Fil d'Ariane
Il était dans l'ombre des Rafale, simple second rôle d'un déploiement en Asie du Sud-Est. Et voilà l’A400M, fleuron des avions de transport européen, projeté au cœur du dispositif d’aide humanitaire sur l’île sinistrée de Lombok, frappée par une série de tremblements de terre dévastateurs depuis la fin juillet. Héros malgré lui, au plus grand bonheur des militaires français.
Le 24 août dernier, le général de l'armée de l'air Patrick Chareix, commandant de la mission Pégase explique que l'ambassade et les militaires français ont reçu « une demande écrite du ministère indonésien qui nous demande si on peut utiliser notre avion pour transporter 35 tonnes d'aide humanitaire à Lombok ».La France, un immense territoire dans l'Indo-Pacifique
La France possède la deuxième plus grande Zone économique exclusive (ZEE) au monde, derrière les États-Unis. 11 millions de kilomètres carrés, dont 67% se trouvent dans le Pacifique et 26% dans l’Océan Indien. Mais ce territoire immense est quasiment impossible à quadriller en permanence, surtout avec des moyens limités : 2 frégates de surveillance, 1 bâtiment multi-missions et 2 patrouilleurs dans l’Océan Indien. Dans le Pacifique c’est à peine plus : 2 frégates de surveillance, 3 patrouilleurs, 2 bâtiments multi-missions et 5 avions de surveillance maritime.
Les menaces sont réelles dans la région: piraterie, terrorisme, pêche illégale, pollution, etc. Les ZEE sont devenus un enjeu économique majeur de par les ressources qu’elles abritent (halieutiques, hydrocarbures). Pour Céline Pajon chercheur au centre Asie de l'Institut français des relations internationales (IFRI) ces " intérêts économiques sont assez important pour la France dans la région et Paris cherche à développer des échanges dans la zone qui comprend des pays à forte croissance économique. "
Ces dernières années la région est de plus en plus en proie à des problématiques de sécurité très importante et une aggravation de l'environnement sécuritaire. " Cela à notamment avoir avec le problème nord-coréen. Si on estime que ces missiles nord-coréens peuvent éventuellement frapper les territoires européens, il y a aussi le risque que les armes non-conventionnelles produites par Pyongyang prolifèrent vers des pays plus proche du territoire métropolitain français, comme la Syrie ". Si cette menace fait figure d'épouvantail, elle n'est pas la seule qui préoccupe les chancelleries, on pense notamment au trafic de drogue et aux menaces terroristes en Indonésie ou aux Philippines.
Il y a toutes les routes maritimes qui courent de la Méditerranée jusqu'à l'Océan Indien et le Pacifique, ces routes sont devenues essentielles aujourd'hui pour la sécurité nationale que ce soit du point de vue économique ou stratégique.Céline Pajon, chercheur au centre Asie de l'IFRI
Mais c’est en mer de Chine que la situation apparaît la plus précaire, surtout entre la Chine et ses voisins. Pékin est parvenue à faire main basse sur la partie méridionale de cette mer enclavée. Elle y a construit des ilots artificiels et des bases militaires, niant de fait la souveraineté de ses voisins, Vietnam et Philippines en premier lieu, sur une partie de ces îles et de la zone. Pour le ministère des Affaires étrangères chinois, aucune critique n’est recevable sur la militarisation des îlots « ces îles de la mer de Chine méridionale font partie de notre territoire » affirme son porte-parole.
L’Asie du sud-est est un marché important pour la France, même s’il reste inférieur à ce que représente le Moyen-Orient avec l’Egypte et la péninsule arabe. Les pays asiatiques investissent de plus en plus dans les équipements de défense pour faire face à un contexte sécuritaire dégradé.
Avec l’exportation d’armements et d’équipements de défense, c’est aussi des liens politiques extrêmement forts qui se mettent en place.Céline Pajon, chercheur au centre Asie-Pacifique de l'IFRI
La France se positionne sur ce marché et à déjà réalisé de très gros coups ont été réalisés par l’industrie de l’armement : 40% de ses contrats concernant des sous-marins ont été signé dans la région, l’Inde a signé en 2005 un contrat pour 6 sous-marins de classe Scorpène. C’est surtout avec l’Australie et le « méga-contrat » signé par l’armateur français Naval group en 2017, pour 12 sous-marins derniers cris de la classe Shortfin Barracuda, conçus en France mais produit en Australie, pour un total de 6,5 milliards d’euros, un record.