José Bové n'est donc pas le bienvenu au Canada ? Arrivé mardi à Montréal pour assister à une conférence sur le traité de libre-échange Canada/Europe, le fameux CETA, le député européen s'était fait confisquer son passeport. Face à la polémique, les autorités douanières l'ont finalement autorisé à rester.
José Bové a bien failli se faire expulser du Canada. Pour quelle raison? La participation prévue du député européen à une conférence, publique, organisée mardi soir à Montréal, sur le désormais célèbre CETA, le traité commercial de libre échange entre le Canada et l'Europe, cousin du TTIP, son équivalent entre les Etats-Unis et l'Europe, qui lui a pour l'instant été mis au placard. (Lire
notre article sur le TTIP).
A son arrivée à l'aéroport de Montréal, ce mardi 11 octobre, l'élu français s'est vu refuser le droit d'entrer dans le pays par les services douaniers qui l'ont interrogé sur son « passé activiste ». Il était pourtant en possession d'un visa en règle.
Un passé activiste gênant ?
Il a dû annuler de fait son intervention à la tribune de l'assemblée organisée dans la soirée, à laquelle prenaient part de nombreux groupes tels que la Confédération des syndicats nationaux (CSN), le Conseil des Canadiens et le Réseau québécois sur l'intégration continentale (RQIC).
Après plus de quatre heures d'attente aux douanes, José Bové a été autorisé à se rendre à son hôtel. Il devait initialement séjourner à Montréal jusqu'à jeudi et participer à d'autres événements de protestation en lien avec l'accord de libre-échange canado-européen. Ce qu'il a pu finalement faire. Les autorités douanières ont décide mercredi de l'autoriser à rester à Montréal.
« José Bové, notre invité, va être expulsé vers la France. Honte ! », écrit sur Twitter Maude Barlow, présidente du Conseil des Canadiens, un centre de réflexion à gauche organisateur de la conférence à laquelle le député européen participait.
« On se pose de sérieuses questions [...] bien que le gouvernement Trudeau a le discours de faire des débats publics, on voit que les frontières sont fermées pour quelqu'un qui s'oppose à un accord fortement contesté », ajoute un autre participant à la conférence, Pierre-Yves Serinet, coordonnateur du RQIC.
Ce n'est pas un criminel. C'est un député élu du Parlement européen. C'est simplement une situation extrêmement gênante Jean-Marc Desfilhes, attaché de presse de José Bové
Sur les réseaux sociaux, internautes et observateurs ont vite commenté l'information, de manière plus ou moins humoristique.
José Bové, pourfendeur du CETA
L'eurodéputé écologiste a déjà plusieurs fois pris position contre l'accord de libre-échange entre l'Europe et le Canada. Le 11 septembre dernier, dans
les colonnes de Libération, il s'indignait que l’Europe ait
« sacrifié » 32 fromages sur l’autel du libre-échange avec l’accord CETA, reprenant une argumentation déjà déployée
sur RTL au printemps.
L'Accord économique et commercial global (AECG, ou CETA, acronyme en français) entre le Canada et l'Union européenne doit être signé par le gouvernement canadien le 27 octobre à Bruxelles lors d'un sommet en présence de Justin Trudeau, mais il devra ensuite être ratifié par les parlements des états membres. Certains pays, dont l'Allemagne, l'Autriche ou la Belgique, ont récemment exprimé des réserves sur cet accord très décrié par des syndicats ou des associations et partis de gauche.
Manuel Valls, promoteur du CETA
Le premier ministre français Manuel Valls est attendu au Canada ce mercredi pour faire la promotion de cet accord. Pour sa première visite, en tant que chef de gouvernement, il se rendra d'abord à Ottawa, la capitale fédérale, où il passera la matinée du jeudi avec son homologue canadien Justin Trudeau.
Le Premier ministre canadien pourtant habituellement très prolixe sur les réseaux sociaux n'a fait aucun commentaire sur "l'affaire Bové", aussi bien sur Twitter que sur sa page Facebook, ses dernières publications s'adressent à la communauté juive canadienne qui célèbre Yom Kippour. Ce qui lui vaut un commentaire "amusé voire critique" d'une internaute :
" Bravo M. Trudeau !...Refuser la présence d'un député européen ecologiste sur son territoire... C'est moche ;-( ".
Le Canada interdit généralement l’entrée de son territoire aux personnes avec des antécédents au pénal. José Bové a été condamné pour son implication dans le démontage d’un restaurant McDonald’s en 1999 puis pour la destruction en 2008 d’un champ de maïs expérimental transgénique Monsanto. A noter qu'un autre homme politique français, Alain Juppé, pourtant condamné par le passé, avait pu mener des conférences pendant plusieurs mois au Canada. Il avait été condamné en 2004 par le tribunal correctionnel de Nanterre à 18 mois de prison avec sursis et à une peine de 10 ans d'inégibilité.