Fil d'Ariane
Sept ans après la COP 21, les constats sont de plus en plus alarmants. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur le climat publie chaque année un rapport plus inquiétant que celui de l’année précédente. Par ailleurs, l’ONU a publié deux rapports les 26 et 27 octobre 2022. Ils indiquent qu’on se dirige vers un scénario "catastrophique" de 2,5°C à la fin du siècle. Selon les Nations Unies, les engagements des pays signataires de l'accord de Paris sont encore "très loin" de ce qu'il faudrait pour espérer tenir les objectifs de lutte contre le réchauffement climatique.
Lors de la dernière conférence mondiale sur le climat, la COP26 tenue il y a un an à Glasgow, les pays avaient pourtant été appelés à rehausser chaque année leurs "contributions déterminées au niveau national" (CDN), au lieu de tous les cinq ans comme le prévoyait l'accord signé en 2015.
Mais au 23 septembre, à la date limite de leur prise en compte avant la nouvelle conférence qui se tiendra du 6 au 18 novembre dans la ville égyptienne de Charm el-Cheikh, seuls 24 pays avaient soumis une CDN nouvelle ou renforcée. Un chiffre "décevant" reconnaît le patron de l'ONU Climat, Simon Stiell.
"Il n'existe pas de trajectoire crédible pour atteindre 1,5°C" seulement de réchauffement de la Terre et il est urgent de le dire clairement au monde, alertent plus d'un millier d'universitaires internationaux dans une lettre ouverte publiée le 27 octobre par le collectif Scientist Rebellion, un groupe international de scientifiques militant pour la décroissance lié au groupe militant Extinction Rebellion. Les scientifiques dénoncent que la trajectoire de l’Accord de Paris, selon eux plus viable, soit encore défendue. Ils réclament, in fine, que "les trois piliers de la politique climatique - atténuation, adaptation et compensation - soient efficaces". Selon l'ONU, le réchauffement de l'ensemble de la Terre pourrait, si rien n'est fait, atteindre +2,7 degrés à la fin du siècle.
Cela représente une hausse jusqu'à 50% plus élevée que les précédentes prévisions.Aurélien Ribes, climatologue au CNRM
En France, une étude publiée par le Centre national de recherche météorologique (CNRM) montre que le changement climatique pourrait être pire que prévu. Les températures pourraient augmenter en 2100 de 3,8 degrés dans le pays, par rapport au début du XXe siècle. Cela est bien au-dessus de la moyenne mondiale, si les émissions de gaz à effet de serre ne baissent pas drastiquement. "Cela représente une hausse jusqu'à 50% plus élevée que les précédentes prévisions", indique l'un des auteurs de l'étude, le climatologue Aurélien Ribes.
Pour arriver à ces données concernant la France, les chercheurs du CNRS, du CNRM, et du Centre européen de recherche et de formation avancée en calcul scientifique (Cerfacs) se sont basés sur les données récoltées depuis 1899 par une trentaine de stations météorologiques réparties en France. Ils les ont utilisées pour calculer le réchauffement actuel et futur, à partir de différents scénarios, du plus optimiste, celui où l'on atteint la neutralité carbone en 2050 après d'importants efforts au niveau international, au plus pessimiste, où les émissions continuent de grimper.
Le mois d’octobre 2022 est le mois le plus chaud jamais enregistré en Europe. La France a été touchée par une vague de chaleur tardive sur la seconde moitié du mois, avec des températures pouvant atteindre jusqu’à 30°C par endroits. Interrogée par le quotidien français Le Monde, la climatologue Christine Berne considère qu’il "y a clairement un emballement cette année." Elle note aussi qu’à "l’exception d’une petite période en septembre, on assiste à des mois particulièrement chauds non-stop depuis mai." Selon Météo France, octobre 2022 est le mois le plus chaud jamais enregistré en France.
Ces phénomènes d'érosion sont clairement le résultat du changement climatique.Ian Fry, rapporteur spécial de l'ONU sur le changement climatique
Ailleurs dans le monde, les phénomènes météorologiques extrêmes deviennent de plus en plus importants. Le Bangladesh a connu cette année ses pires inondations en près de vingt ans. Elles ont fait plus de 100 morts dans le nord du pays et isolé sept millions d'autres en coupant les principaux axes de circulation. Le Centre pour les services d'information sur l'environnement et la géographie (CEGIS), un organe public estime qu'environ 1 800 hectares de terres seront érodés par les rivières au Bangladesh cette année et que les maisons d'au moins 10 000 personnes disparaîtront. "Ces phénomènes d'érosion sont clairement le résultat du changement climatique", souligne Ian Fry, rapporteur spécial des Nations unies sur le changement climatique, lors d'une visite sur place en septembre.
Ces phénomènes extrêmes sont chaque année de plus en plus violents et fréquents. En 2021, le GIEC établissait un lien entre ces événements et l’activité humaine. Selon leur rapport cette année-là, pour chaque degré d’augmentation de la température globale, les précipitations lors des tempêtes et des orages augmentent de 7%.