Etats-Unis - Royaume-Uni : une relation "spéciale" entre deux pays mais tendue entre leurs dirigeants

Le président américain Joe Biden et le premier ministre britannique Boris Johnson se rencontrent le 10 juin pour la première fois en tête-à-tête et espèrent s'accorder sur un nouveau pacte, dans un contexte brouillé par le délicat dossier du Brexit et ses conséquences en Irlande du Nord.

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Joe Biden au Royaume Uni 9 juin 2021

Le président Joe Biden écoute la première dame Jill Biden délivrer un discours aux forces armées américaines dans le comté du Suffolk, Angleterre, le 9 juin 2021.

AP/ Patrick Semansky
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En 2019, alors qu'il endossait le statut d'ancien vice-président, Joe Biden qualifiait Boris Johnson de "sosie physique et émotionnel" de Donald Trump. Aux Etats-Unis, les deux personnages étaient perçus comme similaires : brouillons, populistes, imprévisibles et agitateurs. Le premier ministre britannique ne s'est pas empêché, lui, d'exprimer son admiration pour l'ancien occupant de la Maison Blanche du temps de son mandat.

Ces prises de distance personnelle n'ont pas empêché l'actuel président Joe Biden de vouloir marquer le "retour" des Etats-Unis, comme il l'a dit lui-même à son arrivée mercredi 9 juin, en choisissant le Royaume-Uni comme première destination de son premier déplacement à l'étranger. 

Les Etats-Unis sont de retour! 
                                                                                                    Joe Biden, président des Etats-Unis

Par ailleurs, le Royaume-Uni veut aussi pouvoir se faire une place de choix dans le jeu diplomatique mondial, depuis sa sortie de l'Union Européenne. Boris Johnson souhaite éviter l'expression traditionnelle de "relation spéciale", toujours utilisée par la Maison Blanche, pour qualifier les liens entre le Royaume-Uni et les Etats-Unis. Il préfère alors le terme de "relation étroite". Cependant, Joe Biden affirmera tout de même "la force durable de la relation spéciale" au G7 dans quelques jours, avant de souligner les priorités américaines, les valeurs démocratiques communes, le changement climatique et la reprise après la pandémie.

Brexit et Irlande du Nord

Les deux hommes se rencontrent donc dans un premier temps ce jeudi 10 juin à Carbis Bay, station balnéaire du Sud-Ouest de l'Angleterre qui accueillera à partir de vendredi 11 juin jusqu'à dimanche le G7. Au programme, une nouvelle signature de la "Charte de l'Atlantique" conçue sur le modèle de la Charte signée par Winston Churchill et Franklin D. Roosevelt il y a 80 ans, pour réaffirmer les "valeurs" partagées et prendre en compte les nouveaux défis comme les cyberattaques ou la crise climatique.

Le sujet de l'Irlande du Nord pourrait toutefois venir assombrir le tableau. Joe Biden, fier de ses origines irlandaises, n'apprécie pas les tentatives de Londres de revenir sur ses engagements commerciaux envers l'Union européenne pris dans le cadre du Brexit.

Voir aussi : Covid-19 au Royaume Uni : quelle est la stratégie de Boris Johnson ?

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La Maison Blanche a par ailleurs averti le gouvernement britannique que tout accroc à l'accord de paix de 1998 pourrait compromettre la réussite d'un accord commercial entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni, tant convoité par M. Johnson. Selon le quotidien britannique The Times, la plus haute diplomate américaine en poste en Grande Bretagne, Yael Lempert, a accusé Londres d'"attiser" par son attitude les tensions en Irlande du Nord.

Avant le G7, une rencontre entre gouvernement britannique et Commission européenne n'a pas permis de résoudre les différends concernant les dispositions douanières post-Brexit spécifiques à la province britannique qui fragilisent la paix obtenue en 1998 et donnent lieu à des violences. À la place, les deux parties se sont accusées de mauvaise volonté et l'UE a averti qu'elle réagirait fermement en cas de mesure unilatérale de Londres.

Voir aussi : Irlande du Nord : Bicentenaire, crise politique et Brexit

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L'accord dit du Vendredi Saint de 1998, obtenu avec l'implication de l'ancien président américain Bill Clinton et auquel Joe Biden tient tout particulièrement, avait mis un terme aux violences entre républicains (majoritairement catholiques) et unionistes (surtout protestants) qui avaient fait quelque 3.500 morts en 30 ans en Irlande du Nord.

"Engagement" pour l'Otan 

Au delà de ce sujet épineux, si les accents populistes de "BoJo" rappellent l'ancien occupant de la Maison Blanche, le dirigeant conservateur est beaucoup plus en phase avec l'administration de Joe Biden sur les grands sujets internationaux comme la crise climatique ou les défis posés par la Chine et la Russie.

Le président Biden et moi-même signerons une charte [...] qui souligne notre engagement commun envers l'Otan qui est indispensable à notre sécurité depuis des décennies.
                                                                     Boris Johnson, Premier ministre du Royaume-Uni

Quelques jours avant le sommet du G7, Londres a soutenu le projet de taux d'imposition minimal pour les sociétés défendu par Joe Biden.

La nouvelle "Charte de l'Atlantique" qui doit être annoncée jeudi 10 juin doit affirmer que "si le monde a changé par rapport à 1941, les valeurs restent les mêmes" concernant la défense de la démocratie, la sécurité collective et le commerce international, a fait savoir Downing Street. "Le président Biden et moi-même signerons une charte qui englobe la science, la technologie et le commerce et, surtout, qui souligne notre engagement commun envers l'Otan qui est indispensable à notre sécurité depuis des décennies", a souligné Boris Johnson dans un communiqué. 

Voir aussi : Brexit : ce qui va changer en 2021

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Les deux dirigeants doivent également discuter d'une reprise des voyages entre le Royaume-Uni et les Etats-Unis après la pandémie. Après le G7, Joe Biden rendra visite ce dimanche 13 juin à la reine Elizabeth II au château de Windsor puis participera à Bruxelles au sommet de l'Otan avant un autre sommet avec l'UE.

"Les Etats-Unis sont de retour!", a lancé M. Biden peu après son arrivée au Royaume-Uni, reprenant ainsi le message qu'il martèle depuis son arrivée au pouvoir voilà cinq mois. "Et les démocraties du monde entier sont unies pour affronter les défis les plus difficiles".