Équateur : une présidentielle anticipée pour mettre fin à "l'insécurité" ?

Les électeurs équatoriens ont commencé à voter ce 20 août au matin pour une élection présidentielle anticipée. Celle-ci a été bouleversée par l'assassinat de l'un des principaux candidats sur fond d'une vague de violences sans précédent liée au narcotrafic en pleine expansion.

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Equateur élection

Un votant regarde à un soldat gardant les urnes lors de l'élection présidentielle à Quito, en Équateur, le 20 août 2023.

AP Photo/Carlos Noriega
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Le scrutin se déroule douze jours après la mort à Quito, sous les balles d'un commando de tueurs à gage colombiens, du centriste Fernando Villavicencio, un ex-journaliste de 59 ans qui était en deuxième position dans les sondages. La campagne de l'élection présidentielle anticipée en Équateur a été marquée par trois autres assassinats. Le maire d'un grand port, un candidat au Congrès et un dirigeant corréiste local.

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"Le problème le plus grave est l'insécurité (...) tant de crimes, d'assassinats, de disparitions, nous avons peur", commente Eva Hurtado, électrice de 40 ans à la sortie du bureau de vote, résumant l'état d'esprit d'un pays traumatisé par ces violences. Les bureaux de vote ont ouvert à 07H00 (12H00 GMT). Sous la surveillance de près de 100 000 policiers militaires, les 13,4 millions d'électeurs auront jusqu'à 17H00 (22H00 GMT) pour élire leur président, leur vice-président et les 137 députés du Congrès monocaméral. Les premiers résultats doivent être publiés dans la nuit.

"L'Équateur aborde cette journée électorale dans un contexte complexe et, en même temps, plein d'espoir (...)", commente à l'ouverture officielle du vote le président conservateur sortant Guillermo Lasso. Il souligne "l'immense responsabilité" de ses concitoyens et les a appelé à "arrêter l'avancée de projets autoritaires qui mettent en danger la stabilité du pays".

Contagion au trafic de drogue

Longtemps oasis de paix en Amérique latine, l'Équateur a été contaminé ces dernières années par le trafic de drogue venant Colombie et du Pérou, et sponsorisé par les cartels mexicains. Au point de menacer les institutions et de ressembler à la Colombie sanglante des années 1990.

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Si la côte Pacifique avec son port stratégique de Guayaquil est longtemps restée l'épicentre des violences, Quito vit désormais dans la peur. Le taux d'homicides à l'échelle nationale a doublé en 2022 et battra des records cette année. Depuis 2021, plus de 430 détenus se sont entretués en prison dans des massacres entre gangs rivaux.

À cette violence s'ajoute une crise institutionnelle privant le pays de Congrès ces trois derniers mois après la décision de l'impopulaire président conservateur sortant Guillermo Lasso d'appeler à des élections anticipées pour éviter une mise en accusation pour corruption. Le nouveau président sera élu jusqu'en mai 2025 soit la fin théorique du mandat de Guillermo Lasso. "Le pays vote pour 18 mois", titrait d'ailleurs le 20 août le grand quotidien el Universo.

La population plaide pour la fermeté

"Ce gouvernement n'a pas su gérer la criminalité, (...) il faut une main forte", déclare Luis Lagunas, 54 ans, qui fait la queue pour voter dans le nord de la capitale. "En 18 mois, rien ne peut être fait", juge Carlos Leon, retraité de 61 ans, qui espère un président à la "main ferme, sans peur, avec les pieds sur terre".

Nous avons besoin d'une main ferme pour mettre fin à tout cela.

Inés Iturralde, commerçante à Quito

"Insécurité et chômage... Nous avons besoin d'une main ferme pour mettre fin à tout cela", plaide aussi Inés Iturralde, 58 ans, commerçante à Quito. L'assassinat de Villavicencio a rebattu les cartes du scrutin présidentiel. Un second tour est prévu le 15 octobre si aucun des huit candidats ne l'emporte à la majorité absolue ce 20 août.

Qui sont les candidats ?

Meilleur ami et collègue de Villavicencio, le journaliste Christian Zurita, 53 ans, a remplacé au pied levé le candidat assassiné, avec lequel il avait collaboré à de nombreuses enquêtes sur des scandales de corruption, dont celle qui avait abouti à la condamnation de l'ancien président socialiste Rafael Correa (2007-2017) à huit ans de prison et à son départ en exil. Le 19 août, il a une nouvelle fois promis "d'honorer la mémoire" de son ami, de faire de l'Équateur "une nation libre de la corruption, de l'impunité, des mafias et de l'extorsion".

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La rivale de Christian Zurita, seule femme dans la course à la présidence, Luisa Gonzalez, 45 ans, porte un discours de gauche et plus social, dans la lignée de son mentor Correa. Favorite des sondages jusqu'à l'assassinat de Villavicencio, elle a voté dans son fief de Canuto (ouest). "Tout est entre les mains des peuple équatorien, le plus probable est que nous n'aurons qu'un seul tour", affirme-t-elle. Elle s'inquiète des difficultés rencontrées pour voter par certains Équatoriens de l'étranger.

Derrière Luisa Gonzalez et Christian Zurita viennent l'ancien tireur d'élite et homme d'affaires Jan Topic (droite), le leader indigène Yaku Pérez (gauche) et l'ancien vice-président Otto Sonnenholzner (droite), selon les derniers sondages. "Que la démocratie soit respectée et le meilleur candidat l'emporte, notre pays le mérite", commente au début du vote sur X (ex-Twitter) Jan Topic, un ancien de la Légion étrangère française aussi surnommé le "Bukele équatorien" en référence au dirigeant salvadorien à poigne Nayib Bukele. "La sécurité signifie aussi donner des sources de travail, d'éducation et d'emploi à notre peuple, qui est actuellement complètement oublié", plaide pour sa part le candidat indigène Pérez, un environnementaliste qui plaide pour l'arrêt de la production pétrolière.

Les électeurs se prononcent aussi par référendum sur la poursuite de l'exploitation pétrolière dans la jungle amazonienne de Yasuni (Nord-Est), terre indigène et réserve unique de biodiversité. Une consultation "historique" aux yeux des défenseurs de l'environnement et de la cause indigène.