycle du parlement occupé ce jour-là par des étudiants.
©TV5MONDE


Pour l'actuel président du parlement, Alexander Miesen, ce système est innovant car il permet aux citoyens de décider des thèmes à débattre dans la mesure des compétences du parlement germanophone.

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Mais Alexander Miesen, président du parlement germanophone, a dû convaincre ses collègues de partager le pouvoir. Pas toujours facile pour un élu... "Je devais amener toutes les fractions à un accord et l'opposition m'a reproché que je pouvais instrumentaliser la majorité et la majorité craignait que j'instrumentalise l'opposition, explique Alexander Miesen. Il a fallu beaucoup de tractations, un travail de persuasion mais nous avons abouti à une unanimité au Parlement et je crois que c'est un signal important et essentiel pour que toute cette histoire fonctionne à la fin."

Au sein du parlement une exposition invite les jeunes à s'interroger sur le pouvoir, les préjugés ou le droit. Une interactivité pour que la nouvelle génération devienne actrice de son futur et de sa démocratie. La communauté germanophone est peut-être moins connue, plus discrète et au passé tourmenté, elle pourrait montrer l'exemple aux Francophones et Néerlandophones... voire aux Européens.
 
>> A revoir notre émission Bar de l'Europe.