Derrière lui, un milliardaire américain, d’origine sud-africaine par son père et canadienne par sa mère. De formation scientifique, il a fait fortune avec différentes start up parmi lesquelles Paypal,
dont il a royalement revendu ses parts. SpaceX, qu’il a fondée dès 2002 connaît un début poussif : ses trois premières fusées explosent en vol ou retombent. Le quatrième tir, en 2008, est en revanche un succès, et il tombe bien. La NASA, cherche alors de futurs véhicules pour approvisionner la Station spatiale internationale (ISS) du fait du retrait planifié des navettes spatiales et pour ne pas dépendre du seul Soyouz. L’agence signe avec Space X un contrat d’1,6 milliard de dollars pour développer ses projets. Ainsi apparaissent dès 2010 deux objets complémentaires : le lanceur Falcon 9 et le « cargo » Space X Dragon qui franchissent avec célérité les étapes de qualification. Le dernier acte est un couronnement : Space X, associé à son compatriote Boeing, est désigné ce 16 septembre par la NASA pour construire les deux premiers « taxis de l’espace », capables de transporter chacun sept astronautes vers l'ISS …
et retour. Un contrat de six missions habitées … et de 6,8 milliards de dollars (dont 2,6 pour Space X). Boeing, Space X, la NASA … Un si beau pactole circulant entre opérateurs privés et commanditaires d’État du même pays fleure évidemment un peu la subvention déguisée. « Nous-même n’avons pas la chance d’avoir ces contrats institutionnels mirifiques et, quand nous vendons à nos institutions, nous ne vendons pas deux fois plus cher » avait ironisé le président d'Arianespace
sur la station BFM . Car un tel booster offre à Space X une opportunité de développement qui le rend redoutable pour l’ensemble de l’industrie spatiale. Or, son appétit insatiable vise également le secteur militaire, jusqu’alors monopole d’États. Et si son lanceur « réutilisable » Falcon 9R a malencontreusement explosé cet été lors de son vol de démonstration, il n’a pas dit son dernier mot. L’Amazon de l'espace ne fait plus rire les vétérans. Et pour déterminante qu’elle soit, la bienveillance nationale américaine ne suffit pas à expliquer la mise en orbite si rapide du (relatif) nouveau venu. Principal argument de Space X : sa souplesse et sa réactivité mais surtout ses faibles coûts, en bon anglais « low costs », concept dans l’air du temps qui suppose aussi « casser les prix ». Plus que sa propulsion liquide (moins chère que celle à poudre des lanceurs traditionnels), la clé en est son installation géante de Hawthorne, en Californie, qui permet de concentrer sur un site l’ensemble de la filière de fabrication et donc d’en diminuer la facture de 20 à 30 % par rapport aux lanceurs classiques. Ariane, à l’inverse, doit composer avec ses pesanteurs constitutives qui en ont permis le succès : une vingtaine de pays européens contributeurs à travers l’Agence spatiale européenne et une production émiettée, chacun recevant une charge industrielle proportionnelle à sa participation financière. Elle est également pénalisée par un euro fort qui en réduit la compétitivité internationale.