Le projet d’accord sur le climat vient d’être adopté par les 195 pays présents lors de la COP21 au Bourget, près de Paris. Cet accord historique est ambitieux et contraignant. Il prévoit notamment de maintenir le réchauffement climatique « en deçà de 2°C » et « si possible à 1,5°C » mais également une aide financière de 100 milliards de dollars aux pays pauvres, considérée comme « plancher ». Détails et explications.
Ce n’était pas gagné… et pourtant ils l’ont fait ! Les négociateurs des 195 pays présents au Bourget du 30 novembre au 11 décembre 2015 viennent de ratifier l’accord sur le climat.
"L'accord de Paris pour le climat est adopté", a déclaré Laurent Fabius, président de la COP21, suscitant une longue salve d'applaudissements. En brandissant un marteau vert, il a déclaré :
"C'est un petit marteau mais il peut faire de grandes choses", puis il l'a abaissé sur le pupitre. Le texte final comporte 31 pages au lieu de 55 au début des négociations.
Dans une atmosphère euphorique, une ovation de plusieurs minutes a salué ce moment historique, six ans après le fiasco de la COP de Copenhague, qui avait échoué à sceller un tel accord, et après des années de négociations extrêmement ardues.
Nous pouvons rentrer à la maison pour mettre en oeuvre cet accord historique
Julie Bishop, ministre australienne des Affaires étrangères
Edna Molewa, ministre sud-africaine de l'Environnement dont le pays préside le groupe le plus important, le G77+Chine (134 pays), y a vu "un tournant vers un monde meilleur et plus sûr". "Nous pouvons rentrer à la maison pour mettre en oeuvre cet accord historique"", s'est réjoui, au nom des pays développés, la ministre australienne Julie Bishop.
"L'histoire jugera le résultat non pas sur la base de l'accord d'aujourd'hui, mais sur ce que nous allons faire à partir d'aujourd'hui", a tempéré Thoriq Ibrahim, ministre de l'Environnement des Maldives et président du groupe des Petits Etats insulaires.
"Il reste encore beaucoup de travail à accomplir", a abondé la chancelière allemande Angela Merkel, mais l'accord "est un signe d'espoir".
"Le problème n'est pas résolu", mais "l'accord de Paris (...) établit le cadre durable dont le monde a besoin pour résoudre la crise climatique", selon le président américain Barack Obama.
Un peu plus tôt dans la journée, Laurent Fabius, ému avait déclaré. "Nous sommes presque au bout du chemin et sans doute au début d'un autre", a-t-il déclaré. Ce projet d'accord est "juste, durable, dynamique, équilibré et juridiquement contraignant" et "s'il est adopté, ce sera un tournant historique".
Les points essentiels de l’accord
L'emballement du mercure menace la production agricole, les ressources marines et les réserves en eau de nombreuses régions, et la montée des océans met en danger des Etats insulaires, comme les îles Kiribati, et des communautés côtières, au Bangladesh par exemple.
Le pacte, qui entrera en vigueur en 2020, doit permettre de réorienter l'économie mondiale vers un modèle à bas carbone. Pareille révolution implique un abandon progressif des ressources fossiles (charbon, pétrole, gaz), qui dominent largement la production énergétique mondiale, un essor des énergies renouvelables, d'immenses économies d'énergies ou encore une protection accrue des forêts.
Limitation de température
Le texte confirme l’objectif principal de contenir le réchauffement climatique « bien en-deça de 2°C ». Mais il va encore plus loin car il demande à ce que les parties s’efforcent de limiter cette augmentation de la température à 1,5°C. Un objectif « à long terme ambitieux mais nécessaire », a déclaré Laurent Fabius lors de l’assemblée plénière. Les pays insulaires notamment qui sont menacés par l’élévation du niveau de la mer sont en danger à partir de +1,5°C.
Différenciation entre pays riches et pays pauvres
Ce principe de « responsabilité commune mais différenciée » des Etats face aux changements climatiques est inscrit dans la Convention onusienne sur le climat de 1992. Cette notion est reconnue par l’accord et éparpillée dans plusieurs articles. Il acte que « les pays développés doivent continuer à prendre la tête » des efforts de réduction d’émissions et que les pays en développement, eux, doivent « continuer à renforcer leurs efforts d’atténuation (...) à la lumière des différents contextes nationaux », formulation qui prend donc en compte leur niveau de développement. L’accord souligne également qu’« un soutien doit être apporté aux pays en développement » par les nations économiquement plus avancées.
Financement
100 milliards de dollars ((91 milliards d'euros environ) par an sont prévus d’ici 2020 par les pays riches, « en tenant compte des besoins et des priorités des pays en développement ». Ces 100 milliards constituent un « niveau plancher » pour l’après 2020. Un nouvel objectif chiffré devra être défini d’ici 2025.
Pertes et dommages
Liée à celle des financements, la question des pertes et dommages est très importantes pour les pays vulnérables, premières victimes des effets du réchauffement climatique. Le texte « reconnaît la nécessité d’éviter et de réduire au minimum les pertes et préjudices liés aux effets néfastes des changements climatiques, notamment les phénomènes météorologiques extrêmes et les phénomènes qui se manifestent lentement, et d’y remédier, ainsi que le rôle joué par le développement durable dans la réduction du risque de pertes et préjudices ».
Cependant, il est bien précisé que l’article 8 de l’accord « ne peut donner lieu ni servir de fondement à aucune responsabilité ni indemnisation » des pays du Nord.
Contributions des pays
Sur les 195 pays, 186 ont remis leurs contributions, c’est-à-dire leur promesses de réduction de gaz à effet de serre d’ici 2025-2030. Selon l’accord, ces contributions seront révisées « tous les 5 ans », théoriquement, à partir de 2025. Mais les ONG estiment que ce serait trop tard.
Transparence
Le texte prévoit de renforcer la confiance mutuelle des pays grâce à un cadre de transparence renforcée, adapté en fonction des capacités de chacun.
Possibilité de retrait
Pour entrer en vigueur en 2020, l’accord devra avoir été ratifié, accepté ou approuvé par au moins cinquante-cinq pays représentant au moins 55 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Mais, « à l’expiration d’un délai de trois ans à partir de l’entrée en vigueur de l’accord », tout pays pourra s’en retirer, à condition qu’il le signale via une « notification ».