Barack Obama et Xi Jinping ont conclu à Pékin un accord «historique» sur la réduction des émissions de CO2. Le signal est encourageant dans l’optique de la conférence de Paris en 2015. En 2009 à Copenhague, la Chine et les Etats-Unis avaient été les grands responsables de l’échec du sommet climatique
Barak Obama a salué un «accord historique» avec la Chine sur la question du climat.
(AFP)
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Un retournement majeur
Elles crachent toutes deux quelque 45% des émissions mondiales de CO2 dans l’atmosphère. Mercredi à Pékin, les deux plus grandes économies de la planète ont pris le monde de court en annonçant un accord sur le climat que Barack Obama a d’emblée qualifié d’«historique». Le président américain et son homologue chinois Xi Jinping émettent un signal politique fort peu avant le sommet préparatoire de Lima dans la perspective de la conférence sur le climat de Paris en décembre 2015. L’accord survient quelques semaines après que l’Union européenne a annoncé un plan de réduction des émissions de CO2 de 40% d’ici à 2030 par rapport à leur niveau de 1990.
Le retournement sino-américain est majeur. En 2009 à Copenhague, la Chine et les Etats-Unis furent les grands responsables de l’échec du sommet climatique. Alors que Washington s’était longtemps réfugié derrière le fait qu’il n’agirait que si son grand rival économique chinois en faisait de même, Pékin insistait sur le fait qu’en tant que pays émergent, ce n’était pas à la Chine de faire le premier pas. Pendant des décennies, Washington a traîné les pieds, refusant de signer le seul traité climatique contraignant existant, le Protocole de Kyoto de 1997. Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon en est convaincu: «C’est une importante contribution au nouvel accord sur le climat qui doit être signé l’an prochain à Paris» pour tenter de fixer des plafonds d’émissions à partir de 2020.
Pékin entend fixer un pic d’émissions de gaz à effet de serre pour 2030 ou plus tôt s’il y parvient. Il prévoit aussi d’augmenter à 20% la proportion des énergies renouvelables dans le bilan énergétique total. L’objectif est d’autant plus impressionnant que la Chine achève une centrale à charbon tous les dix jours. Elle ambitionne ainsi d’ajouter entre 800 et 1000 gigawatts d’énergies non fossiles d’ici à 2030 en construisant de nouvelles centrales nucléaires, des parcs éoliens et solaires. Cela correspond à la quasi-totalité de l’énergie produite aujourd’hui par les centrales à charbon chinoises ou à l’équivalent du total de la capacité de production d’électricité aux Etats-Unis.
Confronté à une pollution atmosphérique sans précédent dans ses grandes métropoles qui aurait provoqué 1,2 million de décès prématurés en 2010, le pouvoir chinois a déjà pris les devants, devenant le premier investisseur mondial dans le renouvelable. Il a mis en place à titre expérimental des bourses de carbone dans cinq provinces et huit villes. L’objectif de 2030 a été calculé en vertu d’un modèle prévoyant un taux de croissance de l’économie chinoise se situant entre 4 et 5% par an.
Les Etats-Unis promettent de leur côté de réduire de 26 à 28% les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2025 par rapport à leur niveau de 2005. Pour atteindre leur objectif, ils devront doubler la vitesse de réduction des émissions de dioxyde de carbone. Pour Barack Obama, l’accord conclu avec Xi Jinping répond à sa volonté de concrétiser un plan d’action pour le climat. Ce printemps, il a déjà annoncé un programme draconien de réduction des émissions de CO2 des centrales à charbon. Usant de son pouvoir exécutif, il a mandaté l’Agence fédérale de protection de l’environnement (EPA) pour mettre en œuvre ce qui a été décrit outre-Atlantique comme les mesures les plus radicales prises jusqu’ici en la matière.
L’accord sino-américain n’est pas arrivé par hasard. Le président démocrate a multiplié les efforts diplomatiques auprès de la Chine. Il a dépêché le secrétaire d’Etat John Kerry à Pékin en février, puis s’est fendu d’une lettre adressée ce printemps au président chinois avant de rencontrer le vice-premier ministre Zhang Gaoli, en charge des questions environnementales, à l’ONU à New York en septembre. C’est finalement le conseiller de Barack Obama pour les questions climatiques, John Podesta, qui s’est rendu dans la capitale chinoise pour finaliser l’accord.
L’accord Obama-Xi redonne au président américain des couleurs après la cuisante défaite des élections de mi-mandat. Mais il suscite déjà de virulentes réactions de la part des républicains, à l’image du président de la Chambre des représentants, John Boehner: «Cette annonce est un nouveau signal montrant que le président a l’intention de poursuivre sa politique destructrice d’emplois.» Le républicain fustige la croisade de Barack Obama en faveur des énergies renouvelables. Cette posture pourrait toutefois produire l’effet d’un boomerang. Confrontés aux conséquences du réchauffement climatique aux Etats-Unis, une majorité d’Américains jugent désormais prioritaire d’agir en faveur du climat.