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Elections fédérales au Canada : premier "débat des chefs" en français

Avortement, droit à mourir dans la dignité, décriminalisation des drogues, environnement...  Les discussions étaient parfois musclées lors de ce premier débat télévisé du 2 octobre 2019 opposant les quatre candidats au poste de Premier ministre du Canada. Le libéral Justin Trudeau est clairement passé à l'offensive face au conservateur Andrew Scheer.
 

Justin Trudeau, candidat à sa réélection au poste de Premier ministre le 21 octobre prochain, a profité de ce premier débat en français pour attaquer son rival conservateur Andrew Scheer.

Tous deux se trouvaient face à Jagmeet Singh du Nouveau Parti démocratique (NPD, gauche) et Yves-François Blanchet chef du Bloc québécois (indépendantiste).

Alors que les derniers sondages donnent toujours libéraux et conservateurs au coude-à-coude, le premier "débat des chefs", entièrement en français, a donné lieu à des échanges parfois musclés sur la laïcité, l'homosexualité et l'avortement, le droit à mourir dans la dignité, la décriminalisation des drogues, l'environnement ou l'économie.

Dès le début du débat, dans les locaux de la chaîne francophone privée TVA à Montréal, Justin Trudeau, très à l'aise, a attaqué son rival conservateur sur la question de l'avortement. Il n'a pas hésité à alterner vouvoiement et tutoiement, parfois dans la même phrase, ou à interrompre fréquemment son adversaire. "Personnellement, toi, Andrew Scheer, est-ce que vous croyez qu'une femme devrait avoir le choix" d'avorter, a-t-il demandé.

Andrew Scheer, fervent catholique, 40 ans et père de cinq enfants, s'est borné à répéter, dans un français parfois approximatif et hésitant, qu'il s'opposerait à toute tentative d'un de ses députés de relancer le débat s'il était élu Premier ministre. "Personnellement, je vais m'assurer qu'un gouvernement conservateur ne va pas rouvrir le débat", a répondu le chef des conservateurs, anglophone. 

Alors que les observateurs s'attendaient à un tir de barrage sur le Premier ministre sortant, âgé de 47 ans, c'est souvent M. Scheer qui a été la cible des trois autres candidats. 

Justin Trudeau a également promis de réviser la loi sur l’aide médicale à mourir dès les six premiers mois de d’un éventuel gouvernement libéral. “On va toujours faire attention de protéger nos plus vulnérables. C’est ce à quoi les gens s’attendent et c’est ce qu’on va toujours faire”, révèle nos confrères de Radio-Canada.

Le néo-démocrate Jagmeet Singh a aussi annoncé qu’il travaillerait sur ce dossier s’il devenait Premier ministre. Là aussi, seul le conservateur Andrew Scheer semblait être contre une révision de la loi. 

L'intervention du Saint-Esprit

La deuxième passe d'armes a porté sur l'un des grands sujets qui ont dominé la campagne : l'environnement

M. Scheer, grand défenseur de l'industrie pétrolière de l'Alberta, s'est une nouvelle fois retrouvé dans la ligne de mire. "Les conservateurs pensent que les lois du marché et l'intervention du Saint-Esprit vont régler les changements climatiques ou que ça n'existe pas", a accusé le chef du Bloc Québécois, très en verve. 

M. Scheer s'est engagé à maintenir une subvention versée aux acheteurs de voitures électriques s'il devient Premier ministre. "Mais on doit reconnaître autre chose, le véhicule le plus populaire au Québec, c'est le F150", a-t-il dit en référence à un populaire pick-up énergivore. "Alors les Québécois vont continuer d'acheter du pétrole. J'ai fait mon choix, je préfère le pétrole de chez nous que le pétrole qui vient des Etats-Unis", a-t-il dit.

Justin Trudeau, de son côté, a dû défendre sa "décision difficile" de nationaliser l'oléoduc Trans Mountain, affirmant que l'exportation de pétrole vers l'étranger permettra de financer "la transition" vers une économie verte engagée par son gouvernement.  

Un chef, deux avions 

M. Scheer, dont c'était le premier débat électoral, a lancé quelques piques à son adversaire, M. Trudeau. Il l'a notamment qualifié "d'hypocrite sur la question de l'environnement".

"Il y a seulement un chef ici ce soir qui a deux avions (pour sa campagne électorale): Monsieur Trudeau, un pour vous et les médias et l'autre pour vos costumes et vos canots", a-t-il lancé. Une allusion à une conférence de presse où M. Trudeau est arrivé en remontant une rivière en canoë. M. Trudeau a reconnu les faits : deux avions de campagne permettent de "rencontrer le plus de Canadiens possible", a-t-il plaidé. Pour compenser, les Libéraux achètent "des crédits de carbone", contrairement à M. Scheer, a-t-il insisté. 

M. Trudeau, qui s'était préparé au débat avec une séance de boxe sur un ring de Montréal dans la matinée, a pu tranquillement défendre le bilan de quatre années de mandat : légalisation du cannabis, signature d'un nouvel accord de libre-échange avec les Etats-Unis et le Mexique, principaux signaux économiques au vert, etc.

Le scandale des photos et vidéos le montrant grimé de noir ("blackface") à plusieurs reprises entre les années 1990 et 2001, qui a terni son image et brièvement menacé de faire dérailler sa campagne il y a deux semaines, n'a même pas été évoqué.

Deux autres "débats des chefs" sont prévus les 7 (en anglais) et 10 octobre (en français), auxquels participeront aussi la cheffe des Verts Elizabeth May, et le chef du Parti populaire du Canada (droite), Maxime Bernier.