C'est un geste fort en faveur de l'égalité femmes-hommes. La durée du congé paternité va être doublée l'an prochain. Elle passera de 14 jours actuellement à 28, a indiqué l'Elysée. La France remonte ainsi parmi les bons élèves en Europe. La mesure a été annoncée par Emmanuel Macron ce mercredi et devrait entrer en vigueur en juillet 2021.
14 à 28 jours. La durée du congé de paternité va doubler, ce qui permettra à la France de combler une partie de son retard par rapport aux meilleurs élèves européens.
Emmanuel Macron a officialisé mercredi la décision de porter le congé paternité en 2021 à
"un mois", ajoutant qu'il y aurait
"sept jours obligatoires", dans un message publié sur Instagram. Cette réforme concerne le père - ou le "deuxième parent" qui peut être une femme - d'un enfant à naître ou adopté.
Réclamé de longue date par les militantes féministes, les syndicats et nombre de pères, l'allongement de ce congé avait fait l'objet de plusieurs pétitions.
"Cette décision, c'est une avancée", s'est félicité Emmanuel Macron. Il a rappelé que c'était "avant tout une mesure qui est favorable à l'égalité entre les femmes et les hommes", "grande cause du quinquennat", et que "c'est là-dessus qu'il y avait une très forte mobilisation".
Lorsque la France a créé le congé paternité en 2002 : onze jours qui s'ajoutent aux trois jours du congé de naissance, elle était en avance sur la plupart de ses voisins. Mais depuis, de nombreux pays européens ont adopté des dispositifs plus généreux.
"Cette réforme va permettre à la France de passer d'une position médiane en Europe au peloton des pays de tête, avec l'Espagne, la Suède, la Norvège ou le Portugal", souligne la présidence.
Le temps est un facteur essentiel pour nouer un lien important entre l'enfant et les parents. Actuellement, ce temps de 14 jours est trop court.
Extrait de la déclaration de l'Élysée
L'Elysée ajoute qu'il s'agit pour Emmanuel Macron d'une
"réforme extrêmement consensuelle" puisque
"80% de la population y est favorable".Comment sera financé ce congé paternité ?
L'allongement du congé de paternité sera financé par la Sécurité sociale pour un coût lui aussi doublé et estimé à plus de 500 millions d'euros en année pleine. Les trois jours du congé de naissance seront toujours à la charge de l'employeur. Les vingt-cinq autres jours seront indemnisés par la Sécurité sociale.
Les naissances multiples (jumeaux, triplés...) donneront droit, comme aujourd'hui, à sept jours supplémentaires.
Le dispositif figurera dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale qui doit être présenté le 7 octobre en Conseil des ministres. Il devrait entrer en vigueur au 1er juillet 2021.
Risque d'une amende de 7500 euros
"Il y aura l'introduction d'une part obligatoire dans ce congé" qui "
doit encore être fixée avec les partenaires sociaux", précise l'Elysée. Les entreprises ne respectant pas cette obligation s'exposeraient à une amende de 7.500 euros.
Le but : inciter davantage de pères à profiter du congé de paternité, notamment ceux qui ont un statut précaire. 67% des pères ont recours au congé de paternité, un chiffre qui n'a que très peu évolué depuis sa mise en oeuvre et qui dissimule de fortes inégalités sociales: 80% des salariés en CDI y ont recours, mais moins de 60% de ceux qui sont en CDD.
Objectif : l'égalité femmes-hommes
L'objectif est aussi de favoriser l'égalité femmes-hommes puisque la charge parentale repose encore beaucoup sur les mères.
"On essaie de faire converger les congés entre les deux parents", indique-t-on à l'Elysée. La durée du congé maternité peut durer jusqu'à seize semaines pour un premier ou un deuxième enfant.
S'il double la durée du congé de paternité, l'exécutif reste en-deçà des conclusions de la commission Cyrulnik sur les
"1.000 premiers jours" du nouveau-né, installée en septembre 2019 par Emmanuel Macron, qui avait recommandé d'allonger à neuf semaines le congé paternité.
"Doubler c'est déjà un changement assez massif en terme d'évolution culturelle et pour la place des pères auprès de l'enfant. Cela permet de changer le regard de la société", assume-t-on à l'Elysée.
D'autres mesures décidées après la publication du rapport Cyrulnik en faveur d'un soutien aux jeunes enfants et à leurs parents devraient être annoncées plus tard.
Une mesure largement saluée
De Julien Bayou (EELV) à Julien Aubert (LR), les représentants politiques ont largement salué cette avancée, les élus de gauche plaidant toutefois pour un congé encore plus long.
Interrogé sur BFM, le pédopsychiatre Boris Cyrulnik a rappelé que la proximité des pères permettait de limiter la dépression péri-natale, qui frapperait 10 à 15% des femmes:
"Il faut pas oublier que les jeunes mères actuellement sont seules, ce qui n'est jamais arrivé dans l'histoire humaine".
Laurent Berger, patron de la CFDT, a salué "un progrès social". Dans un communiqué, la CGT a évoqué "une première avancée".
Seule voix discordante, l'organisation patronale des PME françaises (CPME) a dit "comprendre la finalité" mais "regretter que cette annonce intervienne dans une période particulièrement tendue sur le plan économique pour un grand nombre de TPE-PME".
Pour Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des femmes, cette mesure "ira dans le bon sens" après des mois de grossesse et un accouchement "épuisants" pour les femmes, suivis de nombreux soins et démarches administratives liés à l'arrivée d'un enfant.
"Et si on pouvait en profiter pour lui faire changer de nom... Ça n'est pas un congé car c'est loin d'être des vacances", ajoute-t-elle sur Twitter.
Vers un congé paternité en Suisse ?
Les Suisses se prononcent ce dimanche 27 septembre sur l’introduction d’un congé paternité payé de deux semaines. Si le peuple dit «oui», la Suisse ne sera plus l’unique pays d’Europe à ne connaître ni congé paternité, ni congé parental.