Fil d'Ariane
Pour son 38e voyage à l’étranger depuis son élection en 2013, le pape François se rend au Kazakhstan. Toujours diminué physiquement, il est arrivé à Nur-Sultan, la capitale du pays, ce 13 septembre pour une visite de trois jours. Ce voyage « sera l’occasion (…) de dialoguer entre frères, animés par le désir commun de paix, dont notre monde a soif », déclarait-il le 11 septembre.
Le jésuite argentin est le deuxième pape à se rendre au Kazakhstan après la visite de Jean Paul II, en septembre 2001. Affaibli depuis plusieurs mois, François a admis au mois de juillet qu’il ne pourrait « plus voyager » au même rythme qu’auparavant, disant devoir « se ménager » ou « penser à la possibilité de se mettre de côté. »
Arrivé peu après 11h15 TU (17h15 heure locale), François, âgé de 85 ans, s’est rendu au palais présidentiel pour s’entretenir avec le président Kassym-Jomart Tokaïev. Il se déplace en fauteuil roulant en raison de ses douleurs au genou. Le souverain pontife a ensuite prononcé un premier discours devant les autorités et le corps diplomatique en début de soirée.
Le 14 septembre, le pape s’exprimera lors de la session plénière du septième Congrès des religions mondiales et traditionnelles avant de célébrer une messe dans l’après-midi. En marge du Congrès, François rencontrera également les responsables religieux en tête-à-tête.
Hasard du calendrier, le président chinois Xi Jinping sera présent à Nur-Sultan le 14 septembre pour son premier voyage à l’étranger depuis la pandémie. Ce déplacement intervient au moment où le Saint-Siège cherche à renouveler un accord historique signé en 2018 avec Pékin. En effet, le 22 septembre 2018, la Chine et le Saint-Siège signent un accord "provisoire" concernant la nomination des évêques en Chine. Cela met fin à un schisme datant de 1957. Interrogé par des journalistes lors du vol sur une éventuelle rencontre avec le président chinois, le pape a répondu : « De cela je ne sais rien, je n’ai aucune information. » « Je suis toujours prêt à aller en Chine », a-t-il toutefois ajouté.
La présence de Xi Jinping, qui doit rencontrer le lendemain son homologue russe Vladimir Poutine en Ouzbékistan, nourrit également les spéculations quant à une possible action de la diplomatie vaticane sur le conflit en Ukraine. Le pape est tenu à un délicat équilibre entre condamnation d’une guerre « cruelle » et maintien du dialogue avec Moscou.
L’événement le plus attendu du déplacement du pape est le Congrès des religions mondiales et traditionnelles à Nur-Sultan. Une centaine de délégations de 50 pays sont attendues. Le principal absent de ce congrès : le patriarche orthodoxe russe Kirill. Proche soutien de Vladimir Poutine, il a annulé sa participation sans en préciser la raison. Si le pape a dénoncé une guerre « cruelle et insensée » en Ukraine, Kirill, quant à lui, a défendu « l’opération militaire » de Vladimir Poutine et la lutte contre les « ennemis extérieurs et intérieurs » de la Russie.
Redoutée par Kiev, la possible participation de Kirill avait d’abord nourri l’attente d’une nouvelle rencontre avec François, six ans après une entrevue historique à Cuba. Il s’agissait de la première depuis le schisme de 1054 entre les Églises d’Orient et d’Occident. Cependant, la guerre en Ukraine devrait rester l’enjeu majeur de la visite du pape au Kazakhstan. Le pays est une ex-république soviétique et un allié traditionnel de Moscou. Pourtant, il a refusé de soutenir l’invasion de l’Ukraine.
Plus grand pays d’Asie centrale riche en ressources naturelles, le Kazakhstan compte 18,7 millions d’habitants, dont 70% de musulmans sunnites et 26% de chrétiens mais moins de 1% de catholiques. Après son arrivée au pouvoir, Kassym-Jomart Tokaïev a entamé une série de réformes en rupture avec le règne de son autoritaire prédécesseur et mentor, Noursoultan Nazarbaïev. Le pays a cependant été secoué début 2022 par des émeutes meurtrières qui ont brisé son image de stabilité. Les ONG de défense des droits humains continuent d’y dénoncer une répression de toute opposition réelle par les autorités.