Entre Emmanuel Macron et le monde militaire, l'ambiance semble plus apaisée pour ce 14 juillet. Le Président français a promulgué la nouvelle loi de programmation militaire (LPM) pour 2019-2025 , qui prévoit une enveloppe de 295 milliards d'euros sur cette période. Le prix du bonheur pour l'executif et ses Armées ?
C'était il y a un an, l'ambiance sur les Champs-Elysées lors du défilé était lourde, les hauts-gradés faisaient grise mine devant un Emmanuel Macron devenu leur " père fouettard ". La cause ? une crise ouverte entre l'éxecutif et le Chef d'état-major des Armées le général Pierre De Villiers. Le général critiquait vivement et surtout publiquement les coupes budgétaires annoncées par l'Elysée, avant de se faire recadrer sèchement par le Président de la République
" Les engagements que je prends devant nos concitoyens et devant les armées, je sais les tenir et je n’ai à cet égard besoin de nulle pression et de nul commentaire ". Du jamais vu.
Une loi de programmation militaire pour le 14 juillet
Un an plus tard tout a changé. En descendant de son "véhicule de commandement" Emmanuel Macron est tout sourire, et lorsqu'il s'avance pour saluer les chefs d'état-major, c'est presque s'ils ne se tombent pas dans les bras.
Car pour cette fête nationale française, le Président de la République a fait un beau cadeau de réconciliation à ses Armées. La veille à l'Hôtel de Brienne il a promulgué la loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025. Une LPM très différente des précédentes puisqu'elle entérine ce que la ministre des Armées, Florence Parly, a nommé la "remontée en puissance", et qui doit permettre au budget de la Défense d'atteindre 2% du PIB d'ici 2025. Une promesse de campagne d'Emmanuel Macron.
Pour les Armées cet effort semble vital tant elles ont atteint, et même allègrement dépassé, les limites de leurs capacités pour répondre aux demandes du politique. Dans un contexte sécuritaire de plus en plus instable, avec la multiplication des opérations extérieures (OPEX) et pour faire face aux menaces diffuses et quotidiennes, l'outil militaire est obligé de s'adapter, lui qui est de plus en plus sollicité par l'éxecutif.
Un budget pour reconstruire l'outil militaire
Les états-majors vont devoir changer de culture après vingt ans de réductions budgétaires et doivent désormais apprendre à reconstruire. Cette "remontée en puissance " ne se fera pas du jour en lendemain, le Chef d'état-major des Armées, le général Lecointre, l'avoue lui-même : "
Je pense qu'il faudra deux années avant que nos soldats, dans la reconstruction de leurs infrastructures, dans l'arrivée de nouveaux équipements, puissent mesurer concrètement l'effort qui va être fait par la Nation", avait il déclaré sur la radio RTL le 12 juillet dernier.
Pour l'exécutif il faut avant tout travailler à l'amélioration de la condition militaire avec des mesures en faveur des familles, représentant 300 millions d'euros sur cinq ans. La loi prévoit d'augmenter de 14% les dépenses liées aux conditions de travail et de vie du militaire. A cela s'ajoute un "plan famille", qui prévoit des places en crèche supplémentaires, une aide accrue aux familles des blessés ou encore l'élargissement des prestations sociales pendant les missions d'un conjoint militaire.
De nombreux défis
Gestion des retraites, accroissement des effectifs, opérations extérieures, les "coups de rabots" précédents ont fait plus que laisser des traces, elles ont créé des lacunes. C'est notamment le cas avec le maintien en conditions opérationnelles des matériels.
Aujourd'hui deux hélicoptères sur trois ne peuvent pas voler car ils sont engagés dans de lourdes opérations de maintenance. Malgré un plan de modernisation du MCO aéronautique lancé par la ministre des Armées, pour le Sénat cela ne suffit pas et il est urgent d'agir " en accélérant les livraisons du programme Hélicoptères interarmées légers " entre 160 et 190 appareils H160 d'Airbus mais dont la livraison ne devrait pas intervenir avant 2028. En attendant il faudra que les armées louent des hélicos ou s'appuyer sur des vieux appareils dont la maintenance devient de plus en plus coûteuse.
La LPM va donc permettre de moderniser les outils militaires. De nouveaux programmes d'armements se font attendre depuis plusieurs années pour remplacer des équipements plus que vétustes, usés jusqu'à la corde. C'est le cas du programme Scorpion de véhicules blindés qui doit permettre de remplacer notamment, et en priorité, les véhicules de l'avant blindés (VAB) vieux de 40 ans et encore mis à rude épreuve au Sahel.
Une LPM qui resserre les rangs derrière le chef des Armées ?
En exprimant sa reconnaissance aux soldats en passant par le portefeuille, Emmanuel Macron espère resserrer les liens avec les militaires. Le Président français aura au moins réussi à redonner le sourire à ses hauts-gradés lors du défilé du 14 juillet. Mais il prévient déjà : " Je serai d’une exigence absolue (...) Je vous donne donc des moyens mais, en même temps, ce sera pour vous plus de responsabilités. "
Mais le Président ne risque pas trop de mettre en péril l'équilibre budgétaire de son quinquennat, la hausse du budget défense devrait principalement intervenir après son mandat. Comme un cadeau à son successeur…