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Commentaire de Pascale Achard
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Cuba : coup de froid diplomatique avec Washington

Une vingtaine de ressortissants américains victimes de mystérieuses attaques à Cuba. Réaction immédiate de Washington, qui expulse 15 diplomates cubains. La Havane s'indigne. L'enquête est en cours...

C'est une affaire digne d'un film d'espionnage. Entre fin 2016 et août dernier, 22 diplomates américains ont subi des lésions importantes en raison d'attaques qualifiées d'"acoustiques" : pertes d'audition, vertiges, maux de tête et problèmes cognitifs, d'équilibre ou de sommeil. Certains ont dû être rapatriés pour être soignés aux Etats-Unis.

Une décision "politique"

Ce mardi 3 octobre, ces mystérieuses "attaques" ont viré à la crise diplomatique, avec l'expulsion de quinze employés de l'ambassade de Cuba à Washington. Une mesure immédiatement dénoncée par La Havane : le ministre des Affaires étrangères Bruno Rodriguez qualifie cette décision d'"injustifiée (...), infondée et inacceptable, comme le prétexte avancé pour la justifier". C'est une décision "éminemment politique", a-t-il dénoncé, appelant le gouvernement américain "à cesser de politiser ce sujet, ce qui peut provoquer une escalade non-souhaitée". 

Côté américain, le secrétaire d'Etat Rex Tillerson déclare : "Nous maintenons nos relations diplomatiques avec La Havane". Mais les "expulsions" ont été décidées "en raison de l'incapacité de Cuba à prendre les mesures appropriées pour protéger nos diplomates" et aussi pour "assurer l'équité" dans la présence diplomatique des deux pays.

Riposte en deux temps

L'enquête n'a pas encore permis d'identifier la cause, le modus operandi ni les auteurs de ces "attaques", que les autorités américaines se bornent à qualifier de "ciblées" et de "nature inconnue". Elles se sont déroulées, selon les Etats-Unis, dans des résidences diplomatiques ainsi que dans des hôtels fréquentés par des Américains.

Washington avait déjà discrètement expulsé deux diplomates cubains en mai, alors que cette affaire n'avait pas encore été révélée - elle ne l'a été qu'en août. Les Américains n'accusent pas les Cubains d'être directement derrière ces "attaques", mais les tiennent responsables de la sécurité de leurs diplomates à La Havane.

Vendredi 29 septembre, la riposte est passée à la vitesse supérieure : le département d'Etat américain a rappelé "plus de la moitié" du personnel de son ambassade à La Havane, a suspendu sine die l'octroi de visas de routine américains à Cuba et appelé tous les ressortissants américains à éviter de se rendre sur cette île très touristique des Caraïbes.

Des relations fragiles dans un climat hostile

Le climat était déjà tendu entre Washington et La Havane, dont les relations, rétablies en 2015 après un demi-siècle de rupture, sont encore fragiles. La situation s'est dégradée avec l'élection du républicain Donald Trump à la Maison Blanche, qui a durci le ton face à La Havane, portant un coup au rapprochement initié par son prédécesseur démocrate Barack Obama.

"L'ère de l'engagement constructif a été remplacée par une autre phase, dans laquelle le gouvernement cubain est dépeint comme hostile", explique Paul Webster Hare, professeur de relations internationales à l'Université de Boston, aux Etats-Unis, et ex-ambassadeur britannique à Cuba, rappelant que Donald Trump a qualifié devant l'ONU le régime cubain de "corrompu et déstabilisateur".