Fil d'Ariane
Les Brics se sont retrouvés ce mardi 22 août 2023 à Johannesburg. Un des enjeux du 15e sommet des cinq économies émergentes (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) est la possible expansion du bloc, qui veut étendre son influence dans le monde.
Les dirigeants de quatre des cinq BRICS. De gaucha à droite, le brésilien Luiz Inácio Lula da Silva, le sud-africain Cyril Ramaphosa, l'indien Narendra Modi et le ministre chinois du Commerce Wang Wentao.
Les Brics pèsent 23% du PIB (Produit intérieur brut) mondial et représentent 42% de la population du globe mais le groupe est hétérogène : les cinq pays, répartis sur quatre continents, sont dotés d'économie à la croissance inégale.
Une vingtaine de nations tout aussi disparates ont demandé à rejoindre le bloc, dont l'Algérie, l'Arabie Saoudite, l'Argentine, le Bangladesh, Cuba, l'Égypte, ou encore l'Éthiopie, l'Iran et le Vietnam. D'autres comme le Mexique, le Pakistan ou la Turquie ont exprimé leur intérêt.
Au vu de la diversité des aspirants, "il est difficile de voir quels pourraient être les critères pour une possible expansion", relève auprès de l'AFP John Stremlau, spécialiste en relations internationales à l'Université du Witwatersrand à Johannesburg.
Pretoria, qui a planché sur les conditions d'entrée à observer, devrait soumettre une proposition aux pays membres lors du sommet.
L'arrivée de nouveaux entrants pourrait modifier les équilibres géopolitiques du bloc. Les Brics ont en commun leur revendication d'un équilibre économique et politique mondial multipolaire, notamment au regard de l'influence des Etats-Unis et de l'Union européenne.
Parmi ceux en lice pour les rejoindre, de nombreux pays sont traditionnellement non alignés, comme l'Indonésie et l'Éthiopie. Mais certains sont aussi ouvertement hostiles aux États-Unis et à leurs alliés, comme l'Iran et le Venezuela.
"Si l'Iran est ajouté aux Brics, cela changera évidemment la portée politique du groupe de manière significative", tout comme dans le cas d'une adhésion de l'Arabie Saoudite, estime Cobus Van Staden, chercheur sud-africain spécialiste des relations Chine-Afrique.
La Nouvelle banque de développement (NDB) créée en 2015 par les Brics avec l'ambition de proposer un choix autre que la Banque mondiale et le FMI, a déjà accueilli de nouveaux membres : Bangladesh, Emirats arabes unis et Egypte. L'Uruguay doit aussi bientôt en faire partie.
Selon Pretoria, cela constitue déjà une forme d'élargissement du groupe.
Mais "si les Brics veulent continuer à être le groupe des +grandes économies émergentes+, il serait logique de faire entrer dans le bloc des pays du Sud membres du G20", souligne M. Stremlau. Deux des pays qui se sont déclarés candidats appartiennent au G20, à savoir l'Arabie Saoudite et l'Indonésie.
"Il faudra beaucoup de temps et de pratique de la dure discipline qu'est la diplomatie" pour venir concurrencer le G20 ou le G7, ce dernier étant composé de pays "alliés depuis des décennies", estime M. Stremlau.
Avant de débattre des conditions d'entrée, les Brics doivent s'accorder sur l'idée même d'un élargissement, la Chine et l'Inde, les deux économies les plus puissantes du bloc, étant divisées sur la question.
Pékin veut développer son influence mondiale et considère les Brics comme "un moyen unique" de le faire, selon Brian Hart du Centre d'études stratégiques et internationales à Washington. Mais Delhi reste sur la réserve, se méfiant des intentions de son rival régional chinois.
Pretoria soutient clairement l'idée d'un élargissement, tout comme Moscou.
Le président brésilien, Luiz Inacio Lula da Silva, a plaidé mardi sur les réseaux sociaux en faveur d'une adhésion notamment de l'Argentine, en difficulté pour rembourser au FMI un prêt de 44 milliards de dollars, aux prises avec une inflation sans précédent et un manque de devises. "C'est très important que l'Argentine fasse partie des Brics", a souligné le chef d'Etat.
Créé avec quatre membres en 2009, le bloc a été rejoint par l'Afrique du Sud en 2010.