Fil d'Ariane
L'arrivée au pouvoir de dirigeants populistes aux Etats-Unis et en Europe et la montée de "l'intolérance" menacent les démocraties occidentales et les droits de l'homme, a mis en garde l'organisation américaine Human Rights Watch dans son rapport annuel publié jeudi. Ce document s'intéresse, en général, davantage aux abus dans des pays moins développés, mais cette fois-ci il pointe clairement du doigt le président élu américain.
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— Human Rights Watch (@hrw) 13 janvier 2017
La campagne présidentielle de Donald Trump, élu le 8 novembre, est une "illustration frappante des politiques d'intolérance". La victoire de M. Trump reflète un dangereux "engouement pour les hommes forts" qui s'est exprimé aussi en Russie, en Chine, au Venezuela et aux Philippines, ces leaders étant "encouragés sur le chemin de la répression par la montée du populisme en Occident, et par la réponse inaudible des pays occidentaux".
Dans un contexte d'inégalités économiques croissantes, d'attaques terroristes régulières et d'une diversité raciale grandissante en Occident, les hommes politiques comme Donald Trump ont exploité "une source de mécontentement" qui a fait des réfugiés, des immigrés et des minorités des boucs émissaires, dont la "victime la plus fréquente" est la vérité. M. Trump a "rompu avec les principes de base de dignité et d'égalité" dans ses attaques sans apporter de propositions "pratiques", estime HRW.
Kenneth Roth, directeur exécutif de HRW, a déclaré lors de la présentation de ce rapport que l'élection de M. Trump avait été vue par certains des dirigeants, comme Hun Sen au Cambodge, comme "un feu vert pour poursuivre leur répression". Et un dirigeant hongrois a justifié de son côté un coup de force en affirmant : "Nous sommes maintenant dans l'ère de Trump".
M. Roth a été particulièrement critique du choix de M. Trump de prendre Rex Tillerson, ancien PDG d'ExxonMobil, comme secrétaire d'Etat: "C'est un gars qui a passé sa carrière à passer des accords avec des dictateurs", et qui lors de son audition mercredi au Sénat a cherché "excuse après excuse" pour ne pas prendre position contre des violations flagrantes des droits de l'Homme. "Ce n'est pas un problème partisan, c'est à propos des droits", a encore souligné M. Roth, ajoutant "notre meilleure manière de protéger les droits de l'Homme est d'en parler franchement".
"Nous oublions à notre dépend les démagogues d'hier, les fascistes, les communistes et ceux de leur acabit, qui affirmaient défendre les intérêts de la majorité mais ont fini par écraser l'individu", affirme encore le rapport de HRW.
Trop peu de dirigeants occidentaux ont présenté une défense vigoureuse face aux populismes, estime HRW qui salue cependant le travail de la chancelière allemande Angela Merkel, du Premier ministre canadien Justin Trudeau et du président américain sortant Barack Obama. Beaucoup d'autres dirigeants "ont caché leur tête dans le sable" voire ont surfé sur la vague populiste, à l'instar du président français François Hollande qui s'est "inspiré du Front national pour faire de la déchéance de la nationalité un point central de sa politique anti-terroriste".
Quant à la Première ministre britannique Theresa May, elle a qualifié de "militants de gauche les avocats des droits de l'Homme" qui ont poursuivi l'armée accusée d'abus sur des Afghans et des Irakiens.
Human Rights Watch note que le meilleur antidote contre ce populisme ascendant est tout simplement l'activisme public : "Les populistes s'épanouissent dans un vide d'opposition. Une réaction populaire forte, en utilisant tous les moyens disponibles, est la meilleure défense".
A côté de cette intolérance croissante dans les démocraties occidentales, le rapport n'oublie pas de mentionner que c'est la Syrie qui représente "sans doute la menace la plus mortelle (pesant) sur les droits fondamentaux" en raison des attaques aveugles perpétrées contre des civils par le régime de Bachar al-Assad et son allié russe comme dans la ville d'Alep.
Pendant que les pays occidentaux se concentrent sur leur lutte contre le groupe jihadiste Etat islamique (EI), les forces syriennes sont responsables de la mort de "beaucoup plus" de personnes, selon HRW.
Mais même une victoire contre l'organisation EI pourrait être insignifiante car "ces atrocités pourraient générer facilement de nouveaux mouvements extrémistes, comme des atrocités similaires ont contribué à l'émergence de l'EI, né des cendres d'Al-Qaïda en Irak".