Fil d'Ariane
Dans la nuit de mardi à mercredi, un glissement de terrain dans le nord de la Birmanie a provoqué la disparition de dizaines de personnes, et au moins trois morts.
L'accident s'est produit dans une mine de jade de Hpakant. "Environ 70 à 100 personnes sont portées disparues (...) autour de 4 heures du matin" dans l'Etat Kayah, a déclaré Ko Ny, un membre de l'équipe de sauvetage, à l'AFP. "Nous avons envoyé 25 blessés à l'hôpital", a-t-il ajouté. Le journal Kachin News a de son côté annoncé que vingt mineurs auraient été tués dans le glissement.
Environ 200 secouristes participent selon le sauveteur aux recherches, certains à bord de bateaux pour tenter de repêcher des corps sur un lac, tout comme les pompiers de la ville. Ils n'ont pour l'instant pas communiqué de bilan. Le premier corps a été retrouvé dès mercredi, et les autres dans la matinée de jeudi.
L'accident a eu lieu dans un gisement de jade, une industrie lucrative mais opaque et peu réglementée, où les conditions de travail sont très dangereuses.
En Birmanie, des dizaines de mineurs meurent chaque année en travaillant dans ces carrières. Les glissements de terrain sont fréquents dans cette région pauvre et difficile d'accès, aux allures de paysage lunaire tant elle a été altérée par les grands groupes miniers, au mépris de l'environnement.
À la suite d'un moratoire en 2016, beaucoup de grandes mines ont fermé et ne sont plus surveillées, permettant le retour de nombreux mineurs indépendants. Issus de communautés ethniques défavorisées, ces derniers opèrent quasi clandestinement dans des sites laissés à l'abandon par les pelleteuses.
Le commerce de jade génère plus de 30 milliards de dollars par an, près de la moitié du Produit intérieur brut du pays.
Une très faible partie de cette manne financière finit dans les caisses de l'Etat birman, la plupart du jade de qualité étant passé en contrebande en Chine où la demande pour cette pierre, censée symboliser la prospérité, semble insatiable.
Ce commerce draine en revanche des fortunes pour les militaires qui contrôlent l'accès à la région de Hpakant depuis le début des années 1990 et détiennent de nombreuses concessions minières.
Autre acteur incontournable: l'Armée de l'indépendance Kachin (KIA), une faction rebelle en lutte depuis des décennies avec les militaires pour le contrôle des mines et des revenus qu'elles génèrent. Au final, tout le monde perçoit des pots-de-vin et le jade finance de nombreux conflits entre militaires et groupes ethniques dans la région et même au-delà.
Le coup d'Etat de février a anéanti toute chance d'aboutir à une réforme du secteur initiée sous Aung San Suu Kyi, a indiqué l'organisme de surveillance Global Witness dans un rapport publié en 2021.