Élections en Italie : l'extrême droite promet de gouverner "pour tous les Italiens"

"Nous gouvernerons pour tous les Italiens": la patronne de l'extrême droite italienne Giorgia Meloni, qui veut devenir Première ministre après sa victoire aux législatives de dimanche, a tenté de rassurer face aux inquiétudes exprimées dans son pays et à l'étranger. Après la Suède, l'extrême droite fait une nouvelle percée en Europe, où pour la première fois depuis 1945 un parti post-fasciste se retrouve aux portes du pouvoir.
 
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Giorgia Meloni
Le leader du parti d'extrême droite Fratelli d'Italia, Giorgia Meloni, s'adresse aux médias au siège électoral de son parti à Rome, le 25 septembre 2022. 
AP Photo/Gregorio Borgia.
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En restant dans l'opposition à tous les gouvernements qui se sont succédé depuis les législatives de 2018, Fratelli d'Italia (FdI) s'est imposé comme la principale alternative, passant de 4,3% à un quart des voix, selon les premières projections, devenant ainsi le premier parti de la péninsule.
 
Les Italiens ont envoyé un message clair en faveur d'un gouvernement de droite dirigé par Fratelli d'Italia. Nous gouvernerons pour tous les Italiens. Nous le ferons dans l'objectif d'unir le peuple.

Giorgia Meloni.
La coalition qu'elle forme avec l'autre parti eurosceptique d'extrême droite, la Ligue de Matteo Salvini, et Forza Italia, le parti conservateur de Silvio Berlusconi, récolterait environ 43% des suffrages, ce qui lui assure la majorité absolue des sièges aussi bien à la Chambre des députés qu'au Sénat.

La formation fondée fin 2012 par Giorgia Meloni avec des dissidents du berlusconisme devance le Parti démocrate (PD, gauche) d'Enrico Letta, qui n'a pas réussi à susciter un vote utile pour faire barrage à l'extrême droite et passe sous la barre des 20%, dans un contexte de faible participation (64,07%, contre 73,86% en 2018).

À re(voir) : Italie : l'extrême droite promet de gouverner "pour tous les Italiens"
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"Une soirée triste pour le pays"

La vice-présidente du PD Debora Seracchiani a reconnu la "victoire de la droite emmenée par Giorgia Meloni", ce qui marque "une soirée triste pour le pays".

Ce séisme intervient deux semaines après celui qui, en Suède, a vu la victoire d'un bloc conservateur comprenant les Démocrates de Suède (SD), parti issu de la mouvance néonazie qui a réalisé une forte percée, devenant la première formation de droite du pays nordique.

Dans ce qui a été (mal) perçu à Rome comme un avertissement sans frais, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen avait rappelé 22 septembre que l'UE disposait "d'instruments" pour sanctionner les États membres portant atteinte à l'Etat de droit et à ses valeurs communes.

Une victoire saluée par l'extrême-droite européenne

"Les Italiens ont offert une leçon d'humilité à l'Union européenne qui, par la voix de Mme von der Leyen, prétendait leur dicter leur vote", a cinglé sur Twitter le président du Rassemblement national français Jordan Bardella.
 

La Première ministre française Élisabeth Borne a avertir que la France sera "attentive" au "respect" des droits de l'Homme et de l'avortement en Italie. "Bien évidemment, on sera attentif (avec) la présidente de la Commission européenne (Ursula von der Leyen), à ce que ces valeurs sur les droits de l'Homme, sur le respect des uns et des autres, notamment le respect du droit à l'avortement, soient respectées par tous", a-t-elle déclaré sur la chaîne BFMTV ce 26 septembre.

La cheffe du gouvernement a toutefois estimé qu'il ne "fallait pas brûler les étapes" et rappelé qu'il "appartient désormais au président de la République (Sergio Mattarella) de désigner la présidente ou le président du Conseil".

Dans le camp de la majorité présidentielle, le président du MoDem, François Bayrou, a affirmé sur FranceInfo que "l'on sent bien l'espèce de vague, de dérive dans toute l'Europe. Il y a une très grande inquiétude chez les peuples auxquelles il faut répondre".
 
Bêtes noire de Bruxelles, le Premier ministre hongrois Viktor Orban et son homologue polonais Mateusz Morawiecki ont eux aussi adressé dès dimanche soir leurs "félicitations" à Giorgia Meloni.

Viktor Orban, par la voix de son directeur politique, le député Balazs Orban, a ajouté ce message: "Nous avons plus que jamais besoin d'amis partageant une vision et une approche communes de l'Europe."

"Meloni a montré la voie vers une Europe orgueilleuse et libre de nations souveraines
", s'est réjoui de son côté le leader du parti espagnol d'extrême droite VOX, Santiago Abascal.

Fratelli d'Italia doit son succès autant au vent de "dégagisme" qui souffle sur la péninsule qu'au charisme de sa dirigeante.

Cette Romaine de 45 ans qui, jeune militante, disait admirer Mussolini, est parvenue à dédiaboliser son image et rassembler sur son nom les peurs et les colères de millions d'Italiens face à la flambée des prix, au chômage, aux menaces de récession ou à l'incurie des services publics.

Quels défis pour le prochain gouvernement ?

Le prochain gouvernement devra notamment gérer la crise causée par l'inflation galopante, l'Italie croulant déjà sous une dette représentant 150% du PIB, le ratio le plus élevé de la zone euro derrière la Grèce.

Dans ce pays à l'instabilité gouvernementale chronique, les experts s'accordent déjà sur la courte espérance de vie de la coalition victorieuse, un mariage de raison entre trois alliés aux ambitions concurrentes.

Pour Giorgia Meloni, "le défi sera de transformer son succès électoral en leadership de gouvernement qui puisse s'inscrire dans la durée, c'est cela la grande inconnue", a estimé dimanche soir Lorenzo De Sio, professeur de sciences politiques à l'université Luiss de Rome.

Giorgia Meloni, sans expérience gouvernementale à part un passage éphémère au ministère de la jeunesse (2008-2011), aura fort à faire pour gérer ses encombrants alliés, bien plus expérimentés : Silvio Berlusconi a été plusieurs fois chef de gouvernement et Matteo Salvini, ministre de l'Intérieur et vice-Premier ministre.
Dans le dossier ukrainien, l'Europe et les alliés de l'Italie, membre de l'Otan, scruteront également la répartition des portefeuilles entre les trois partis. Car si Giorgia Meloni est atlantiste et soutient les sanctions frappant Moscou, Matteo Salvini s'y oppose.