Biens mal acquis : l'oncle de Bachar al-Assad condamné à 4 ans de prison en France

Ridaat al-Assad, oncle du dirigeant syrien Bachar al-Assad a été condamné par la cour d'appel de Paris à 4 ans de prison pour s'être frauduleusement constitué en France un patrimoine évalué à 90 millions d'euros.
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Rifaat Assad le 15 novembre 2011
Rifaat al-Assad pose pour un photographe à Paris, en novembre 2011. L'oncle de Bachar al-Assad a été condamné ce 9 septembre 2021 à quatre ans d'emprisonnement pour s'être frauduleusement constitué en France un patrimoine évalué à 90 millions d'euros.
© AP Photo/Michel Euler
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Ridaat al-Assad vice-président de la Syrie, 84 ans vit en exil depuis 1984. Le tribunal de Paris, l’a reconnu coupable de blanchiment en bande organisée de détournement de fonds publics syriens, entre 1996 et 2016.

Absent à l'énoncé de l'arrêt, il n'a pas assisté au procès. Sa défense a immédiatement annoncé un pourvoi en cassation.

Ancien chef des forces d'élite de la sécurité intérieure, les Brigades de défense, Rifaat al-Assad a été au cœur du régime de Damas, participant au massacre de Hama en 1982, perpétré pour réprimer une insurrection islamiste.
L’homme qui se présente aujourd'hui comme un opposant à son neveu Bachar al-Assad - au pouvoir depuis 2000 à Damas - voit l'ensemble des biens immobiliers concernés confisqués par la justice. 

La fin de l'impunité

La justice a saisi deux hôtels particuliers, des dizaines d'appartements à Paris, un domaine avec château et haras dans le Val-d'Oise (en région parisienne) ainsi que des bureaux à Lyon, auxquels peuvent être ajoutés 8,4 millions d'euros correspondant à des biens vendus. Ces propriétés étaient détenues par Rifaat Al-Assad et ses proches via des sociétés domiciliées au Panama, au Liechtenstein et au Luxembourg.
 
Le manoir de Bessancourt dans le Val-d'Oise
Le manoir de Bessancourt, dans le Val-d'Oise en région parisienne, 600m2, fait partie du patrimoine immobilier de Rifaat al-Assad évalué dans son ensemble à 160 millions d'euros. Le manoir et son haras est à l'abandon depuis 2013. Il fait partie des biens confisqués par le Tribunal de Paris qui a condamné l'oncle du dirigeant syrien Bachar al-Assad à 4 ans de prison. 
© AP Photo/Thibault Camus

Contraint à l'exil en 1984 après un coup d'Etat manqué contre son frère Hafez al-Assad, il s'était installé en Suisse puis en France avec sa famille et 200 fidèles.

Lui qui n'avait aucune fortune familiale en Syrie avait alors bâti un empire immobilier évalué aujourd'hui à 800 millions d'euros, principalement en Espagne mais aussi en France et en Grande-Bretagne, qui a tardivement éveillé les soupçons.

Toute la question du procès était de savoir avec quel argent Rifaat al-Assad a acquis ses biens français.

Aux yeux du tribunal, cet empire immobilier a été acquis avec de l'argent illicite: "Des éléments concordants accréditent l'existence de détournements de fonds publics aux dépens de l'Etat syrien et au profit exclusif de Rifaat al-Assad", notamment l'"analyse d'éléments bancaires", a résumé la présidente.

Comme le tribunal correctionnel en juin 2020, la cour d'appel a estimé que la fortune du prévenu était issue des caisses de l'État syrien, en particulier de fonds que son frère Hafez al-Assad avait accepté de débloquer en échange de son exil.

Rifaat al-Assad, aujourd'hui résident britannique, a aussi été condamné pour blanchiment de fraude fiscale aggravée, ainsi que pour travail dissimulé d'employés de maison.

Il a en revanche été relaxé sur des faits couvrant la période 1984-1996, pour des raisons juridiques.

Au fil des deux procès, sa défense avait soutenu que l'argent de Rifaat al-Assad avait une origine "parfaitement licite" s’agissant d’une "aide massive" du prince héritier puis roi d'Arabie saoudite, Abdallah, entre les années 1980 et sa mort en 2015.
 

Rifaat al-Assad assure qu'il doit sa richesse à la générosité d'Abdallah, prince héritier puis roi saoudien, qui l'aurait financé de manière continue entre les années 1980 et sa mort en 2015. 

Ses avocats avaient notamment produit un chèque de 10 millions de dollars signé par Abdallah en 1984, la preuve de trois virements tardifs, entre 2008 et 2010, et plusieurs attestations faisant état d'un soutien financier saoudien.

Ils ont réaffirmé qu'il "n'y a pas au dossier un centime de fonds provenant de Syrie" et que "tous les flux identifiés ont une origine licite".

​Le prévenu était absent des deux procès, empêché pour des raisons médicales, selon sa défense. 

Nouvelle affaire de "biens mal acquis"

L'association Sherpa, à l'origine de cette procédure, a obtenu 30.000 euros de dommages et intérêts et frais de justice. Son avocat, Vincent Brengarth, a salué "la fin de l'impunité pour ce clan Assad".
 

Rifaat al-Assad, décoré de la Légion d'honneur en France en 1986, est menacé d'un procès en Espagne pour des soupçons bien plus vastes de "biens mal acquis", et poursuivi en Suisse pour des crimes de guerre commis dans les années 1980.

Il s'agit de la deuxième affaire de "biens mal acquis" jugée en France, après les procès du vice-président de Guinée équatoriale Teodorin Obiang, condamné en son absence en février à trois ans avec sursis, 30 millions d'euros d'amende et la confiscation de tous ses biens saisis.