En Cisjordanie occupée, Israël expulse des dizaines de milliers de Palestiniens et leur interdit le retour dans trois camps

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Deux jeunes Palestiniens posent pour une photo avec un bulldozer israélien alors qu'il se dirige vers le camp de Jénine en Cisjordanie occupée, le dimanche 23 février 2025.

Deux jeunes Palestiniens posent pour une photo avec un bulldozer israélien alors qu'il se dirige vers le camp de Jénine en Cisjordanie occupée, le dimanche 23 février 2025. 

(AP Photo/Majdi Mohammed)
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Israël a annoncé dimanche avoir expulsé, avec interdiction de rentrer chez eux, des dizaines de milliers de Palestiniens de trois camps de réfugiés du nord de la Cisjordanie occupée, investis par l'armée qui mène dans le secteur une vaste opération depuis un mois. 

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"J'ai donné pour instruction (aux soldats) de se préparer à un séjour prolongé dans les camps qui ont été évacués, pour l'année à venir, et de ne pas permettre le retour de leurs habitants ni la résurgence du terrorisme", a affirmé le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, dans un communiqué. 

L'armée a lancé le 21 janvier, 48 heures après l'entrée en vigueur d'un fragile cessez-le-feu dans la bande de Gaza, une opération visant les groupes armés palestiniens, baptisée "Mur de Fer", en Cisjordanie, occupée par Israël depuis 1967.

"Quarante mille Palestiniens ont déjà été évacués des camps de réfugiés de Jénine, Tulkarem et Nour Chams (...) désormais vides de leurs habitants", a précisé M. Katz. 

L'opération "Mur de Fer" a jusque là provoqué la mort de 51 Palestiniens, dont sept enfants, et de trois soldats israéliens, selon l'ONU, qui a recensé des "dizaines de milliers d'habitants de camps de réfugiés [qui] restent déplacés" après un mois. 

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Pour la première fois depuis la fin de la Seconde Intifada, le soulèvement palestinien de 2000-2005, l'armée israélienne a déployé des chars en Cisjordanie occupée. 

Un photographe de l'AFP a vu une colonne prendre position dans le camp de réfugiés de Jénine.

Ce déploiement "signifie une chose", a déclaré le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu: "Nous combattons le terrorisme par tous les moyens et partout".

"L'armée de l'occupation a détruit des commerces et des infrastructures palestiniennes", a déclaré à l'AFP Fayez al-Sayyed, habitant de Jénine déplacé à Qabatiyah, à environ cinq kilomètres plus au sud.

"C'est une façon pour eux de mettre en oeuvre leur politique consistant à chasser le peuple palestinien de sa terre", mais "notre réponse à ça est que nous sommes ici et nous ne quitterons pas notre pays", a-t-il ajouté.

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M. Netanyahu avait effectué vendredi une visite inédite aux troupes israéliennes en opération dans le camp de réfugiés de Tulkarem, et annoncé que l'armée allait y intensifier ses activités.

Le ministère palestinien des Affaires étrangères avait condamné ce déplacement de M. Netanyahu, dénonçant un "assaut" et une "agression".

"Pas de logique militaire"

Au cours de leurs opérations, dimanche, les forces israéliennes ont appréhendé "26 terroristes, confisqué trois fusils et d'autres armes, et interrogé des suspects", selon un communiqué de l'armée et du Shin Bet, l'agence israélienne de sécurité intérieure.

Depuis le début de l'opération "Mur de Fer", l'armée israélienne a démoli des dizaines de maisons à l'aide d'explosifs, dégageant des routes entières à travers les camps densément peuplés, à Tulkarem comme à Jénine.

"Il n'y a pas de véritable logique militaire à utiliser des chars en Cisjordanie à ce stade, à moins que ce ne soit pour envoyer un message, et éventuellement rester plus durablement dans les zones qui ont été ciblées par les raids israéliens", a estimé auprès de l'AFP Michael Horowitz, expert en sécurité pour le cabinet de conseil en gestion du risque LeBeck International.

La violence s'est intensifiée en Cisjordanie occupée après le début de la guerre dans la bande de Gaza, déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre 2023 sur le sol israélien. 

Et depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu à Gaza le 19 janvier, "le gouvernement israélien a accordé beaucoup plus d'attention à la Cisjordanie", a observé M. Horowitz.

Bezalel Smotrich, ministre d'extrême droite allié de M. Netanyahu, ne cache pas son intention d'annexer des pans entiers de ce territoire, en profitant du soutien inconditionnel à Israël que  semble assurer la nouvelle administration américaine de Donald Trump.  

Depuis le 7-Octobre, au moins 900 Palestiniens ont été tués en Cisjordanie occupée par des soldats ou des colons israéliens, selon les chiffres du ministère de la Santé palestinien. Au moins 32 Israéliens dont des soldats, ont eux été tués dans des attaques palestiniennes ou lors d'opérations militaires israéliennes, selon les données officielles israéliennes.