Un scandale passager, ou le début de sérieux ennuis? L'affaire des documents confidentiels retrouvés dans le garage de Joe Biden se dresse comme un obstacle sur la route du président américain, dont l'intention affichée est de se représenter en 2024.
Une courbe de l'inflation qui commence enfin à s'aplanir, une opposition républicaine étalant ses dissensions au grand jour... Ces dernières semaines, les voyants étaient au vert pour le président démocrate Joe Biden, qui a gagné 7 points de popularité en 7 mois.
Jusqu'à ce qu'il commence à être question de ses archives.
L'administration du dirigeant a confirmé cette semaine que des documents classés confidentiels avait été retrouvés d'abord dans les locaux du cercle de réflexion de Joe Biden à Washington, puis à son domicile, à Wilmington. Il date de l'époque où il était vice-président de Barack Obama.
Cette pratique est contraire à une loi de 1978 qui exige que tous les documents de travail de la Maison Blanche soient transmis aux Archives nationales en fin de mandat. Elle viole aussi potentiellement une autre réglementation sur la sécurité, qui oblige à stocker les dossiers classifiés dans des endroits sûrs.
(Re)voir : Etats-Unis : Joe Biden visé par une enquête
Embarras démocrate
Pour Allan Lichtman, professeur à l'American University, nul doute que cette affaire écorne l'image du président. "
La seule question, c'est à quel point".
L'affaire fait d'autant plus mal que son prédécesseur, Donald Trump, est lui aussi dans le viseur de la justice pour avoir emporté des caisses de documents en quittant la Maison Blanche. Une attitude qualifiée d'"
irresponsable" par Joe Biden à l'automne.
Dans les rangs démocrates, où l'on fait front uni autour du président, cette situation provoque un certain embarras. "
Tout manquement aux protocoles de sécurité concernant le stockage et le traitement d'informations classifiées est évidemment une affaire sérieuse", a affirmé l'élu Jamie Raskin dans un communiqué.
(Re)voir : Etats-Unis : Kevin McCarthy accède enfin au perchoir de la Chambre des représentants
Une affaire instrumentalisée par les républicains
L'opposition républicaine s'est quant à elle empressée de dénoncer les agissements du dirigeant démocrate.
Une question lancée à Joe Biden par un journaliste de la chaîne Fox News, prisée des conservateurs, suggérait qu'il aurait pu avoir laissé ces documents à côté de sa voiture préférée, une Corvette. "
Le président Biden protège mieux sa CORVETTE que des documents CONFIDENTIELS", a embrayé vendredi 13 janvier l'élu républicain Buddy Carter. Juste avant que ses collègues n'annoncent l'ouverture d'une enquête au Congrès sur ce dossier.
Fort de leur nouvelle majorité à la Chambre des représentants, les républicains comptent bien exploiter toute potentielle faille démocrate, avec la présidentielle de 2024 en ligne de mire. De son côté, Joe Biden a promis de lever le mystère sur une éventuelle candidature en début d'année.
La marge de manoeuvre républicaine est pour autant limitée : le "Grand Old Party" peut difficilement attaquer Joe Biden sans incriminer davantage l'ancien président Donald Trump.
"Très, très au sérieux"
L'administration Biden les a déjà privés de l'argument d'une justice à double vitesse en nommant un procureur spécial, chargé d'enquêter sur ce dossier.
Joe Biden tente en même temps de saper tout parallèle entre son affaire et celle de son prédécesseur et de plaider la simple erreur. "
Le président prend cette affaire très, très au sérieux", a assuré sa porte-parole Karine Jean Pierre, sur la défensive face aux questions répétées de journalistes.
Pour Wendy Schiller, professeure en science politique à l'université Brown, l'impact de cette enquête sur l'avenir politique du démocrate dépendra "
beaucoup de la façon dont l'administration Biden communique à ce sujet".
Mais selon elle, cela ne devrait pas bouleverser les projets de candidature de l'octogénaire - si tant est qu'ils existent. "
Je pense que Biden ira de l'avant et se déclarera candidat après son discours sur l'état de l'Union", prédit l'experte. Ce grand discours de politique générale, donné devant les parlementaires américains le 7 février, sera l'occasion pour le président de tenter de recentrer les débats autour de son bilan législatif.
"
Les Américains sont déjà si cyniques à l'égard de leur classe politique", souligne par ailleurs la politologue Lara Brown. "
Ce scandale pourrait simplement se fondre dans un brouhaha perpétuel".