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Élections au Canada : deuxième mandat pour Justin Trudeau, mais sans majorité

Justin Trudeau a finalement remporté son pari : les Canadiens ont décidé de lui confier un deuxième mandat, sans lui donner toutefois les coudées franches, parce que les libéraux n’ont pas atteint la majorité de sièges à la Chambre des Communes.

On s’attendait à une lutte très serrée entre les libéraux de Justin Trudeau et les conservateurs d’Andrew Scheer, car en suffrages exprimés, les deux partis sont effectivement au coude à coude, avec 33,1% pour les libéraux et 34,4% pour les conservateurs. Sauf que cela ne s’est pas traduit dans les sièges remportés, avec 157 députés pour les libéraux et 121 pour les conservateurs.

Autrement dit, les libéraux ne sont qu’à quelques sièges d’une majorité (il en faut 170 sur les 338).

Dès le début de la soirée électorale, les libéraux de Justin Trudeau ont pris les devants dans les quatre provinces maritimes du Canada. En 2015, ils avaient raflé les 32 sièges, un exploit qu’ils n’ont pas réédité, et ils le savaient, mais ils en ont conservé une vingtaine, les conservateurs en ont remporté 6 et, fait à noter, le Parti Vert du Canada en a gagné un en Nouvelle-Écosse. En général, les provinces maritimes sont un baromètre dans les élections au Canada. Cela s’est vérifié de nouveau.

Une autre tendance s’est aussi vérifiée lors de ces élections : on dit que c’est en Ontario qu’on gagne le scrutin, et au Québec que la majorité se remporte. C’est clairement en Ontario que les libéraux ont remporté ce scrutin, plus particulièrement dans la région de Toronto. Il faut comprendre que le gouvernement de l’Ontario est un gouvernement conservateur et que depuis qu’il a pris le pouvoir, en juin 2018, le Premier ministre Doug Ford a sabré largement dans les services publics. Cette élection de Doug Ford a été du pain béni pour Justin Trudeau qui a martelé durant toute la campagne électorale qu’élire un gouvernement conservateur au fédéral, cela allait aussi se traduire par des coupures dans les services aux citoyens. Visiblement, le message a porté.
"Ce soir les Canadiens ont rejeté la division", a lancé le chef du parti libéral devant ses partisans euphoriques réunis au centre de Montréal. "Ils ont voté en faveur d'un programme progressiste et d'une action forte contre le changement climatique", a-t-il poursuit. "Vous formez une partie essentielle de notre grand pays. J'ai entendu votre frustration et je veux vous soutenir. Travaillons ensemble pour rassembler notre pays", a finalement plaidé Justin Trudeau.

Les conservateurs espéraient remporter davantage de sièges en Ontario pour remporter ces élections. Leur candidat, Andrew Scheer, a reconnusa défaite, et a félicité Justin Trudeau, tout en le mettant en garde : "Son leadership est endommagé et son temps au gouvernement va bientôt prendre fin. Quand ce moment viendra les conservateurs seront prêts", a-t-il prévenu.

Résurrection du Bloc Québécois

Au Québec, c’est une vague bleu ciel qui a déferlé sur la province, avec la résurrection du Bloc Québécois, ce parti nationaliste qui ne présente des candidats que dans la province et qui défend les intérêts du Québec à la Chambre des Communes depuis au moins 30 ans. Le nouveau chef Yves-François Blanchet a mené une campagne rigoureuse avec un message simple et clair qui a résonné dans les oreilles des Québécois. « Nous revenons de loin, mais nous irons encore plus loin », a déclaré le chef Blanchet aux troupes bloquistes. Il envisage même de participer au futur gouvernement si on le lui proposait : "Le Bloc peut collaborer, au mérite, avec n'importe quel gouvernement. Si ce qui est proposé est bon pour le Québec, vous pourrez compter sur nous", a-t-il lancé à ses militants. 

Le Bloc a repris le terrain que les néo-démocrates lui avaient ravi en 2011. C’est d’ailleurs l’hécatombe pour le NPD au Québec, seul le député montréalais Alexandre Boulerice a pu sauver son siège. Avec 32 députés, le Bloc Québécois est la principale force au Québec et les députés québécois vont avoir un rôle important à jouer dans la Chambre des communes avec ce gouvernement minoritaire et le chef l’a bien énoncé dans son discours de victoire.

Les néo-démocrates : la balance du pouvoir ?

Les néo-démocrates vont avoir aussi un rôle important à jouer. Malgré cette déconfiture au Québec, le chef néo-démocrate peut pousser un soupir de soulagement : alors qu’il était en quatrième position derrière les Verts au début de la campagne, Jagmeet Singh est remonté en troisième position au fil des semaines. Avec 24 députés, les néo-démocrates auront la balance du pouvoir dans ce gouvernement libéral minoritaire.

Un pays divisé entre l’est, et l’ouest

Justin Trudeau peut donc se dire : mission accomplie, alors que le vent de la défaite se faisait sentir à la fin de la campagne électorale. Après une affaire d'ingérence politique dans une procédure judiciaire, sa popularité avait déjà chuté. La publication, en pleine campagne, de photos de lui arborant une "blackface" avait également assombri son image.

Mais il n’est pas tiré d’affaire pour autant. Il n’a arraché que 4 sièges de député au Manitoba contre 7 pour les conservateurs. Ces derniers raflent tous le sièges dans l’Ouest du Canada, de l’Alberta et de la Saskatchewan. Il va avoir des liens à renouer avec les habitants de ces trois provinces. Idem au Québec : les libéraux y ont perdu plusieurs sièges, dans la foulée de la vague bloquiste.

Fait à noter, les principaux ministres du gouvernement sortant de Justin Trudeau ont été réélus. Il va avoir besoin d’eux pour relever ce nouveau défi : gouverner un pays divisé entre l’est et l’ouest avec l’appui des députés du Bloc Québécois, du NPD et du Parti Vert. Et faire mentir une autre tradition qui donne à un gouvernement minoritaire une durée de vie qui varie entre 12 et 18 mois. De quoi se relever les manches…