Fil d'Ariane
Le président américain, Joe Biden, a accueilli, vendredi 18 août, les dirigeants du Japon et de la Corée du Sud à Camp David, près de Washington. Ce sommet qu'il a qualifié d'"historique" est censé envoyer un ferme message d'unité face à la Chine.
Le président sud-coréen, Yoon Suk Yeol (à gauche) et le Premier ministre japonais, Fumio Kishida (à droite), entourent le président américain, Joe Biden, lors d'une conférence de presse, le vendredi 18 août 2023, à Camp David, dans le Maryland, aux États-Unis.
"Nous avons écrit une page d'histoire aujourd'hui avec ce premier sommet et en prenant l'engagement de nous rencontrer, à ce niveau, tous les ans", a signifié le président américain, Joe Biden, aux côtés du Premier ministre japonais, Fumio Kishida, et du président sud-coréen, Yoon Suk Yeol, lors d’une une conférence de presse.
Les trois hommes se sont présentés devant la presse sans cravate, sous les arbres. Une touche de décontraction tranchant avec le sérieux de leurs propos. Joe Biden a ainsi annoncé que les trois pays se consulteraient systématiquement et "rapidement" à l'avenir face aux "menaces" les visant.
Il a plusieurs fois loué le "courage politique" de ses invités. Ces derniers ont travaillé au rapprochement de leurs deux pays en dépit du passé douloureux de la colonisation de la Corée du Sud par le Japon. Le président américain a choisi à dessein de les accueillir à Camp David, une résidence de campagne des présidents proche de Washington. Le nom est intimement lié à l'histoire des négociations de paix au Proche-Orient.
Insistant également sur la symbolique du lieu, Yoon Suk Yeol a estimé que la rencontre ouvrait un "nouveau chapitre" dans les relations entre les trois pays. Fumio Kishida a pour sa part évoqué leur "détermination à ouvrir une nouvelle ère."
Dans une déclaration conjointe publiée vendredi, les États-Unis, le Japon et la Corée du Sud ont condamné le "comportement dangereux et agressif" et les "revendications maritimes illégales" de la Chine, sur fond de tensions entre Pékin et les Philippines autour d'un atoll disputé.
Dans ce texte commun, baptisé "L'esprit de Camp David", ils ajoutent : "Nous réaffirmons l'importance de la paix et de la stabilité dans le détroit de Taïwan." "Ce sommet n'était pas consacré à la Chine", a assuré Joe Biden. Il a toutefois reconnu que "la Chine (avait) évidemment été un sujet."
Le dirigeant américain a récemment qualifié la deuxième puissance mondiale de "bombe à retardement", référence à sa situation économique et démographique. Il assure néanmoins qu'il espère toujours rencontrer le président chinois Xi Jinping "cet automne."
Depuis Camp David, les trois pays ont également appelé une nouvelle fois la Corée du Nord à "abandonner son programme nucléaire et de missiles balistiques." Ils vont mettre en place un programme d'exercices militaires conjoints sur plusieurs années. Mais selon le principal conseiller à la sécurité de la Maison Blanche, Jake Sullivan, cette coopération renforcée n'est "pas un Otan pour le Pacifique."
Washington, Tokyo et Séoul entendent également coopérer en matière économique, par exemple via un mécanisme d'alerte censé signaler les risques de pénurie de certains produits ou matières premières.
Pékin ne cache pas son hostilité face à ce dialogue à trois. Le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, a par exemple mis en garde récemment Séoul et Tokyo : "Vous pouvez blondir vos cheveux ou faire affiner votre nez autant que vous voulez, vous ne serez jamais Européens ou Occidentaux (...). Nous devons savoir où sont nos racines." Il a appelé la Chine, la Corée du Sud et le Japon à "travailler ensemble."
Washington parie au contraire que le Japon et la Corée du Sud sont prêts à se tourner vers l'Occident. Et l'un vers l'autre, en dépit des marques laissées par la colonisation brutale de la péninsule coréenne par le Japon entre 1910 et 1945.
Le rapprochement ne fait pas l'unanimité dans l'opinion publique, qu'elle soit coréenne ou japonaise. Le défi pour Washington sera donc de faire durer la relation trilatérale au-delà des changements de dirigeants. "Nous ne parlons pas d'un jour, d'une semaine ou d'un mois. Il s'agit de décennies" de coopération, a voulu croire Joe Biden vendredi.