En mer Méditerranée, une expédition "Med" étudie les microplastiques. Invisibles à l'oeil nu, ils peuvent parcourir des kilomètres et transporter à travers les océans des bactéries et des virus. Reportage.
Larguer les amarres, prendre la barre, et laisser derrière soi la rade de Toulon, c’est le signal du départ pour cette expédition un peu spéciale. Direction la Camargue, avec un objectif : étudier les microplastiques, ceux que l'on ne voit pas à l'oeil nu... Mais qui n'ont plus de secret pour Tosca Ballerini, coordinatrice scientifique de l'expédition "Med".
"Le plastique est vraiment un nouveau moyen de dispersion très puissant. Je vous pose un exemple dans le Pacifique, en 2011 survient le tsunami au Japon. Six ans après, du plastique qui provenait du tsunami du Japon a été retrouvé aux Etats-Unis, avec à bord des organismes marins côtiers, qui sont endémiques du Japon. Il y avait des adultes et des petits, cela veut dire que pendant six ans ils ont aussi pu se reproduire. Donc ça c’est un type de dispersion impossible avec du bois, des algues, des feuilles, les plumes des oiseaux, les débris naturels qui se décomposent beaucoup plus vite", dit Tosca Ballerini.
Des plastiques porteurs de virus
Déchets devenus minuscules radeaux insubmersibles, les plastiques transportent tout type de passagers, y compris des bactéries et des virus. "Ces microorganismes parfois peuvent être aussi des pathogènes. Pour exemple, des études préalables ont trouvé sur des plastiques des bactéries et des virus qui peuvent amener des maladies gastro intestinales chez le poisson, nos collaborateurs ont trouvé des bactéries du même groupe qui amène le choléra chez l’homme", s'inquiète Tosca Ballerini.
C'est ce que confirme Alice Demacuvellerie, chercheuse à l'université de Mons :
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Sensibiliser les bénévoles
Face à ces dangers potentiels encore méconnus, l’expédition documente et sensibilise. Pour sortir la science du laboratoire, les chercheurs, tous bénévoles, invitent des volontaires à bord. Tosca et les autres scientifiques leur apprennent les techniques de prélèvements. A chaque filet, ses surprises. "L’année 2017, on avait trouvé dans le filet un film plastique de 2 mètres", s'insurge Tosca Ballerini.
Le jour de notre reportage malheureusement, impossible de mettre en pratique, les conditions météos qui ne sont pas réunies pour mettre le filet à l’eau. Après deux étés passés sur le bateau, Tosca a appris à connaître la mer.
"Pour nous c’est important de faire des prélèvements avec des conditions de mer stable, calme, comme ça, le vent va faire remuer tout ce qui se trouve à la surface, donc on risque de sous-estimer la quantité de fragments qui flotte à la surface, si on fait des prélèvements après des gros coups de vent", dit Tosca Ballerini.
Après un court arrêt, l'équipage repartira en mer. Les échantillons continuent leur voyage en direction de plusieurs laboratoires en Europe pour, à terme, livrer tous les secrets de la plastisphère en Méditerranée.