Il n'est pas question pour Enrico Letta d'une relance massive par injection de liquidités dans l'économie, ou de nationalisations comme l'a fait Barack Obama aux Etats-Unis, mais plutôt d'une pause dans l'austérité. L'argent qui ne serait pas économisé permettrait ainsi la relance, en partie basée sur une
politique de la demande (baisse des impôts et investissements publics), au lieu des habituelles
politiques de l'offre (baisse des charges des entreprises et des cotisations sociales, réforme du travail). Mais en Italie, rien n'est simple, et Alberto Toscano de rapeller que "c'est un gouvernement de coalition, et il y a obligation pour Letta de prendre en compte les deux écoles de pensées, celle de Berlusconi, à droite, basée sur la seule baisse des impôts et charges des entreprises, et celle de la gauche, fondée sur les investissements publics. C'est donc là que se situera la relance de Letta, avec une demande de faire une pause dans l'austérité et d'allonger les délais pour atteindre les 3% de déficit". La conférence de presse commune avec François Hollande d'hier apporte quelques précisions par la voix de Letta qui a déclaré que "
l'union bancaire, (…) elle est là, on l'a décidée, il faut la faire, il ne faut pas perdre du temps sur cela (…) C'est le premier grand point de solution, de succès [...]
entre les quatre [avec]
l'union économique, fiscale et politique." Les vœux d'instaurer des principes de supervision des banques, de garantie des dépôts ont été renouvelés par François Hollande, mais quant à une relance claire de sa part, il faudra semble-t-il, attendre un peu. Pourtant, l'idée centrale de stimuler la croissance (absente aujourd'hui) avec des politiques de relance, faire une pause dans la rigueur et reprendre ensuite la consolidation budgétaire plus facilement dans une économie dynamisée, est portée par de nombreux économistes de tous bords. Ce que reprend visiblement à son compte Enrico Letta. L'aile gauche du Parti socialiste français a d'ailleurs commencé à ouvrir le débat sur cette voie. Ne manque peut-être que l'alliance entre les trois poids lourds de l'économie européenne du Sud dont parle Alberto Toscano ? Mais pour le journaliste, "si la France ne fait pas les efforts de réformes structurelles qu'a fait l'Italie, il y a peu de chance que cela fonctionne". Ce que le chef de l'Etat français semble confirmer, tout en restant sibyllin, avec cette déclaration : "
Quant à la trajectoire budgétaire",
elle doit être adaptée à ce qu'est la réalité de la croissance, et pour mieux montrer que nous ne cédons en rien par rapport à nos obligations, nous maîtrisons la dépense publique, et donc c'est là-dessus
que nous nous engagerons et c'est la discussion qui est en cours avec la Commission européenne, les résultats seront connus à l'occasion du sommet du mois de juin". L'axe franco-italien pour une relance économique n'a pas l'air de figurer encore à l'agenda élyséen. A moins que Letta ne convainque d'autres partenaires de le suivre, ce qui pourrait obliger François Hollande, pressé par la gauche du PS et l'opinion publique, à changer de cap ?