Chine : Pourquoi la contestation monte dans le pays ?

Les autorités chinoises font face à un mouvement de colère contre les restrictions sanitaires et pour plus de liberté.
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Des personnes manifestent silencieusement contre les restrictions sanitaires en Chine.
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Les autorités chinoises tentaient lundi d'enrayer le mouvement de colère contre les restrictions sanitaires et en faveur de plus de libertés, des manifestations d'une ampleur historique et soutenues à l'étranger, notamment par les Nations unies.

Par son étendue, la mobilisation évoque les rassemblements pro-démocratie de 1989, durement réprimés. Elle est le point d'orgue d'une grogne populaire qui couve depuis des mois en Chine, l'un des derniers pays au monde à appliquer une stricte politique "zéro Covid".

Aux origines de la colère

 

En avril, un montage vidéo de six minutes composé de clips d'habitants de Shanghai désespérés est rapidement devenu viral sur les réseaux sociaux chinois, avant d'être censuré. 

Ils y disaient leur souffrance face au sévère confinement imposé, en mars et avril.

Le montage avait été publié dans de multiples formats pour tenter d'échapper à la censure. C'était la plus grande vague de protestation en ligne depuis la mort en février 2020.

En mai, des centaines d'étudiants d'un campus de l'université d'élite de Pékin ont protesté contre les mesures strictes de confinement qui accordaient une plus grande liberté de mouvement au personnel universitaire qu'aux étudiants.  

Cette rare manifestation a ensuite été désamorcée après que les autorités ont accepté d'assouplir certaines restrictions. 

Les campus de toute la Chine ont été bouclés pendant la quasi-totalité de la pandémie. 

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Soutien de l'étranger

A l'étranger, ces manifestations ont reçu des marques de soutien, notamment du président des Etats-Unis Joe Biden.

"La Maison Blanche soutient le droit à manifester de manière pacifique", a déclaré M. Biden lors d'un échange avec la presse, en faisant valoir qu'il "se tient informé de ce qui se passe" de "près".

Plus tôt, un porte-parole du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme, Jeremy Laurence avait appelé "les autorités à répondre aux manifestations conformément aux lois et normes internationales relatives aux droits humains", 

A Washington, John Kirby, porte-parole du Conseil de sécurité nationale, un organe rattaché au président américain, ne s'est pas prononcé sur le fond de ces revendications: "Ces manifestants parlent pour eux-mêmes" et a sigifié la volonté américaine de "garder ouverts les canaux de communication" avec les autorités chinoises.

Le département d'Etat a de son côté souligné que "cela fait longtemps que nous disons que tout le monde a le droit de manifester pacifiquement, ici aux Etats-Unis et partout dans le monde". "Cela inclut la Chine", a-t-il précisé dans un communiqué.

Même tonalité en Allemagne où le président a dit "espérer que les autorités en Chine respecteront le droit à la liberté d'expression et de manifestation". "Je comprends que les gens expriment leur impatience et leurs griefs dans les rues", estime dans un entretien au média Deutsche Welle Frank-Walter Steinmeier, une autorité morale dans son pays.

Dimanche, une foule de manifestants, répondant à des appels sur les réseaux sociaux, était descendue dans la rue notamment à Pékin, Shanghai et Wuhan, prenant les forces de l'ordre au dépourvu.

Parmi les slogans scandés à l'unisson: "Pas de tests Covid, on a faim!", "Xi Jinping, démissionne! PCC (Parti communiste chinois, ndlr), retire-toi!" ou "Non aux confinements, nous voulons la liberté".

L'incendie mortel survenu à Urumqi, capitale de la province du Xinjiang (Nord-Ouest), a catalysé la colère de nombre de Chinois pour qui les restrictions sanitaires ont entravé les secours.

Elles ont finalement été assouplies dans cette ville où, dès mardi, les habitants pourront se déplacer en bus pour faire leurs courses.

Le ministère chinois des Affaires étrangères a accusé des "forces aux motivations cachées" d'établir un lien entre cet incendie et "la réponse locale au Covid-19", selon son porte-parole Zhao Lijian. Sous "la direction du Parti communiste chinois et (avec) le soutien du peuple chinois, notre combat contre le Covid-19 sera une réussite", a-t-il clamé.

Mais les manifestations ont aussi fait émerger des demandes pour plus de libertés politiques et le départ du président Xi Jinping, à peine reconduit pour un troisième mandat inédit.

(Re)Lire aussi : Chine : "Des manifestants crient leur ras-le-bol, en s'adressant à Xi Jinping. C'est inédit"

Présence policière

Lundi matin, une présence policière était visible à Pékin et à Shanghai, près des lieux de rassemblements de la veille, ont constaté des journalistes de l'AFP.

A Pékin, des manifestants ont été interrogés par la police par téléphone après avoir assisté à des rassemblements, a déclaré lundi à l'AFP l'un d'eux.

A Shanghai, une des rues occupées était désormais entourée de palissades pour empêcher tout nouveau rassemblement. Dans la journée, trois personnes ont été arrêtées près de la rue Urumqi où avait eu lieu une manifestation dimanche.

Des heurts avaient opposé dimanche forces de l'ordre et manifestants. Un journaliste de la BBC en Chine, a été arrêté et "frappé par la police" à Shanghaï , selon ce média.

La plus grande alliance de médias de service public dans le monde, l'Union européenne de Radio-Télévision (UER), a condamné lundi "avec la plus grande fermeté, les intimidations et les agressions intolérables dont sont victimes les journalistes et les équipes de production des membres de l'UER en Chine".

A Pékin, une manifestation prévue lundi en fin de journée a été découragée par la forte présence policière. 

Des véhicules de police étaient alignés le long de la route menant au pont Sitong.

Dans ce secteur désormais patrouillé par la police, une jeune femme d'une vingtaine d'années, venue faire son jogging, a confié lundi à l'AFP avoir suivi le rassemblement de la veille via les réseaux sociaux. 

"Cela a envoyé le signal que les gens en ont marre de ces restrictions excessives", a estimé la jeune femme, sous couvert d'anonymat.

A Hong Kong, territoire secoué par des manifestations pro-démocratie en 2019, des dizaines de personnes se sont réunies lundi à l'Université chinoise en signe de solidarité avec les manifestants et en hommage aux victimes de l'incendie à Urumqi, a constaté l'AFP.

D'autres ont déployé des banderoles et brandi des fleurs dans le quartier Central, coeur financier de la ville.

Sur les réseaux sociaux chinois, toute information concernant ces manifestations semblait avoir été effacée lundi. 

Sur la plateforme Weibo, sorte de Twitter chinois, les recherches "Rivière Liangma" et "rue Urumqi" ne donnaient aucun résultat lié à la mobilisation.

Le contrôle strict des autorités chinoises sur l'information et les restrictions sanitaires sur les voyages à l'intérieur du pays compliquent la vérification du nombre total de manifestants durant le week-end.