Fil d'Ariane
C'est un grave revers personnel pour Carles Puigdemont, mais un demi-quitus seulement accordé par la justice allemande à son homologue espagnole : le dirigeant indépendantiste catalan qu'elle retient peut bien être extradé, mais non pour l'accusation la plus grave et la plus politique de "rebellion".
"L'extradition pour l’accusation de détournement de fonds publics est recevable, une extradition pour l'accusation de rébellion n'est pas recevable", a indiqué le tribunal du Schleswig-Holstein, précisant que désormais il revient au procureur d'organiser cette remise aux autorités espagnoles et que l'ex-président de la catalogne "Carles Puigdemont reste libre" dans l'intervalle.
Le parquet a précisé par la suite qu'il allait "décider sous peu de l'autorisation d'extrader l'accusé pour détournement de fonds".
La décision du tribunal porte un coup aux chefs d'accusations espagnols, car elle peut empêcher un procès pour rébellion, crime passible de 30 ans de prison en Espagne: "la cour part du principe que le tribunal espagnol respectera (la décision allemande) et qu'il ne poursuivra pas l'accusé Puigdemont pour rébellion en plus de l'accusation de corruption".
Les juges ont aussi rejeté les arguments de l'indépendantiste catalan qui estimait être victime de poursuites politiques et que dès lors son extradition devait être interdite.
"Il est aberrant de porter (une telle accusation) contre l'Etat espagnol, membre de la communauté de valeur et de l'espace juridique de l'Union européenne", estime le tribunal.
Poursuivi pour rébellion et détournements de fonds en Espagne en raison du référendum d'indépendance catalan organisé à l'automne 2017, Carles Puigdemont s'était réfugié en Belgique après sa destitution de la présidence catalane par Madrid et de là voyageait pour tenter d'internationaliser son combat.
Il avait été interpellé fin mars dans le nord de l'Allemagne. Il revenait d'un déplacement en Finlande, en voiture, en route pour la Belgique.
Au total, 25 dirigeants séparatistes catalans sont inculpés pour leur rôle dans la tentative de sécession du 27 octobre, le jour du vote par le parlement catalan d'une vaine déclaration unilatérale d'indépendance.
Parmi eux, treize sont accusés de rébellion et risquent jusqu'à 25 ans de prison. Neuf de ces treize sont actuellement en détention provisoire tandis que quatre se sont enfuis à l'étranger comme Carles Puigdemont.
La Cour suprême espagnole a clos mardi l'instruction. "Le juge Pablo Llarena a conclu l'instruction de l'affaire du processus" de sécession et a ordonné "la suspension des fonctions de Carles Puigdemont et des cinq autres députés (régionaux) inculpés de rébellion", qui sont pour leur part en détention provisoire, a écrit la Cour dans un communiqué.
L'instruction close, les dirigeants indépendantistes inculpés vont pouvoir être renvoyés en justice. Selon la presse espagnole, le procès pourrait avoir lieu en octobre.
Les trois derniers dirigeants indépendantistes catalans emprisonnés près de Madrid pour leur rôle dans la tentative de sécession ont été transférés mercredi dans une prison de la région.
Les ex-"ministres" régionaux Jordi Turull, Josep Rull et Joaquim Forn "sont au centre pénitentiaire de Lledoners", à 70 km au nord de Barcelone, a indiqué une porte-parole du département de la Justice du gouvernement régional.
Avant eux, six autres dirigeants, dont l'ex-vice-président catalan Oriol Junqueras et l'ex-présidente du parlement régional Carme Forcadell, avaient déjà été transférés mercredi dernier en Catalogne, à Lledoners et dans une autre prison près de Figueras.
Madrid avait annoncé la semaine dernière le transfert des indépendantistes emprisonnés dans un geste d'apaisement avant la première réunion au sommet lundi entre le nouveau chef du gouvernement Pedro Sanchez et le président catalan Quim Torra qui a permis de renouer le dialogue malgré des positions antagonistes sur la question de l'autodétermination.