En pleine guerre, un chanteur syrien sacré “idole“ du monde arabe

Hazem Chérif, un jeune chanteur d’Alep âgé de 21 ans, a remporté le trophée musical le plus envié du Moyen-Orient. Il n’a pas voulu prendre position sur le conflit qui ravage son pays.
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En pleine guerre, un chanteur syrien sacré “idole“ du monde arabe
Hazem Chérif, finaliste de l'émission Arab Idol. Capture écran Youtube
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Un jeune Syrien de la ville d’Alep a remporté Arab Idol, le trophée musical le plus envié du Moyen-Orient, en déclarant son amour pour son pays mais en refusant de prendre position sur le conflit qui a fait plus de 200 000 morts.
Des tirs de joie et les youyous des femmes ont salué à Damas et dans certains quartiers d’Alep la victoire de Hazem Chérif, obtenue tard samedi à l’issue d’une finale suivie par 100 millions de télespectateurs à travers le monde arabe.
A l’annonce de son triomphe, le jeune homme de 21 ans a baisé le plateau télévisé, embrassé ses parents avant d’interpréter une chanson patriotique arabe: «j’écris ton nom, mon pays, sur le soleil qui ne disparaîtra jamais».
«Pour tous les Syriens»
Durant les quatre mois de la compétition, ce chanteur au visage enfantin avec une petite barbe bien taillée, a surtout chanté des airs de qoudoud, la poésie musicale propre à sa ville, comme «Alep est une fontaine de douleurs qui coule dans mon pays».
Exilé avec sa famille à Batroun, dans le nord du Liban, il a pris soin d’éviter d’afficher ses préférences politiques lors de la finale organisée à Beyrouth par la chaîne saoudienne MBC.
Contrairement au Palestinien vainqueur en 2013, il n’a pas brandi le drapeau syrien pour ne pas avoir à choisir entre l’officiel revendiqué par le régime et celui des rebelles. Mais le public a scandé «Syrie, Syrie» après les résultats..
«J’ai chanté pour la Syrie et pour tous les Syriens. J’ai 21 ans et je ne veux pas que ma carrière artistique soit liée à la politique», s’est justifié Hazem Cherif.
Ignoré dans les régions rebelles 
Ce qui n'a pas empêché les internautes de s'interroger sur son camp. "La première réaction des Syriens après sa victoire a été : c'est un chabih (milicien pro-régime) ou c'est un rebelle", affirme Alaa al-Atrache sur Twitter. Mais, pour Sherin Bakro, "Hazem a rendu les gens heureux et ce soir les tirs sont des balles de joie et non de mort". 
Mais, en Syrie, sa victoire a été célébrée dans le camp du régime et ignorée chez les rebelles. L'agence officielle Sana a sobrement annoncé la victoire d'"Hazem, le fils d'Alep" qui "a gagné grâce à sa voix très spéciale capable d'interpréter différents types de chanson". 
Dans un reportage diffusé dimanche par la télévision officielle, une quinquagénaire exprimait l'espoir que le "vote unanime des Syriens en faveur de Hazem Cherfif se retrouvera aussi dans la lutte contre le terrorisme". Dans la phraséologie officielle, le mot "terrorisme" désigne tous les insurgés hostiles au régime. 
A Damas, la victoire a provoqué une explosion de joie, comme dans le café "al-Machraka" où les consommateurs brandissaient des drapeaux syriens. "Cela donne de l'optimisme aux habitants d'Alep et à tous les Syriens. Nous espérons que cette petite victoire en annoncera des grandes", a assuré Yara, un client. 
"Cet événement prouve que nous sommes toujours en vie, toujours là bien que le monde nous ait oubliés", a affirmé Ahmed Abou Zeid, un habitant des quartiers d'Alep contrôlés par le régime. "Quant à ceux qui nous ont reprochés d'avoir oublié les martyrs, je leurs dis : "donnez-nous deux heures de bonheur et après nous sommes prêts à mourir le sourire aux lèvres", a ajouté ce jeune de 24 ans. 
Dans la partie rebelle d'Alep-est, l'ambiance était radicalement différente. "Personne n'a suivi le programme. L'électricité était coupée et la majorité des gens n'avaient même pas entendu parler de cette compétition", assure Zein, un habitant.