La loi du ministre de la Transition écologique, Nicolas Hulot, "
mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels" a été définitivement votée au Parlement le 19 décembre 2017. La production pétrolière et gazière française étant marginale dans la consommation du pays puisqu'elle ne représente qu'à peine 1% de celle-ci, cette décision n'aura donc pas de conséquences économiques négatives, ou bien à la marge.
La bataille pour la "préservation de l'environnement et la protection du climat" devrait donc, elle en bénéficier, ce que le ministre Nicolas Hulot n'a pas manqué de vendre aux parlementaires depuis le début de sa proposition de texte de loi. Mais le "diable se cachant dans les détails", la promesse affichée de la fin de la recherche et de l'exploitation des gaz et pétroles ne sera pas ce qu'elle prétend être en apparence. Les défenseurs de l'environnement le dénoncent déjà. Le président Emmanuel Macron ayant déjà apporté dans un tweet une nuance de taille sur l'échéance :
Si la loi prend effet en 2018, l'arrêt définitif d'exploiter est prévu pour… 2040. Quand à l'interdiction d'explorer dès 2018, le texte n'est pas aussi définitif que veut bien le faire savoir le président Emmanuel Macron.
Petits arrangements qui permettent… de faire comme avant
L'interdiction de permettre des nouveaux projets de recherche d'hydrocarbures existe bien dans le texte, mais il contient une réserve très importante : des décisions juridictionnelles pourront forcer l’administration à délivrer ou prolonger des titres miniers. Que cela signifie-t-il exactement ?
Concrètement, si une entreprise veut explorer ou prolonger une concession, elle pourra toujours faire appel au droit minier via un tribunal. Ce droit minier, très favorable aux entreprises comporte des clauses qui obligent l'Etat à répondre sous peine d'être forcé de payer des astreintes aux sociétés, avec en plus dans le nouveau texte de loi, la possibilité de renouveler en toute légalité les permis expirant dans quelques années… jusqu'en 2040 !
Jouer sur les mots avec les gaz de schiste ?
Le moratoire de 2011 sur les gaz de schiste n'interdisait pas définitivement et entièrement la recherche ou l'exploration de ces hydrocarbures dits "non conventionnels". La nuance sur la possibilité ou non de rechercher ou exploiter ces matières tenait en réalité à la seule technologie utilisée, mise en cause pour ses ravages environnementaux : la fractutration hydraulique.
Les possibilités de dérogations étaient nombreuses, et plus particulièrement dans le cas où de nouvelles technologies seraient utilisées, autorisant alors des entreprises du secteur à pouvoir faire de la recherche et même exploiter les gaz de schiste dans ce cas précis. La nouvelle loi prévoyait donc logiquement — dans sa première mouture — d'interdire la recherche ou l'exploitation des hydrocarbures par "quelques techniques que ce soit". Le texte final ne contient plus cette nuance de première importance qui a disparu. Il semble donc que la porte reste ouverte, comme depuis 2011 à de futures exploitations de gaz de schiste avant 2040… via d'autres technologies que la fracturation hydraulique.
Une loi symbolique et sans effets garantis
Les permis d'exploitations miniers existants seront majoritairement renouvelés jusqu'en 2040 et de nouvelles autorisations pourront toujours être données par dérogations judiciaires. Les gaz de schiste ne seront peut-être pas définitivement laissés dans les sous-sols si des technologies nouvelles sont utilisées alors que le droit minier n'a pas bougé : la loi de Nicolas Hulot ressemble donc plus à une opération de communication liée au "One planet summit" en France (Sommet pour le climat) de ce mois de décembre, qu'à un véritable texte juridique empêchant les actuelles ou nouvelles exploitations pétrolières.
En 2017, l'Etat français a délivré 33 permis de recherche d'hydrocarbures comme en Guyane, où le permis de recherche pétrolier en mer de Total a été renouvelé… ce mois d'octobre. La firme pourrait même exploiter ce pétrole au delà de 2040, puisque la loi permet de dépasser cette date butoir si les frais engagés dans la recherche n'ont pas été couverts par l'exploitation. Cette disposition a été placée pour ne pas "léser financièrement les entreprises".
L'ex députée européenne du parti LRC-Cap21 écologiste Corinne Lepage résume ce texte de loi à sa manière et sans concession : "
C'est une jolie idéee, sympathique, symbolique à effet pratique quasi nul".
Cette définition par Corinne Lepage, de la loi "
mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels", a un principal mérite : celui d'être très clair.