Chine : faut-il s'inquiéter du nouveau coronavirus ?

A la mi-décembre, un nouveau virus a été identifié dans le centre de la Chine. Provoquant une épidémie de pneumonie, le "2019-nCoV" se propage depuis plusieurs jours à d'autres pays : Thaïlande, Japon, Corée du Sud, Taïwan et Australie. Jusqu'à présent seuls six coronavirus étaient connus pour contaminer l'être humain. L'Organisation Mondiale de la Santé se réunit le 22 janvier pour déterminer s'il convient de déclarer une "urgence de santé publique de portée internationale". Entretien avec Arnaud Fontanet de l'Institut Pasteur.
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Wuhan marché aux poissons
Le marché aux poissons de Wuhan, dans le centre la Chine, où le virus a été identifié pour la première fois. ©AP Photo / Dake Kang
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Le Nouvel An approche et avec les chassés-croisés dans les transports qui culmineront le 25 janvier, les autorités chinoises s'inquiètent de la propagation du nouveau virus baptisé par l'OMS "2019-nCoV". Le Président Xi Jinping a appelé lundi à enrayer l'épidémie. La menace a été prise au sérieux par Pékin qui a décidé de classer l'épidémie dans la même catégorie que le Sras (Syndrome respiratoire aigu sévère). Entre 2002 et 2003 l'épidémie de Sras avait provoqué la mort d'environ 800 personnes.

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Ce nouveau coronavirus "2019-nCov", jusque-là inconnu, se transmet aux êtres humains et peut, dans certains cas, se révéler lui-aussi mortel. A quoi faut-il s'attendre ? Nous avons interrogé à ce propos Arnaud Fontanet, directeur du département de Santé globale à l’Institut Pasteur.


TV5MONDE : Qu'est-ce qu'un coronavirus ?

Arnaud Fontanet : 
C'est une famille de virus connue pour infecter les animaux et éventuellement les hommes. Il existe six coronavirus responsables de manifestations cliniques chez l'homme, notamment le Mers et le Sras qui donnent des infections respiratoires sévères. Depuis maintenant un mois, un septième coronavirus s'est rajouté : celui qui s'est propagé dans la ville de Wuhan en Chine. A ce jour il n'existe pas de traitement pour ces types de coronavirus. Les patients sont pris en charge. Quand ils ont des formes respiratoires graves, ils sont intubés et ventilés dans les services de réanimation. Mais c'est uniquement pour les formes graves qui sont rares. Sinon il s'agit de traitement pour la fièvre. On peut aussi aider le patient à respirer. Mais cela s'arrête-là. 


Ces trois derniers jours, les choses se sont accélérées : quatre nouveaux pays sont touchés (Thaïlande, Japon, Corée du Sud, Taïwan). Quels sont les risques de transmission de ce coronavirus ?

A.F : La question qui se posait depuis le début de cette épidémie était : y-a-t-il eu une contamination au marché de Wuhan sans transmission de personne à personne ou les premières personnes infectées en ont-elles infectées d'autres ? La réponse a été apportée lundi par les autorités chinoises qui ont déclaré qu'il y avait eu effectivement des cas évidents de transmission interhumaines. Il s'agit en particulier de personnels soignants au contact de patients infectés par le coronavirus et qui sont tombés malades suite à cette exposition. Donc on sait maintenant que le virus est capable de se transmettre d'homme à homme et donc qu'on a une possibilité d'épidémie (qui atteint rapidement un grand nombre d'individus). On ne sait pas encore la portée de cette transmission d'homme à homme. Selon nos estimations aujourd'hui il y a quelques centaines voire mille à deux mille patients en Chine. Depuis une semaine certains de ces patients ont voyagé.


Faut-il s'inquiéter à l'approche du Nouvel chinois d'une propagation plus rapide de l'épidémie ?

A. F. : On ne sait pas jusqu'à quel point ce virus est transmissible. Il est donc très difficile aujourd'hui de donner une estimation de ce que pourrait devenir cette épidémie. Si on devait mettre les choses en perspective, on peut dire sans se tromper que la grippe va tuer beaucoup plus cette année que ne tue ce nouveau coronavirus. Pour le moment, il y a moins de 10 décès répertoriés sur probablement plus de 1000 patients. Mais lorsqu'il y a un phénomène nouveau, on est forcément inquiets et c'est la raison pour laquelle nous sommes tous extrêmement vigilants. L'histoire du Sras nous avait appris que le virus s'était adapté et qu'il était devenu par la suite beaucoup plus transmissible. Pour le moment, nous observons les chaînes de transmission afin de voir jusqu'où ce virus s'étend. Et sur cette base-là on pourra dire s'il évolue, s'il est plus transmissible ou non. Pour le moment, il semblerait que la transmission soit limitée.