Coronavirus en Belgique : la Première ministre belge révélée par la crise

Quasi inconnue il y a six mois, elle est devenue "super-Sophie" pour certains. La Première ministre belge Sophie Wilmès s'est révélée à la faveur de la crise du coronavirus, même si une autre partie délicate l'attend avec le déconfinement à partir de lundi 4 mai.

Image
Sophie Wilmès
La Première ministre belge, Sophie Wilmès. 
©Source internet
Partager3 minutes de lecture

"Franche", "calme", "professionnelle", sachant montrer de "l'empathie": médias et experts de la politique ont usé des mêmes qualificatifs pour décrire la dirigeante libérale francophone de 45 ans face à une situation exceptionnelle.

"C'est clair que cette crise l'a fait changer complètement de stature", dit à l'AFP Vincent Laborderie, politologue de l'Université catholique de Louvain.

"Neuve dans le paysage", elle a un aspect "non-clivant" qui a plu aux Belges, et "le côté féminin a joué aussi", ajoute cet expert, alors que la Belgique a été durement éprouvée par la pandémie (plus de 7.700 morts recensés vendredi).

Pour cette fille d'économiste diplômée d'une école de communication, tout s'est accéléré en 2014. Alors échevine (adjointe) dans une commune de taille moyenne de la périphérie bruxelloise, elle a l'opportunité d'être première suppléante sur une liste de son parti pour les élections législatives.

Elle devient députée grâce à la nomination comme ministre du chef de file des libéraux, Didier Reynders (aujourd'hui commissaire européen). Puis, elle entre au gouvernement en 2015 avec le portefeuille du Budget, un poste où son sérieux et sa rigueur séduisent le Premier ministre de l'époque, Charles Michel, autre figure des libéraux francophones.

Quand ce dernier anticipe fin octobre 2019 son départ pour la présidence du Conseil européen, Sophie Wilmès lui succède comme Premier ministre. Cette mère de quatre enfants est alors la première femme à accéder à ce poste en Belgique. Certes, à la tête d'un gouvernement dit "en affaires courantes", sans majorité au Parlement.

"Il ne faut pas l'oublier, elle est un peu arrivée là par hasard", note Dave Sinardet, professeur de sciences politiques à l'Université libre néerlandophone de Bruxelles (VUB).

Et si une sorte d'union nationale s'est constituée fin mars pour gérer la crise (un vote au Parlement a accordé des "pouvoirs spéciaux" à sa coalition minoritaire), cela ne devrait pas durer au-delà de trois mois, de l'avis des experts.

"Déconfinement du jeu politique"

La dernière conférence de presse de Mme Wilmès, annonçant le 24 avril un assouplissement très progressif des mesures de confinement, a réveillé les critiques d'opposants en sourdine depuis un mois.

Socialistes et écologistes francophones lui ont reproché de privilégier la réouverture des commerces à compter du 11 mai à la perspective de renouer les liens familiaux en cercle restreint, repoussée au 18 mai.

Opposer "l'économie à l'humain", c'est être "complètement à côté de la plaque", a rétorqué, cinglante, la Première ministre, rappelant que ces partis de gauche étaient associés aux exécutifs régionaux de Bruxelles et de Wallonie (sud) ayant soutenu les décisions annoncées.

Après la trêve, c'est "le retour à la normale", "le déconfinement du jeu politique", ironise M. Laborderie, anticipant de nouvelles législatives, "probablement à l'automne".

Depuis décembre 2018, quand les nationalistes flamands de la N-A ont lâché la coalition de centre-droit au pouvoir, la Belgique vit sans gouvernement de plein exercice. Une situation que le vote des "pouvoirs spéciaux" le 27 mars n'a fait que mettre en parenthèses provisoirement.

Quel avenir pour Mme Wilmès?

Fin mars, le quotidien Le Soir saluait l'"irrésistible ascension" de cette femme longiligne (plus de 1,80 m) qu'il surnommait "Super-Sophie".

Pour M. Sinardet, elle est incontestablement devenue populaire, en tout cas chez les francophones, et sera "probablement vice-Première ministre" du prochain gouvernement puisque son parti (le MR, Mouvement réformateur), situé au centre de l'échiquier, devrait en demeurer un des pivots.

Elle ne s'expose pas, cultive une certaine discrétion dans les médias, mais "cela peut aussi être une stratégie", juge le politologue flamand, "le manque d'ambition affichée l'a quand même amené là où elle est aujourd'hui".