Réduire de 80% les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050, c’est le nouvel objectif ambitieux du Canada, conformément à l’accord de Paris sur le climat. Première étape ? La fermeture de centrales électriques au charbon pour 2030.
Justin Trudeau va-t-il redorer son image auprès des écologistes canadiens, déçus par le manque d’ambitions climatiques de son gouvernement libéral ? Peut-être, après l’annonce ce lundi 21 novembre 2016 de la ministre de l’environnement, Catherine McKenna, qui souhaite éliminer les centrales à charbon d’ici à 2030, dans le cadre de l’accord de Paris sur le climat.
Ces centrales situées dans quatre provinces du pays, représentent environ 10% de ces émissions. Les retirer équivaut à éliminer 1,3 millions de voitures de la circulation, a précisé Mme McKenna, qui souhaite, au total, réduire de 80% les émissions de gaz à effet de serre (GES) en 2050, par rapport au niveau de 2005. Jusqu’à maintenant, le gouvernement Trudeau visait une réduction de 30%, comme le précédent gouvernement conservateur.
Une bonne nouvelle ?
D'
abord pour la santé des Canadiens, a déclaré Mme McKenna. Car l’élimination des centrales à charbon améliorera de manière significative la qualité de l’air.
« La fermeture de ces centrales sauvera des vies, préviendra nombre d’affections cardiaques et pulmonaires et aidera les asthmatiques à mieux respirer », a soutenu Kim Perrotta, directrice générale de l'Association canadienne des médecins pour l'environnement, citée par
Radio Canada. Des Canadiens moins malades à cause des GES réduira par ailleurs le coût pour le système de santé, évalué à 800 millions de dollars par an, selon un rapport de l’
institut américain Pembina.
Moins de pollution, mais à quel prix pour les consommateurs ? Pour les provinces concernées par la transition vers les énergies vertes, la ministre s’est voulue
« rassurante », rapporte le média canadien :
« On a des solutions dans chaque province » pour éviter une explosion des tarifs d’électricité pour les consommateurs.
« C’est certain qu’on est sensible (et que l'on veut) s’assurer que les coûts n’augmentent pas. C’est pourquoi on a de la flexibilité et des solutions par province. » Le plus dur reste à venir
Jean-Thomas Bernard, spécialiste de l'énergie à l'université d'Ottawa, la capitale du Canada, a relativisé cette annonce en soulignant que
« le charbon était relativement peu important dans le contexte canadien ».
« Avec l’extraction massive de gaz et de pétrole de schiste et de sables bitumineux, parmi les plus sales au monde, le pays est un des plus gros émetteurs par habitant du monde (16 tonnes de CO2 par personne en 2013) », explique
Libération. Le plus dur pour le gouvernement de Justin Trudeau reste donc encore à venir, car il n'a pas fixé d'objectifs de réduction pour le secteur pétrolier, principale source de l'augmentation des émissions de GES du Canada.
La stratégie dévoilée par Mme McKenna passe également sous silence le débat en cours sur la construction ou non de nouveaux oléoducs pour désenclaver la production pétrolière de la province de l'Alberta, et qui contribuerait à augmenter les émissions. Citée par
Libération, Aurore Fauret, chargée de campagne à
350.org Canada, se réjouit de l’annonce du gouvernement mais rappelle que
« les avancées qu'elle permettra seront annulées si le Premier ministre autorise la construction du pipeline (oléoduc)
Kinder Morgan – entre l'Alberta et la côte du Pacifique en Colombie-Britannique.
La ministre McKenna a dit elle-même que quitter le charbon aurait le même impact que retirer 1,3 million de voitures des routes canadiennes, mais approuver Kinder Morgan devrait ajouter plus de 30 millions de voitures sur ces mêmes routes. »Le gouvernement annoncera sa décision finale sur les projets d’oléoducs avec l’Alberta d’ici la fin de l’année. Quant à Justin Trudeau, il doit arbitrer début décembre - avec les responsables des dix provinces et des trois territoires - les mesures nécessaires à la mise en place de la stratégie de réduction des émissions de GES comme par exemple une taxe carbone progressive, vivement critiquée.