Élections législatives en Espagne : les socialistes en tête, l'extrême droite en force

Le Premier ministre socialiste sortant Pedro Sanchez est arrivé dimanche en tête mais affaibli des quatrièmes législatives en quatre ans en Espagne, et n'a pas amélioré ses chances de gouverner alors que le parti d'extrême droite Vox est devenu la troisième force politique du pays, à la faveur de la crise catalane.
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Santiago Abascal, président du parti d'extrême droite, (second à gauche), regarde ses partisans après l'annonce des résultats des élections législatives en Espagne. Madrid, Espagne, 10 novembre 2019.
© AP/ Andrea Comas
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Après le dépouillement de 95% des bulletins de vote, le Parti socialiste (PSOE) de M. Sanchez, qui espérait obtenir une majorité claire pour mettre fin au blocage politique qui mine le pays depuis 2015, ne compte plus que 120 députés contre 123 après le précédent scrutin, en avril.

L'extrême droite en plein essort

Vox, formation ultranationaliste et anti-immigration fondée il y a cinq ans, a poursuivi son ascension et plus que doublé son nombre de sièges à 52 élus (24 en avril).

Elle devient ainsi la troisième force politique d'un pays où l'extrême droite était, avant son irruption, marginale depuis la fin de la dictature de Franco (1939-1975).

Les conservateurs du Parti Populaire (PP, 88 sièges) ont eux redressé la barre après le pire résultat de leur histoire en avril (66 sièges) tandis que la gauche radicale de Podemos a perdu sept députés (35 contre 42 en avril) et que les libéraux de Ciudadanos se décomposent (10 députés contre 57 en avril).

Vox a bénéficié de l'émoi suscité par la crise en Catalogne qui a dominé la campagne après les nuits de violences ayant suivi la condamnation mi-octobre de neuf dirigeants indépendantistes à de lourdes peines de prison pour la tentative de sécession de 2017.

Ancien membre du PP, le chef de Vox Santiago Abascal a martelé son discours virulent sur la Catalogne prônant l'interdiction des partis séparatistes, la suspension de l'autonomie de la région et l'arrestation de son président indépendantiste Quim Torra. Il s'en est aussi vivement pris aux immigrés illégaux qu'il accuse d'une prétendue hausse de la délinquance.

Les séparatistes catalans progressent

Cependant au total les partis de droite qui prônaient tous une politique dure contre les séparatistes catalans n'ont progressé que de 3 sièges, en raison de la déroute de Ciudadanos.

En face, les partis indépendantistes catalans ont consolidé leur représentation: à trois, ils totalisent 23 sièges (contre 22 en avril) sur les 42 qui étaient en jeu en Catalogne.

Durant la campagne, Pedro Sanchez a tenté de mobiliser son électorat contre la montée de Vox, qu'il présentait comme un retour du franquisme, en dénonçant la droite qui n'a pas hésité à s'allier avec ce parti pour prendre le contrôle de l'Andalousie, la région plus peuplée d'Espagne, de la région de Madrid, la plus riche, et de la mairie de la capitale.

Formation d'un gouvernement compliquée

Le résultat de ces élections augure d'une poursuite de l'instabilité politique. 

"La formation d'un gouvernement va prendre du temps (une nouvelle fois) et l'Espagne devrait passer les vacances de Noël sans exécutif", estimait Antonio Barroso, analyste du cabinet Teneo.

Ni un bloc de gauche (PSOE, gauche radicale de Podemos et sa liste dissidente Mas Pais) ni une alliance des droites (PP, VOX et les libéraux de Ciudadanos) n'atteignent la majorité absolue de 176 sièges sur 350.

S'il parvient à être reconduit au pouvoir par la chambre des députés, ce qu'il n'avait pas réussi à faire après le scrutin d'avril, M. Sanchez devra se contenter au mieux d'un fragile gouvernement minoritaire obligé de négocier des appuis au cas par cas au Parlement.

Le socialiste ne cache pas qu'il préfère gouverner seul, en minorité, plutôt que de tenter de s'entendre avec Podemos, avec lequel ses négociations ont échoué cet été car leurs divergences sont trop grandes sur le dossier catalan.

Il comptait pouvoir arracher l'abstention du PP lors du vote de confiance à la Chambre mais les analystes doutent qu'il y parvienne. 

"Vox le serrant de si près, le Parti Populaire ne peut pas se permettre de négocier son abstention avec les socialistes, parce que Vox le tiendra pour responsable de la politique du PSOE et s'attribuera le rôle de chef de l'opposition", a estimé Pablo Simon, professeur de Sciences politiques à l'Université Carlos III de Madrid.