Ecosse : si divorce, quelles conséquences ?

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Ecosse : si divorce, quelles conséquences ?
l’Écosse va-t-elle décider de quitter la mère patrie britannique ?
(AFP)
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La fièvre monte en Écosse. Jour J – 1! Les sondages sont contradictoires, et ceux qui se disent encore indécis sont trop nombreux pour permettre un pronostic fiable. L’Écosse va-t-elle décider de quitter la mère patrie britannique ? Si la chose se faisait, de nombreuses questions se poseraient. Certaines, abyssales, relèvent du casse-tête. D’autres sont plus simples à résoudre. Tour d’horizon.
Le résultat s’annonce serré. Et le suspense devient quasi insoutenable: l’Ecosse va-t-elle décider de quitter la mère patrie britannique? Pour Libération, ce serait «un saut dans l’inconnu», car «bien des enjeux restent incertains». «Les conséquences d’une indépendance», qui ne pourraient faire l’objet que de «longues négociations» entre Edimbourg et Londres, ne sont «pas toujours prévisibles». Évidemment, cela n’aide pas à «éclairer la lanterne» de ceux qui hésitent encore. Est-ce qu’on garde la livre sterling? Mis en difficulté par les partisans du «non» sur ce point, le premier ministre écossais, Alex Salmond, «a promis, en cas de victoire de son camp, de négocier une union monétaire autour de la livre sterling sous l’égide de la Banque d’Angleterre». Mais selon Le Monde, «de nombreux observateurs doutent» de la viabilité d’une telle union. Parce que «l’Ecosse est très dépendante du pétrole, dont le cours peut être de plus en plus volatil». Edimbourg pourrait aussi «créer sa propre devise adossée à sa banque centrale». «Battre sa propre monnaie? Il faudra du temps, commente Ouest-France. Et le temps, c’est de l’argent. Londres menace de ne pas partager ses billets avec un pays devenu étranger. Londres est soupçonné de bluffer.» Ou adopter l’euro, mais cela n’ira pas sans l’accord de Bruxelles, qui a déjà promis un statut d’Etat tiers. Justement, on est dans l’UE, ou non ? Un peu partout, on lit que c’est un tabou, puisque les Ecossais sont en réalité plus europhiles que les Anglais. Une sécession favoriserait, mathématiquement parlant, les partisans du «Brexit». Mais de toute manière, il y a aussi un obstacle de taille pour une entrée dans l’Union, comme l’expliquait récemment Slate: «Tous les pays de l’UE doivent être d’accord pour intégrer un nouvel Etat et le gouvernement espagnol, que les velléités sécessionnistes de la Catalogne inquiètent, a déjà annoncé son opposition à une adhésion automatique de l’Ecosse. Même si les Ecossais finissaient par accéder à l’Union après une longue attente, les conditions de leur adhésion seraient bien moins favorables que celles négociées à l’origine par la Grande-Bretagne.» Que vaut la manne pétrolière? C’est comme le saumon et le whisky: on ne sait pas vraiment. Sous la mer du Nord, dit Le Nouvel Observateur, on trouverait «98,8% des ressources en hydrocarbures du Royaume-Uni», dont les deux tiers sont actuellement «exportés» dans le reste de l’Union. «C’est dire si les économies sont interdépendantes pour longtemps. Quant à la manne pétrolière, elle pourrait être parfois surestimée. Les réserves s’épuisent – on évoque 2040 – et sont de plus en plus coûteuses à extraire.» Et «aux dires des argentiers londoniens», les revenus «sont de toute façon insuffisants pour financer la politique publique écossaise». Y aurait-il une frontière? Le Royaume-Uni n’appartient pas à l’Espace Schengen. Les passeports de tous les voyageurs provenant de l’UE sont actuellement vérifiés, sauf ceux de la Common Travel Area (CTA). Le gouvernement propose que l’Ecosse indépendante la rejoigne, afin de garantir une forme de «petite libre circulation» à la frontière anglo-écossaise. Edimbourg annonce que ce sera d’ailleurs une ligne aussi invisible que celle séparant la France de la Belgique, par exemple. Que restera-t-il des bijoux de famille ? Les citoyens britanniques «habituellement résidents» en Ecosse et les citoyens britanniques nés en Ecosse mais résidant ailleurs seront automatiquement considérés comme Ecossais. Mais Ouest-France se demande: qu’en serait-il «des bases navales nucléaires de l’ouest de Glasgow et de la… BBC? Oui ce «divorce de velours» implique bien des déchirures. […] Un passeport? Il n’en est pas question […]. Une armée? Une force de 15 000 hommes est envisagée. L’Ecosse de demain souhaite rester dans l’OTAN.» Et la reine, dans tout ce tintouin ? Elizabeth II, également reine d’Ecosse, est plutôt discrète sur le sujet. France 24 indique que «les indépendantistes se sont engagés à conserver la reine comme chef de l’Etat. Cette «union des couronnes» ne serait pas une nouveauté. En 1603, 104 ans avant l’union de leurs Parlements, Jacques Stuart, roi d’Ecosse, avait accédé au trône d’Angleterre à la mort de sa cousine Elisabeth Ire, décédée sans enfant. Les Ecossais sont majoritairement favorables à la monarchie, mais moins que les autres Britanniques.» Et David Cameron, dans tout ce tintouin ? C’est encore Ouest-France qui répond de la manière la plus spirituelle à cette question. «Le premier ministre résisterait-il à l’humiliation» d’un Royaume-Désuni, «réduit à l’Angleterre, au Pays de Galles et à l’Irlande du Nord? C’est peu probable. Au départ, Alex Salmond proposait une question portant sur l’indépendance ou une autonomie accrue. Cameron a voulu une question presque brutale en ne doutant pas de sa victoire. Imprudence…» Qu’est-ce qu’on fait des ogives nucléaires? «Dans le système institutionnel actuel, le Parlement écossais n’a pas à se prononcer sur les questions militaires, qui dépendent directement de Westminster.» Le Monde fait remarquer que «d’après des chiffres publiés par le Ministère de la défense et cités par le Guardian, 14?510 personnes travaillent en Ecosse pour l’armée […]. Ces forces représentent 7,5% des effectifs […] du royaume.» Mais «la région abrite surtout le programme Trident, nom de code du dispositif de dissuasion nucléaire britannique. Les quatre sous-marins […] sont rattachés à la base naval de Clyde, située à Faslane dans le Gare Loch, à 40 kilomètres de Glasgow. Des ogives sont également stockées au dépôt de Coulport, sur le Loch Long. Selon une enquête récente, 46% des Ecossais sont opposés à ce que le Royaume-Uni dispose d’un armement nucléaire, contre 37% qui y sont favorables.» Et puis Andy Murray ? «Point mineur dans les conséquences, selon 20?Minutes France, les JO de Rio qui interviendraient quelques mois après la déclaration d’indépendance, poseraient le problème de la défense des couleurs britanniques. En effet, durant cet événement, Ecossais, Anglais, Gallois et Nord-Irlandais représentent le Royaume-Uni. L’Écosse aurait-elle alors les moyens de présenter suffisamment de sportifs, les fédérations seraient-elles prêtes à assurer financièrement la quinzaine sportive au Brésil? Andy Murray, la star écossaise du tennis britannique, deviendrait à coup sûr le porte-drapeau de l’Écosse, au grand dam de la Couronne.» Et enfin… Relayée par le site de France Télévisions, «la BBC note que le Royaume-Uni gagnerait en ensoleillement, les nuages et la pluie écossaise assombrissant sa moyenne annuelle. Pour être précis, amputé de l’Ecosse, il gagnerait 49 heures d’ensoleillement par an!» Et comme le montre un dessin de l’Independent, «l’Union Jack serait dépouillé de ses triangles bleus. Jusqu’à se retrouver réduit à une croix de Saint-Georges et quelques traits rouges sur fond blanc, comme l’indique le journal britannique? Ou plutôt à un motif rouge sur fond noir, pour lequel penche le journal belge Le Vif?»

