La justice belge ordonne le maintien en détention provisoire de l'eurodéputée grecque et vice-présidente du Parlement européen, Eva Kaili. Elle a été interpellée mi-décembre puis inculpée dans le cadre d'une enquête pour corruption impliquant le Qatar.
Eva Kaili reste en prison. C’est la décision prise par la chambre du conseil de Bruxelles. Incarcérée depuis le 12 décembre, l’élue européenne de nationalité grecque a comparu devant cette instance judiciaire après avoir demandé un placement sous bracelet électronique.
Onze jours après son incarcération, la justice belge a décidé de prolonger “
la détention préventive d'un mois", annonce le parquet fédéral. Les avocats de la parlementaire ont décidé de ne pas faire appel de la décisionn, a indiqué l’un d'eux, André Risopoulo. Ils ont par ailleurs réaffirmé qu’ils espéraient obtenir une remise en liberté assortie d'un placement sous bracelet électronique, faisant notamment valoir sa "
participation active" à l'enquête et l'absence de risque de fuite.
Elle clame son innocence
Depuis son interpellation, l'eurodéputée de 44 ans nie toute corruption. Selon une source judiciaire belge, des sacs remplis de billets de banque d'une valeur de 150 000 euros ont été découverts dans son appartement à Bruxelles.
Ancienne présentatrice du journal télévisé, devenue une figure controversée du parti socialiste grec (Pasok-Kinal) - qui l'a exclue dès les premières révélations -, Eva Kaili ne cesse de démentir avoir reçu de l'argent du Qatar pour influencer ses décisions politiques. Eva Kaili "
ne connaissait pas l'existence de cet argent", a affirmé son avocat grec Michalis Dimitrakopoulos.
Plusieurs proches inquiétés par la justice
Le 14 décembre avait déjà été décidé le maintien en prison de Francesco Giorgi, compagnon de l'eurodéputée socialiste, et de l'ancien eurodéputé Pier Antonio Panzeri, qui apparaissent aussi comme des figures clefs du dossier. En Grèce, un compte bancaire commun du couple a été saisi par la justice, ainsi qu'un terrain de 7000 m2 sur l'île de Paros acheté via ce compte, selon une source judiciaire. Une enquête a été ouverte par le parquet financier d'Athènes.
Un quatrième inculpé, Niccolo Figa-Talamanca, dirigeant d'une ONG, s'est vu accorder un placement sous bracelet électronique. La mesure a entretemps été suspendue car le parquet fédéral a interjeté l'appel. Une audience a été fixée au 27 décembre, selon son avocate.
Le père d'Eva Kaili a, lui, été gardé à vue 48 heures dans la capitale belge, tandis que l'épouse et la fille de Pier-Antonio Panzeri, ciblées par un mandat d'arrêt européen, ont été interpellées en Italie. Elles contestent devant les tribunaux italiens leur remise à la Belgique.
Déjà un million et demi d’euros saisis
L'enquête dirigée par le juge financier Michel Claise, en charge de l'affaire, a donné lieu à 20 perquisitions entre le 9 et le 12 décembre, y compris dans les locaux du Parlement européen à Bruxelles. Au total, les enquêteurs belges ont mis la main sur 1,5 million d'euros en liquide, d'après une source judiciaire.
Outre les 150 000 euros découverts chez Eva Kaili, son père a été surpris avec une valise contenant 750 000 euros en espèces. Enfin, 600 000 euros ont été saisis au domicile de Pier-Antonio Panzeri, ancien élu socialiste du Parlement européen. Il a fondé en 2019 à Bruxelles l'ONG Fight Impunity, dont les trois ans d'activité sont désormais scrutés à la loupe.
(Re) lire : Soupçons de corruption par le Qatar: Eva Kaili refuse de céder son siège au parlement européenLe dirigeant syndical italien Luca Visentini, qui connaît M. Panzeri, a admis cette semaine avoir reçu de Fight Impunity un don en espèces d'environ 50 000 euros, mais il a assuré qu'il n'était lié à aucune tentative de corruption ou trafic d'influence au profit du Qatar.
Inquiété dans l'enquête, Luca Visentini, secrétaire général de la Confédération syndicale internationale (CSI, Ituc en anglais), a été libéré sous contrôle judiciaire après deux jours de garde à vue. Mercredi 21 décembre, il a été
"suspendu" de ses fonctions par l'organe de direction de la CSI.
Une onde de choc au Parlement européen
Dans ce scandale qui a provoqué une onde de choc au Parlement européen et des tensions entre le Qatar et l'UE, Eva Kaili fait partie d'un quatuor de suspects incarcérés après une inculpation pour "
appartenance à une organisation criminelle", "
blanchiment d'argent" et "
corruption".
Sur le plan diplomatique, le scandale ébranle la relation entre l'UE et le Qatar, qui a prévenu d'un possible
"impact négatif" sur l'approvisionnement en gaz. L'émirat, qui "
rejette fermement" les accusations, a protesté contre un vote intervenu le 15 décembre au Parlement européen qui vise à suspendre l'accès "
des représentants d'intérêts qatariens" le temps de l'enquête.