Fil d'Ariane
La Belgique face à son histoire. Mardi 25 avril, c’est l’Église catholique belge qui s’excuse officiellement auprès de ces enfants métis. Quelques jours plus tard, ce sont des représentants politiques de l'opposition qui déposent une proposition de résolution devant la Chambre des représentants pour demander que la ségrégation qu'ils ont subie soit reconnue.
> Lire notre article L'Église s'excuse auprès des enfants métis.
Pendant la colonisation, des milliers d'enfants naissent de pères belges et de mères africaines. Ils sont vite considérés par le régime colonial belge comme un problème, voire un danger, puis un tabou. Nombre d'entre eux ne sont d'ailleurs pas reconnus par leurs pères blancs et envoyés dans des institutions religieuses comme le pensionnat des Soeurs à Save au Rwanda.
En 1959, à la veille de l'indépendance des pays colonisés par la Belgique, l’État décide d’arracher certains de ces enfants à leurs mères pour les placer dans des pensionnats ou les faire adopter par des familles belges.
Ils vivent alors le déracinement et subissent le racisme. Ces enfants perdent parfois leur identité (changement de nom, de date de naissance) et tout contact avec leurs familles en Afrique.
Dans les années 1960, certains se sont même vus retirer leur nationalité belge et décerner des cartes jaunes d’identité pour étranger avec laquelle ils ne pouvaient se déplacer que dans le Benelux (Belgique, Pays-Bas et Luxembourg).
Depuis plusieurs années, ils se battent pour retrouver leurs racines et leurs familles africaines, mais aussi leur nationalité belge ainsi que des documents administratifs.
Des avancées ont été réalisées, comme nous l’expliquait sur TV5MONDE Assumani Budagwa. Il a enquêté pendant 20 ans sur le sujet.
> Lire notre entretien avec Assumani Budagwa
Aujourd'hui ces "enfants" métis luttent toujours pour que les discriminations dont ils ont été victimes soient reconnues par l’État belge.
En novembre 2015, le Parlement, le gouvernement et les évêques flamands ont présenté leurs excuses officielles aux "victimes d’adoptions forcées" dont font partie les enfants métis.
Le ministre belge des Affaires étrangères, Didier Reynders, a aussi répondu en janvier 2017 : « J'attache toute l’importance voulue à ces dossiers et je continuerai à répondre positivement à toute demande d’information, et en particulier à toute demande d’accès à nos archives africaines ».
L’Église catholique a présenté ses excuses le 25 avril 2017, ouvrant également ses archives.
> Lire notre article : L'Église s'excuse auprès des enfants métis.
Ce 2 mai 2017, des élus de l'opposition : du parti socialiste (PS), des écologistes, du Centre démocrate humaniste (cdH), et du parti Démocrate fédéraliste indépendant (DéFI) ont présenté une proposition de résolution devant la Chambre des représentants.
> Pour lire en intégralité le texte de la résolution
Ils demandent ainsi au gouvernement fédéral de prendre des mesures pour régler les problèmes liés à la nationalité belge, à la délivrance d’actes de naissances ou de mariages.
Ils souhaitent aussi que les retrouvailles soient facilitées entre les métis et leurs mères grâce à la collaboration des ambassades belges en Afrique. Ces femmes doivent également obtenir réparation pour toutes ces injustices subies.
Enfin, il est demandé au gouvernement de faciliter les consultations des archives coloniales de Belgique.
Une fois que la résolution sera adoptée par la Chambre des représentants, elle aura valeur de loi. Et « le gouvernement devra faire une déclaration officielle sur la reconnaissance de la ségrégation. Cela ouvrira la porte aux réparations », résume François Milliex, président de l'Association des Métis de Belgique.
Il est confiant quant à l'avancée du texte en faveur des métis : « Je trouve qu'il y a une volonté des politiques et des groupes parlementaires sont prêts à aller vite.»
Le parti Mouvement Réformateur de la majorité prépare également une résolution similaire sur le sujet et a proposé qu'une stèle commémorative soit élevée.