Depuis le 30 mars, la quatorzaine stricte est entrée en vigueur, "conformément aux recommandations du conseil scientifique", explique la ministre dans une vidéo publiée mardi 12 mai sur son compte Facebook.
Cette mesure "s’est avérée essentielle" dans la lutte contre l'épidémie en Outre-mer, dit-elle.
Dans sa décision du 11 mai 2020, le Conseil constitutionnel a "confirmé que le principe des quatorzaines est justifié pour protéger nos territoires", explique Annick Girardin, mais il a aussi "considéré que ces quatorzaines devaient nécessairement s'accompagner des garanties qui sont désormais prévues par la loi".
Autrement dit, ce qui était logique en période de confinement, ne l'est plus nécessairement avec la période de déconfinement qui s'est ouverte depuis le lundi 11 mai 2020.
"Le gouvernement prendra donc dans les prochains jours les décrets permettant de mettre en oeuvre les mesures de quarantaine prévues par la loi du 12 mai", ajoute la ministre.
Dans les faits, le Conseil constitutionnel a validé la loi prorogeant jusqu'au 10 juillet l'état d'urgence sanitaire et organisant le déconfinement. Mais concernant le fait de confiner des passagers contre leur gré dans un lieu qu'ils n'ont pas choisi, l'instance a jugé que ces quatorzaines très appliquées en Outre-mer « constituaient des mesures privatives de liberté, les mesures consistant en un isolement complet, lequel implique une interdiction de toute sortie ». Une mesure contraire à la Constitution de 1958.
Et d'ajouter qu'elles ne peuvent pas imposer à l’intéressé « de demeurer à son domicile ou dans son lieu d’hébergement pendant une plage horaire de plus de 12 heures par jour ».
Ces mesures, considérées comme anticonstitutionnelles, ont déjà entraîné quelques modifications sur le terrain. Les préfectures locales ont édité ou mis en ligne des brochures explicatives (voir photo). Désormais, la quatorzaine n'est plus obligatoirement effectuée dans une chambre d'hôtel réquisitionnée. Elle peut être observée à domicile.
Mais il faut que ce domicile soit suffisament équipé pour permettre cet isolement. Il faut aussi que ce choix ne représente pas un danger sanitaire pour qui ce soit dans le foyer (absence d'eau ou de chambre privative, sanitaires collectifs, par exemple). Un soulagement pour les locaux qui rentrent chez eux, même s'ils devront s'engager, par ailleurs, à rester effectivement confinés et à répondre aux appels téléphoniques des autorités comme l'Agence régionale de Santé (ARS). Une ordonnance leur est, de plus, délivrée pour effectuer deux tests de dépistage virologiques. L'un à leur arrivée sur le territoire. L'autre, après une semaine de quatorzaine. Ce nouveau dispositif d'encadrement de la quatorzaine a été appliqué dès mardi 12 mai aux nouveaux arrivants en Guadeloupe et en Martinique mais aussi à ceux et celles qui étaient en quatorzaine dans des hôtels et qui ont pu les poursuivre immédiatement à leur domicile.
À la Réunion, la préfecture a souligné que les arrivants "avaient fait l’objet d’un dépistage du Covid-19 et, dans l’attente de leurs résultats, ils avaient été été invités à rester dans le centre".
Plusieurs voyageurs ont opposé une fin de non-recevoir à la proposition préfectorale et ont préféré s'engager à respecter un strict isolement pendant 14 jours, pour regagner immédiatement leur domicile.
Dans ces conditions, les nouveaux décrets ministériels qui doivent préciser ou affiner les modalités de cette nouvelle quatorzaine sont évidemment très attendus.
Le conseil scientifique a pour cela, livré ses recommandations au gouvernement. Il distingue clairement trois groupes de territoires en fonction du niveau de leur situation épidémique. Un groupe où l'épidémie est encore en phase croissante. Un autre, où l'épidémie est en régression. Un troisième, où il n'y a pas ou plus d'épidémie.
Pour la Guyane, la Martinique, la Guadeloupe, Saint-Martin, La Réunion et la Polynésie française, les scientifiques jugent que l'épidémie est en régression avec, selon eux, une possible "disparition des cas de Covid-19 dans les semaines ou mois à venir".
Mais ils recommandent "de n’accroître la fréquence des transports de voyageurs qu’à partir du mois de juin, en privilégiant les rapprochements familiaux et les déplacements professionnels".
Pour l'heure, ces déplacements en Outre-mer sont limités à deux vols maximum par semaine selon les territoires. Il faut, par ailleurs, un motif "impérieux" (professionel ou personnel) pour justifier ce déplacement. Si les vols reprennent plus régulièrement au mois de juin, la quatorzaine pourra-t-elle encore s'appliquer avec un flot bien plus important de passagers ? Pas sûr.
Oui, sous réserve de l’évolution de l’épidémie et de possibles restrictions localisées, les Français pourront partir en vacances en France en juillet et en août. pic.twitter.com/d8Wi2BcXLF
— Edouard Philippe (@EPhilippePM) May 14, 2020
Ce qui est sûr, c'est que les Français pourront "sous réserve de l'évolution de l'épidémie, partir en vacances en France (Outre-mer compris), en juillet et en août" selon le Premier ministre Édouard Philippe, qui l'a précisé ce jeudi 14 mai 2020, en présentant à l'Hôtel de Matignon, son plan pour le tourisme.
Concernant Wallis et Futuna, la Nouvelle-Calédonie, Saint-Pierre et Miquelon et Saint-Barthélemy, là où l'épidémie a quasiment disparu, le conseil scientifique parle de territoires "actuellement indemnes d’épidémie". Il recommande néanmoins de "poursuivre, pour les semaines à venir, l'application de mesures strictes de régulation du flux des voyageurs, en fonction des capacités locales d’organisation de quarantaines supervisées et de dépistages systématiques".
L'île de Mayotte, n'en est pas là. Avec plus de 1000 cas recensés, la dernière collectivité ultramarine à avoir intégrer pleinement en 2014 le giron de la République est aussi le territoire français, le moins armé en terme de structures face à cette crise sanitaire.
Le conseil scientifique, préconise "le maintien du confinement jusqu'au déclin du pic épidémique », car Mayotte est le seul territoire où l'épidémie est encore en phase croissante. Selon l’ARS, le pic épidémique est attendu sur place, entre le 20 et le 30 mai. Le conseil scientifique insiste également sur "la limitation stricte du nombre d'arrivants". C’est déjà le cas à Mayotte puisque l’aéroport est fermé au trafic aérien depuis le 27 mars par décision préfectorale.