Fil d'Ariane
Le logo du constructeur automobile allemand Volkswagen, lors du salon de l'automobile à Paris, le 16 octobre 2024
Le premier constructeur automobile européen en crise Volkswagen a annoncé mercredi vouloir cesser ses activités dans la région chinoise du Xinjiang, qui lui valaient des critiques en raison des accusations de violation des droits humains dont y fait l'objet Pékin.
Le groupe a justifié sa décision par des "raisons économiques" dans un communiqué, mais elle intervient dans un contexte de critiques croissantes contre le groupe sur le plan éthique.
"VW s'incline d'une certane manière devant l'opinion publique", a indiqué à l'AFP l'un des principaux experts du secteur en Allemagne, Ferdinand Dudenhöffer, directeur du Center Automotive Research de Bochum, alors que médias, investisseurs et défenseurs de droits humains montrent du doigt le premier groupe automobile européen depuis des années à cause de sa présence au Xinjiang.
Volkswagen est au centre de l'attention en raison de son usine à Urumqi, la capitale du Xinjiang, ouverte en 2013 et dans laquelle il détient une participation via son partenaire local SAIC.
La banque allemande Deka a déjà retiré les actions Volkswagen de son portefeuille de titres "durables" en mars 2023, après que l'agence de notation américaine MSCI a hissé le drapeau rouge en raison d'allégations de travail forcé dans l'usine d'Urumqi.
Ce site controversé, ainsi qu'une piste d'essais à Turpan, doivent à présent être vendus à l'entreprise chinoise Shanghai Motor Vehicle Inspection Center (SMVIC), selon le communiqué de Volkswagen.
La pression avait augmenté en février, après que le géant allemand de la chimie BASF a annoncé accélérer son retrait de deux coentreprises dans cette région.
Un audit externe commandé par Volkswagen l'année dernière n'a trouvé aucune preuve de travail forcé parmi les 197 employés de l'usine, mais plusieurs médias, dont le Financial Times, ont eu accès dénoncé en septembre des lacunes dans la méthodologie adoptée par le rapport.
Pékin est accusé d'avoir incarcéré plus d'un million de Ouïghours et d'autres minorités musulmanes dans un réseau de centres de détention à travers le Xinjiang.
Des militants et des Ouïghours vivant à l'étranger ont déclaré que toute une série de maltraitances étaient commises dans ces centres, notamment la torture, le travail forcé, la stérilisation forcée et l'endoctrinement politique.
Un rapport des Nations unies publié en 2022 faisait état de preuves "crédibles" de torture, de traitements médicaux forcés et de violences sexuelles ou sexistes, ainsi que de travail forcé, dans la région.
Le groupe met lui purement en avant un "réalignement stratégique" dans le contexte de la transition vers les voitures électriques. En Chine, son principal marché où il livre un tiers de ses voitures, les ventes ont chuté de 15% au troisième trimestre.
La marque phare du groupe, VW, y a perdu du terrain et s'est laissée distancer par les concurrents locaux, perdant son titre de marque automobile la plus vendue au profit de BYD. La région située dans le nord-ouest de la Chine abrite plusieurs fournisseurs d'entreprises multinationales, y compris des grandes marques européennes et américaines.
Volkswagen a également dénoncé la hausse des droits de douanes sur les voitures importées de Chine en Union européenne, décidée par Bruxelles cet été, craignant des répercussions de Pékin qui pourraient impacter ses ventes en Chine.
L'annonce sur Xinjiang intervient alors que le groupe traverse une crise globale inédite et négocie actuellement un plan d'économies qui pourrait conduite à des milliers de licenciements, voire des fermetures d'usines en Allemagne.
Dans ce contexte, l'Allemagne "a besoin d'une relation raisonnable avec la Chine", a expliqué M. Dudenhöffer. Elle "est devenue un pays en crise et la Chine est une pierre angulaire importante pour en sortir", a-t-il ajouté.