Fil d'Ariane
Avis de gros temps donc pour l'institution judiciaire qui ne se laissera pas "décourager par aucune menace contre (elle)" , restera unie contre l'impunité, et continuera à faire son travail indépendamment en accord avec son mandat, a-t-elle réagi ce vendredi 15 mars 2019 via un communiqué. Mais le peut-elle vraiment ?
Déclaration du Président de l'Assemblée O-Gon Kwon @ICC_PASP réitérant son ferme soutien à la #CPI https://t.co/qospPwe6UE
— CPI-Cour pénale int. (@CourPenaleInt) 15 mars 2019
Imaginée à la suite des atrocités commises dans l'ex-Yougoslavie et au Rwanda, la Cour pénale internationale a été créée par le Traité de Rome du 17 juillet 1998. Mais la juridiction permanente basée à La Haye (aux Pays-Bas) n'est entrée en fonction qu'en 2003 après la ratification du Traité par 60 pays. Son objectif : punir les crimes les plus graves contre le droit humanitaire international, lorsque les criminels ne peuvent être jugés dans leur pays. Un bel idéal.
Pour autant, dans les faits, sa compétence reste somme toute assez limitée. Tout d'abord, elle ne peut reconnaître que quatre catégories d’infractions : les crimes contre l’humanité, les génocides, les crimes de guerre et les crimes d’agression.
Ensuite, elle ne peut intervenir que si le crime a été commis sur le territoire d’un État ayant signé et ratifié le Traité (soit 123 aujourd'hui sans les Etats-Unis, la Russie et la Chine) ou si le mis en cause est un ressortissant de l’un de ces États. Cependant, le Conseil de sécurité de l’ONU peut donner compétence à la CPI de manière exceptionnelle lorsqu’un État qui n’a pas ratifié la convention commet des violations graves, comme pour le Darfour en 2005.
Outre ses compétences limitées, cette énorme machine administrative pèse par sa lenteur. Il a fallu attendre quatre ans pour qu'elle entre en fonction après sa création, et quatorze pour assister à sa première condamnation : celle de l'ancien chef de milice de la RDC Thomas Lubanga condamné à 14 ans de prison pour avoir enrôlé des enfants-soldats.
Depuis vingt ans, elle a instruit 26 affaires dont la majorité toujours en cours, a condamné trois personnes, et en a acquitté trois : Jean-Pierre Bemba, Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé.
Si ces acquittements interpellent quant aux méthodes de travail de la CPI, les affaires de lobbying impliquant l'ancien procureur Luis Moreno Ocampo ont aussi terni l'image de l'institution, sans parler des critiques des pays africains considérant que
cette Cour incarne la "justice des blancs contre les noirs".
Par ailleurs, dotée d'un budget de quelques dizaines de millions d'euros, la juridication n'a pas les moyens de ses ambitions et ne dispose pas de sa propre police pour mener ses enquêtes.
Quoi qu'il en soit, cette semaine, c'est à la CPI que Reporters Sans Frontières (RSF) a fait appel pour enquêter sur l'assassinat de 102 journalistes et la disparition de 14 autres entre 2012 et 2018 au Mexique.