La Coupe du Monde 2018 de football débute ce jeudi à Moscou sous l'oeil de Vladimir Poutine. Une façon pour lui de redorer l'image de son pays ? L'affiche du coup d'envoi : Russie -Arabie Saoudite a déjà une saveur diplomatique.
"Welcome to Russia". Moins d'une semaine avant le début de la Coupe du Monde de football 2018 dont son pays est l'hôte, le président russe a adressé ses meilleures salutations aux équipes et aux supporters déjà arrivés pour l'évènement ou en partance. Des salutations et des encouragements que Vladimir Poutine s'apprête à prononcer à nouveau dans quelques heures, alors que démarrera sous ses yeux, dans le stade Loujniki rénové, le match d'ouverture de la Coupe du Monde 2018 : Russie-Arabie Saoudite.
Certes, l'équipe nationale russe (la Sbornaya) n'est pas réputée pour ses faits d'armes, mais rencontrer les Saoudiens -l'équipe la plus mal classée des 32 qualifiées et 67ème au classement Fifa - comme premiers adversaires semble être un soulagement. D'ailleurs tout le groupe A du pays organisateur est du même tonneau.
Son statut de tête de série fait que sa poule est l'une des moins relevées du tournoi. Seule l'Uruguay apparaît plus solide dans un groupe composé également de l'Egypte, outre l'Arabie Saoudite.
Si les statistiques concordent une nouvelle fois cette année, la Russie pourrait s'en tirer à bon compte et poursuivre sa route. En vingt Coupes du Monde, seule l'Afrique du Sud avait échoué à passer la phase de poules.
La Sbornaya sous pression
La pression est donc maximum pour l'équipe russe que Vladimir Poutine va surveiller de près. Car même si le tableau est favorable, le niveau de la sélection, lui, interroge. En deux ans de matches amicaux de préparation, le palmarès laisse dubitatif : élimination dès le premier tour de la Coupe des confédérations, défaites contre le Brésil et la France. Le meilleur score ayant été le nul face à l'Espagne (3-3). Pas de quoi pavoiser.
Mais Achille, le chat blanc et sourd désigné pronostiqueur officiel de ce Mondial-2018, s'est montré rassurant pour l'équipe russe. L'animal, qui va tenter de reproduire le succès de
"Paul, le poulpe" a délivré ce mercredi 13 juin son premier pronostic : la Russie remportera le match d'ouverture contre l'Arabie saoudite. Ouf !
Quoiqu'il en soit, la Russie jouera sa Coupe du Monde en dehors des terrains. Elle sera tout d'abord scrutée du point de vue du dopage et de la transparence. La Russie doit ainsi accepter l'intégralité de la feuille de route de l'Agence mondiale antidopage (AMA) avant de pouvoir espérer y être réadmise, ont annoncé ce mercredi les Organisations mondiales antidopage (Onad).
"A la veille de la Coupe du monde en Russie, un pays non conforme au Code de l'AMA, nous réitérons notre position inflexible que l'application de la feuille de route de l'AMA dans son intégralité est une condition à la réintégration de la Russie", expliquent les Onad dans un communiqué.
"Nous sommes prêts"
En mai, l'AMA avait jugé que l'agence nationale antidopage Rusada avait accompli de nombreux progrès dans sa gouvernance mais que deux conditions n'étaient toujours pas remplies : d'une part, l'accès pour ses enquêteurs au laboratoire antidopage de Moscou ; d'autre part, une reconnaissance claire par les autorités russes des conclusions du rapport McLaren, qui a établi en 2016 l'existence d'un système de dopage institutionnel entre 2011 et 2015. Un système qui avait touché tous les sports, des centaines d'athlètes et a impliqué la complicité, entre autres, du ministère des Sports et des services secrets (FSB). Du coup, Rusada reste à ce jour suspendue de l'AMA.
En tout cas, l'exécutif a été apuré à la tête de l'organisation de l'évènement. Après la chute de son mentor, Vitali Moutko, au cœur de l’affaire de dopage d’Etat, le jeune et discret Alexeï Sorokine oeuvre à redorer le blason russe.
"Nous sommes prêts, la Russie est prête", affirme ce polyglotte bien mis de 46 ans, aux journalistes du Monde venus l'interroger. Les sujets sensibles sont nombreux : l’annexion de la Crimée, le soutien aux séparatistes prorusses dans l’est de l’Ukraine ou encore la récente
affaire Skripal, du nom d’un ex-agent double accusé par Londres d'avoir été empoisonné par la Russie le 4 mars 2018 en Angleterre. Laquelle affaire avait conduit à des expulsions de diplomates en Occident et en Russie.
Un Mondial à 60 milliards d'euros
La Grande-Bretagne s'est abstenue d'ailleurs d'envoyer un représentant officiel pour le match d'ouverture du Mondial. "
Si certains ont décidé de ne pas soutenir leur équipe, c’est leur problème" a répliqué Alexeï Sorokine, dans le
Monde.
Si le Russie-Arabie Saoudite à venir n'a rien de très alléchant, l'écrin qui l'abrite l'est beaucoup plus. Le stade Loujniki s'est refait une beauté à prix d'or pour accueillir les 32 équipes. Le Mondial-2018 est, de fait, le plus cher de l’Histoire. Son coût total est évalué à près de 70 milliards de dollars (près de 60 millards d’euros). Soit 20 milliards de plus que le coût des J.O. de Sotchi, considérés les plus chers de l'histoire de l'Olympisme ! Le coût total des travaux à Sotchi s'était élevé à 50 milliards de dollars (37 milliards d’euros) en 2014. De quoi faire ressurgir par ces surcoûts, des soupçons de corruption. Est-ce le cas à nouveau ?
Quatre ans après le sacre de l'Allemagne au Brésil, la Coupe du monde est remise en jeu dans un pays sous observation, aux nombreux défis sécuritaires et à l'image brouillée en Occident. Reste à voir si la diplomatie du ballon rond fonctionne en Russie.
Dans quatre ans, c'est au Qatar que se déroulera la prochaine compétition. Décidemment une Coupe du Monde de plus en plus politique.
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