Quels soutiens ?

Ces derniers mois, le camp du "non" a reçu le soutient d'Hillary Clinton, Barack Obama, du Premier ministre chinois Li Keqiang ou de J.K. Rowling, l'auteure britannique de la saga Harry Potter. Quant aux indépendantistes, ils se vantent de présenter une liste de soutiens prestigieux parmi lesquels les artistes Annie Lennox (chanteuse d’Eurythmics), Alan Cumming (acteur dans la série The L World et The Good wife), Peter Mullan (acteur et réalisateur), et le plus connu d’entre eux, Sean Connery, l'ancien James Bond.

Dates clés

Mai 1707 : Union du royaume d’Ecosse et du Royaume d’Angleterre 1997 : Référendum en Ecosse sur la « devolution », la création d’une institution dévolue. Le “oui” l’emporte. Le Parlement écossais est crée. 1999 : L’Ecosse (de même que l’Irlande du Nord et le Pays de Galles), disposent d’un Parlement régional élu semi-autonome. Le Parlement et l’exécutif écossais gèrent, entre autres, l’éducation, la santé, l’environnement et la justice. La fiscalité, la defense et les affaires étrangères restent du ressort de Westminster. Mai 2011 : Victoire du SNP (Parti national écossais) qui obtient la majorité absolue des sièges au Parlement écossais (69 sur 129). Octobre 2012 : Le Premier ministre britannique David Cameron et le Premier ministre écossais Alex Salmond signent l’accord d’Edimbourg portant sur l'organisation en 2014 d'un référendum sur l'indépendance de l'Ecosse. 18 septembre 2014 : Référendum sur l’indépendance de l’Ecosse. La question posée aux Écossais sera « Should Scotland be an independent country? » (« L'Écosse devrait-elle être un pays indépendant ? »).

Si l'Ecosse était indépendante

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