Le calme est revenu samedi en fin d'après-midi à Niamey après une journée d'émeute. Une dizaine d'église ont été incendiées.La veille, c'est le Centre culturel français de Zinder, deuxième ville du Niger, qui a partiellement brulé, après la publication d'une caricature de Mahomet en Une du dernier numéro de Charlie Hebdo.
Mise à jour du 18 janvier 2015
Un dernier bilan fait état de 10 morts au Niger au cours des deux derniers jours d'émeutes : 5 à Niamey, hier samedi et 5 à Zinder la veille. A la télévision, le président Mahamedou Issoufou a fermement condamné les manifestants : "Ceux qui pillent ces lieux de culte, qui les profanent, qui persécutent et tuent leurs compatriotes chrétiens ou les étrangers qui vivent sur le sol de notre pays n'ont rien compris à l'Islam" a-t-il martelé. Ce dimanche, l'opposition a tenté de manifester dans Niamey, une manifestation prévue de longue date, mais interdite par le gouvernement. La police a tiré des grenades lacrymogènes pour disperser les marcheurs.
Journée d'émeute ce samedi à Niamey, la capitale nigérienne. Dans la matinée, la police a usé de gaz lacrymogènes pour disperser des manifestants "anti- Charlie Hebdo". Au moins un millier de jeunes s'étaient réunis pour ce rassemblement non autorisé près de la grande mosquée de la ville. L'agitation s'est étendue dans plusieurs quartiers de la ville et une dizaine d'églises ont été incendiées. Pour la plupart, ils s’agissaient d'églises évangéliques dont certaines siégeaient dans de petites villas sans signe religieux distinctifs. L'Ambassade de France à Niamey a appelé ses ressortissants à "éviter toutes sorties". De nombreux bars, hôtels, ou encore des commerces appartenant à des non-musulmans ont été détruits. Finalement, en fin de journée, le calme est revenu sur la ville. Depuis le début de l'après-midi, une vingtaine d'oulémas sont apparus à la télévision nationale pour appeler au calme.Tous avaient au préalable été reçus à la Primature par le Premier ministre Brigi Rafini et les ministres de l'Intérieur et de la Justice, Hassimi Massoudou et Marou Amadou. La rencontre a selon eux permis de dissiper des malentendus concernant la participation du président nigérien Mahamadou Issoufou à la Marche républicaine du 11 janvier à Paris, après l'attaque terroriste qui avait décimé la rédaction de Charlie Hebdo. "Nous sommes tous Charlie", avait ensuite déclaré M. Issoufou sur les ondes, une prise de position fortement critiquée par des associations musulmanes et des ONG locale Des manifestations sont signalés également à Maradi. La veille , c'est Zinder, deuxième ville du Niger, proche du Nigeria, qui a connu un "vendredi noir": quatre personnes sont mortes et 45 ont été blessées au cours de manifestations contre la publication d'une caricature du prophète Mahomet en Une de l'hebdomadaire français Charlie Hebdo. Les protestataires sont sortis "immédiatement après la prière" pour "s'attaquer aux chrétiens de Zinder, aux différentes églises, aux chrétiens dans leurs habitations", a raconté Hassoumi Massaoudou, le ministre de l'Intérieur, à la radio nationale. Des SMS circulaient depuis jeudi appelant à manifester à la sortie des mosquées. Le même mot d'ordre, transmis pendant les offices religieux, a été suivi par des milliers de personnes, selon une source officielle.
En images : Zinder en flammes
Le récit de Stéphane Leroyer
17.01.2015
Un lourd bilan Les violences ont abouti notamment à l'incendie du Centre culturel franco-nigérien (CCFN) et au saccage de trois églises, une catholique et deux évangéliques. Ils ont également fait quatre morts, dont un gendarme renversé par une voiture. Un manifestant est décédé asphyxié par des gaz lacrymogènes et deux autres ont été tués "par balles" alors qu'ils s'en prenaient aux forces de sécurité, a rapporté le ministre. "Pendant leur manifestation, notamment pendant qu'ils attaquaient l'église catholique, ils arboraient l'étendard de Boko Haram", le groupe islamiste armé nigérian qui ensanglante la région, a-t-il affirmé, qualifiant la situation de "gravissime". Interrogés par l'AFP, deux journalistes présents à Zinder n'ont pas confirmé avoir vu de drapeau de Boko Haram. L'un d'entre eux a par contre indiqué avoir aperçu un étendard noir avec "Allah Akbar" (Dieu est grand) écrit en blanc dessus, qui ressemblerait fortement à l'emblème des islamistes nigérians. Le Niger se sait fortement menacé par Boko Haram, qui contrôle depuis début octobre des localités très proches de son territoire. Le directeur du Centre Culture Français a expliqué que malgré des "tirs de sommation" de "deux policiers" présents pour protéger l'établissement, une cinquantaine de manifestants ont mis le feu d'abord à la cafétéria, puis à la médiathèque et à des locaux administratif "Le centre-ville de Zinder est méconnaissable. Au cri de +Allah Akbar+, les manifestants en très grand nombre ont brûlé des pneus partout", a témoigné un commerçant joint au téléphone. Le Niger, comme le Sénégal, avait pourtant interdit la diffusion du dernier numéro de Charlie hebdo, qualifié de "provocation injurieuse et totalement inacceptable", afin de ne pas heurter sa population en grande majorité musulmane. Les manifestants de Zinder ont brûlé un drapeau français, comme le millier de Sénégalais qui avaient manifesté vendredi devant l'ambassade de France à Dakar sans faire de victimes. Protestation dans plusieurs pays musulmans. Des milliers de protestataires ont également marché en Mauritanie, ainsi qu'en Algérie. Hors d'Afrique, des manifestations se sont tenues dans plusieurs pays musulmans, dont la Jordanie. Si la bannière tricolore a été brûlée par des Palestiniens à Jérusalem, la contestation a tourné à l'affrontement devant le consulat français à Karachi (Pakistan), où un photographe de l'AFP a été grièvement blessé. Zinder, ancienne capitale du Niger, avait déjà connu de tels débordements en septembre 2012. Son église catholique, la plus grande du pays, avait été totalement saccagée par des manifestants qui protestaient alors contre un film dénigrant l'islam, réalisé aux Etats-Unis. Le président du Niger, Mahamadou Issoufou, fait partie des six chefs d'Etat africains qui ont participé à la Marche républicaine le 11 janvier à Paris, après l'attaque terroriste qui avait décimé la rédaction de l'hebdomadaire français Charlie hebdo. "Sa participation" à la marche "procède de son engagement contre le terrorisme et pour la liberté" et "ne signifie nullement un quelconque soutien aux dérives qui peuvent découler d'une certaine conception de la liberté de presse", avait corrigé jeudi Marou Amadou, le porte-parole du gouvernement.