UN ÉCHEC DE L’UNION EUROPÉENNE En fait, les textes juridiques européens rappelant aux Etats membres leur obligation en matière de logement ne manquent pas. Pour les étrangers sans-papiers, sept conventions internationales, intégrées dans la
Charte européenne des droits fondamentaux, reconnaissent l’accès au logement comme un droit. Pour les demandeurs d’asile, une directive européenne de 2003, oblige les Etats membres à assurer un minimum de « conditions matérielles d’accueil ». Mais ces textes sont loin d’être appliqués. « C’est vraiment un échec de l’Union européenne, estime Malou Gay du CIRE. Son objectif était d’établir dans tous les Etats membres les mêmes standards d’accueil pour les demandeurs d’asile mais au final elle se contente de donner des notes, plus ou moins bonnes. Elle ne dispose d’aucun moyen de sanction contre les Etats qui n’appliquent pas les directives. »
HAUSSE GÉNÉRALE DE LA DEMANDE D’ASILE La situation devient de plus en plus délicate à gérer en raison de la hausse globale du nombre de migrants en Europe. En 2009,
selon le dernier rapport Eurodac, 236 936 demandeurs d’asile ont été identifiés, soit 8 % de plus par rapport à 2008. En France, le phénomène est encore plus marqué. En 2009, la demande d’asile a progressé de 12 % et en 2008 de 20 %. Sans qu’il y ait une augmentation budgétaire conséquente. Alors que
les CADA (les centres d’accueil de demandeurs d’asile) arrivent à saturation, l’Etat n’a ouvert cette année que 500 places supplémentaires. Résultat, seuls 30 % des demandeurs d’asile parviennent à accéder à ce dispositif. Les autres se retrouvent en concurrence avec les sans-abri dans les centres d’hébergement d’urgence. Sans oublier ceux qui ont été déboutés du droit d’asile et qui se retrouvent dans un « no man’s land juridique ». « En France, seules 15 % des demandes d’asile sont satisfaites en première instance et 35 % en second instance, souligne Sylvie Guillaume. Ce qui fait beaucoup de gens déboutés du droit d’asile. Dès lors, ces personnes n’ont le droit à rien et beaucoup ne peuvent pas retourner dans leurs pays d’origine qui, généralement en guerre, ne les reconnaissent pas. Ils ne sont ni régularisables ni expulsables. »
LE CAS DRAMATIQUE DE LA GRÈCE Mais c’est en Grèce que la situation est la plus dramatique. Pour les migrants d’Asie centrale et d’Afrique, ce pays du bassin méditerranéen est devenu la principale porte d’entrée de l’espace Shengen. En 2008, alors que près de 20 000 demandes d’asile ont été enregistrées, la protection internationale n’a été accordée qu’à 379 personnes. Athènes est complètement submergée et dépassée. Comme le dénonce dans
un communiqué, Amnesty International, « beaucoup de demandeurs d’asile sont contraints de vivre dans la rue sans aucun document et plusieurs sont expulsés sans que leur demande soit traitée en bonne et due forme. » Les autorités grecques ont déjà détruit plusieurs camps de fortune comme l’a également fait la France à Calais en septembre 2009.
Pour l’ONG européenne Picum, il y a une forte dérive. Les droits des sans-papiers sont de moins en moins respectés. « En 10 ans, nous avons dû élargir notre champs d’intervention, constate la directrice de Picum. Des problèmes de logement et d’accès à la santé, on est passé à la question des enfants et des femmes sans-papiers victimes de violence. C’est une réalité qui devient de en plus en plus présente. Mais les politiques d’immigration restrictives et la volonté de faire passer les sans-papiers pour des criminels ne font qu’accroitre les problèmes de discrimination sans rien résoudre. »