Sean Spicer restera sans doute célèbre pour ces quelques mots, estimant que Bachar Al Assad avait fait pire qu'Adolf Hitler en utilisant des armes chimiques. Tollé général et emballement des réseaux sociaux qui n'hésitent pas à attribuer un point Godwin au porte-parole du président Trump.
Le porte-parole de la Maison Blanche, Sean Spicer, a présenté ses excuses quelques heures après avoir estimé que le président syrien Bachar al-Assad avait fait pire qu'Adolf Hitler en utilisant des armes chimiques, une comparaison semblant minimiser les crimes du nazisme et vite amendée devant le tollé.
"En toute franchise, j'ai fait par erreur un commentaire inapproprié et manquant de sensibilité au sujet de l'Holocauste et il n'y a aucune comparaison", a déclaré Sean Spicer sur CNN, à l'origine d'une vive controverse à la mi-journée.
"Pour cela, je présente mes excuses. C'était une erreur de faire cela". Lors de son point quotidien dans la salle de presse de la Maison Blanche, il avait déclaré mardi 11 avril 2017 :
"Pendant la Seconde guerre mondiale, on n'a pas utilisé d'armes chimiques. Une personne aussi abjecte qu'Hitler n'est même pas tombée aussi bas que d'utiliser des armes chimiques".
Appelé à préciser sa pensée par une journaliste quelques minutes après, il avait ajouté à propos des armes chimiques, dans une réponse sinueuse:
"En ce qui concerne le gaz sarin, il (Hitler) n'a pas utilisé de gaz sur son propre peuple de la même façon qu'Assad (...) Je sais qu'il les a apportées dans les centres d'Holocauste. Mais je parle de la façon dont Assad les a utilisées, quand il est allé dans les villes et les a lâchées sur des innocents, au milieu des villes... Merci de la clarification".Accusé d'avoir paru oublier les millions de Juifs, allemands ou autres, tués dans les chambres à gaz, le porte-parole avait ensuite apporté une nouvelle clarification, déclarant hors podium:
"Je n'ai aucunement tenté de minimiser la nature terrible de l'Holocauste. J'ai essayé de créer un contraste avec la tactique consistant à utiliser des avions pour larguer des armes chimiques sur des centres de population". "Toute attaque contre des innocents est répréhensible et inexcusable", avait-il dit.
"Fake news répugnante"
Associations juives et élus démocrates ont immédiatement dénoncé des propos antisémites ou révisionnistes. "Rien de moins que pendant la Pâque juive, Sean Spicer a nié l'Holocauste, la forme la plus répugnante de "fake news" possible, en niant qu'Hitler a gazé des millions de Juifs", a déclaré Steven Goldstein, directeur du centre Anne Frank aux Etats-Unis.
"Le principal porte-parole de la Maison Blanche minimise l'horreur de l'Holocauste", a dénoncé Nancy Pelosi, chef des démocrates de la Chambre des représentants. "Sean Spicer doit être licencié, et le président doit immédiatement désavouer les propos de son porte-parole".
Les critiques portaient aussi sur le fait que Sean Spicer, dans sa réponse embrouillée, ait dit "son propre peuple", paraissant faire une distinction entre Allemands et Juifs. "Hitler disait que les Juifs allemands n'étaient pas allemands afin de justifier ses atrocités", a rappelé l'élu démocrate Jerry Nadler sur Twitter.
"Le terme que vous cherchiez est camp de concentration", a aussi lancé le sénateur démocrate Ben Cardin, corrigeant apparemment le terme de "centre d'Holocauste" employé par le porte-parole.
Ancien porte-parole et stratège du parti républicain, Sean Spicer, 45 ans, a l'un des postes les plus exposés de Washington, faisant face aux journalistes plusieurs fois par semaine pour défendre la cohérence de l'action présidentielle.
Sous le coup de la loi Godwin
Sur Twitter, les internautes s’étaient déjà empressés de réagir, de rappeler au porte-parole de la Maison-Blanche l’usage de gaz Zyklon B dans les chambres à gaz, d’appeler à la démission de Spicer et de s’étonner de la formule “centres d’Holocauste”.
On dit donc d’une conversation en ligne (on le dit aussi parfois des conversations hors ligne, mais c’est récent), qu’elle a atteint le « point Godwin » quand l’un des interlocuteurs en réfère au nazisme, à Hitler, à la Shoah, pour disqualifier l’argumentation de son adversaire.
« J’ai remarqué lors de mes observations que c’est facile d’être vite en désaccord avec quelqu’un sur Internet : il n’y a qu’à voir ce qui se dit dans les forums pour s’en rendre compte. Et forcément au bout d’un moment, cela conduit certains à traiter leur interlocuteur de nazi, d’Hitler ou de faire une comparaison sur la seconde guerre mondiale. C’est ça la loi Godwin. »
Dans un entretien publié sur le site Agoravox, Mike Godwin, fait la remarque suivante :
« Je crois que la notion de « point Godwin » est née avec les francophones et est principalement utilisée par eux. Chez vous, le point Godwin a deux significations : ou cela signifie que le niveau Godwin est atteint. Ou on décerne un « point Godwin » comme on donne un mauvais point. Les francophones s’amusent pas mal avec le « point Godwin » en imaginant donner un point virtuel à celui qui l’atteint. Mes fans francophones me disent que c’est de plus en plus fréquent dans les discussions. »
Michael Wayne Godwin dit Mike Godwin est un avocat américain, né le 26 octobre 1956. C'est en 1990, dans le cadre du réseau Usenet, qu'il établit cette loi qui sera ensuite reprise largement sur Internet et les forums. Si lors d'une discussion cette loi s'avère, un point Godwin sera donné à celui qui vient de se discréditer en s'éloignant du sujet d'origine.