Ice Air Opération est une compagnie spécialisée dans le renvoi de personnes en situation illégale. Avec l'arrivée au pouvoir de Donald Trump, la compagnie espère remplir ses appareils. Pas évident.
C'est une compagnie aérienne un peu particulière.
Vous ne la trouverez ni dans les brochures de voyage, ni dans les moteurs de recherche spécialisés dans les voyages à bas prix.
Ice Air Opération, c'est son nom, est la branche aérienne de l'Office de l'immigration et des douanes des États-Unis (ICE). Créée en 2006, elle dispose d'une flotte de Boeing 737 et de McDonnell Douglas "
capables de transporter 135 étrangers".
Le site de l'agence précise que ses vols sont rentables et "
hautement flexibles". Qu'on en juge :
"IAO peut s'adapter rapidement à des exigences changeantes telles que les dates, les heures et les lieux d'exploitation".Les clandestins expulsés serons sans doute émus de l'apprendre.
Il faut dire que cette compagnie pas comme les autres se charge de tout ou presque.
IAO prend en effet en charge les
" Vols intérieurs pour faciliter le transfert, la mise en scène et le retrait d'étrangers via les ports d'entrée terrestres ou pour les vols à l'étranger". IAO assure les
"vols réguliers de rapatriement vers des pays à forte mobilité, les vols à long terme vers des pays ou des régions (y compris l'Europe, l'Afrique et l'Asie) selon les besoins".
La compagnie, enfin, s'occupe même
"d'accueillir les étrangers souffrant de problèmes médicaux graves".Du cousu main.
En somme, il ne manque que les cartes de fidélité. La majorité des vols charters de l'IAO opèrent "
aux États-Unis, aux Caraïbes, en Amérique centrale et en Amérique du Sud. Les destinations étrangères comprennent la République dominicaine, la Jamaïque, Haïti, El Salvador, le Honduras, le Guatemala, le Nicaragua, la Colombie et l'Équateur." Le directeur de l'agence gouvernementale fanfaronne : "
Avec plus de 20 000 employés, une présence dans 50 états et 48 pays étrangers, aujourd'hui, nous sommes plus forts que jamais !".
Obama signe le record des expulsions
L'examen des
chiffres données par l'agence suscite quelques surprises. ICE a expulsé un total de 240 255 étrangers au cours de l'exercice 2016. Une augmentation de deux pour cent par rapport à l'exercice 2015, mais une diminution de 24 pour cent par rapport à l'exercice 2014 !
C'est que le président Obama s'avère être l'homme-record des expulsions. Sous ses deux législatures, plus de 2,7 millions de personnes ont été renvoyées dans leur pays entre 2009 et 2016. A titre comparatif, pour une même période de 8 ans, Georges W. Bush avait fait procéder à l'expulsion de 2 millions de personnes dans le pays, qui compte environ 11 millions de personnes en situation irrégulière. Un chiffre stable.
Trump parviendra-t-il à battre tous les records d'expulsions ? Il y a quelques semaines, le département de la Sécurité intérieure a autorisé les agents d’immigration et de douane à interpeller la plupart des personnes en situation irrégulière qu’ils rencontreraient dans l’exercice de leurs fonctions. Il est demandé aux agents de cibler en priorité les délinquants et les criminels. La personne arrêtée sera soumise à une procédure d’expulsion accélérée. C'est à dire qu'elle ne passera pas par la justice.Et le ministère de la Sécurité intérieure de préciser :
"Ces expulsions, qui étaient limitées aux personnes arrêtées à moins de 100 miles [160 kilomètres] de la frontière dans les deux semaines suivant l’entrée dans le pays, s’appliqueront désormais aux gens arrêtés n’importe où dans le pays, jusqu’à deux ans après leur arrivée.”
500 milliards de dollars, le prix de "l'expulsion majeure"
Mais tout cela à un prix.
Outre l'impact inévitable sur l'économie américaine que cette opération entraînerait, le fait de procéder à une expulsion massive coûterait jusqu’à 500 milliards de dollars selon les calculs du Forum d’action américaine (AAF). Pas de quoi faire reculer l'administration du nouveau président. John Kelly, le secrétaire à la Sécurité intérieure, vient d'ordonner l’embauche de 10 000 agents d’immigration et de 5000 gardes-frontières de plus, ainsi qu'une expansion des centres de détention pour les clandestins. En attendant, la fronde anti-Trump prend de l'ampleur. Ces mesures anti-clandestins passent très mal dans le pays. Il y a les drames humains, comme ce Mexicain qui s'est suicidé quelques minutes seulement après avoir été expulsé des Etats-Unis, et environ 300 villes aux Etats-Unis sont déjà des asiles anti-expulsion, comme San Francisco ou Los Angeles.
Les avions de la compagnie aérienne des services d'immigration et de contrôle douanier ne feront pas le plein de passagers partout.