Classement mondial des universités : bonne ou mauvaise note ?

La distribution des prix a eu lieu le 15 août et est venue de Shanghaï. La position des universités est un facteur décisif dans le choix des étudiants étrangers, notamment asiatiques, qui souhaitent étudier à l’international. Pourtant dans le top 100, peu d’universités francophones et aucune université africaine. Retour sur ce classement qui fait polémique depuis plus de 16 ans. 
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Ministère français de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation.
 
© Jastrow
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La « ShanghaïRanking Consultancy » est une équipe de chercheurs de l’Université Jiao-tong de Shanghaï. Chaque année, elle publie son classement. Présenté comme une référence pour exprimer le rayonnement universitaire de chaque pays, il nourrit pourtant la controverse et suscite la critique. En cause : les critères retenus.

De fait, les universités américaines sont les grandes privilégiées de ce système. L’université d’Harvard tient la première place comme chaque année depuis la création de ce classement. Dans le top 20 des meilleures universités du monde, trois britanniques (Cambridge – 3ème, Oxford – 7ème, l’UCL – 15ème) et une suisse (L’Ecole polytechnique fédérale de Zurich dite EPFZ – 19ème). Toutes les autres sont américaines : comme Stanford, le MIT, Princeton, Columbia ou Yale qui doivent aussi leur popularité à leur présence dans les films et les séries américaines. 

 
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Campus de l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne 
© Mediacom EPFL
En ouvrant un peu les rangs, le top 100 est plus diversifié. Malgré l’omniprésence américaine, certaines écoles japonaises, australiennes, allemandes, canadiennes et d’autres se taillent une petite place. A signaler, également la présence de deux établissements belges (tous les deux néerlandophones) : l’université de Gand (66ème) et la KU Leuven (85ème). La Suisse fait une meilleure performance car elle ajoute à l’EPFZ (19ème) quatre autres écoles dont l’Université de Genève (58ème) et l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (78ème). Cette dernière est très prisée par les étudiants francophones préparant une carrière à l’international. 

La France ne dispose que de trois établissements qui tous, reculent de quelques places par rapport à l’année dernière. La première université française est donc Paris-Sud (37ème), viennent ensuite Sorbonne Université (44ème) et l’Ecole Normale Supérieure (79ème). D’autres universités françaises figurent mais dans le top 1000 : de l’Université d’Auvergne à l’Ecole Polytechnique, en passant par Paris-Dauphine et les Mines ParisTech. En ne se concentrant que sur un pays à la fois, le classement de Shanghaï est très éloigné de l’ordre des classements nationaux.

Les universités d’Afrique sont quant à elles peu présentes dans le top 1000 : dans les pays francophones, seule figure l’université de Tunis El Manar.  
 
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Université Tunis El Manar, seule université appartenant à l'Afrique francophone dans le  top 1000.
© Michael Sean Gallagher

Comment justifier que les écoles les plus réputées soient si mal classées ?

L’Université de Jiao-tong classe les universités selon 52 matières différentes (sciences naturelles, sciences sociales, sciences de l’ingénieur, sciences de la vie et sciences médicales). Les lettres et la philosophie, matières françaises de prédilection, sont absentes. 

Si les chercheurs du groupe derrière ce classement présentent leur méthodologie comme la plus fiable possible, elle n’est pas adaptée pour mesurer la qualité de l’enseignement français. Leurs critères reposent entre autres sur le nombre de prix Nobel et de médailles Fields chez les étudiants et le nombre d’articles publiés dans les journaux de nature et de science. Avec un budget de cinq milliards de dollars et un patrimoine financier de 47 milliards de dollars, l’Université d’Harvard fonctionne à une autre échelle que les universités françaises. En 2018, elle comptait 36 000 étudiants : c’est l’équivalent de 25% de l’effectif d’étudiants poursuivants des études d’ingénieur en France !

D’autres classements existent mais sont moins médiatisés. Le classement QS et le Times Higher Education sont souvent plus proches des classements nationaux. Ils restent cependant inadaptés à l’échelle mondiale car les universités sont rarement aussi grandes que les chinoises, les américaines ou les britanniques. 
Pour devenir plus compétitif, des universités se réunissent entre elles. Paris Sciences & Lettres (PSL), créée en 2010, a permis à la France de côtoyer les meilleures places dans les classements des années précédentes. Elle réunit de nombreux établissements comme l’ENS, Paris-Dauphine, l’Institut Curie, l’ESCPI, Chimie ParisTech ou l’Ecole nationale supérieure des beaux-arts. PSL a fait un progrès spectaculaire dans les classements ces dernières années et figure désormais à la première place des établissements français.
 
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Ecole Normale Supérieure (membre de PSL) au début du XXème siècle.
© E. Le Deley

La réalité est que les universités européennes sont souvent bien meilleures que le classement Shanghaï ne le laisse croire. En raisonnant par étudiant, l’ENS est une fabrique à prix Nobel. Elle domine le classement avec 2 fois plus de prix Nobel par étudiant que la California Institute of Technology (2ème) et 4 fois plus qu’Harvard (3ème). 

L’honneur francophone est donc sauf. Ouf !