France : le Front National fait son entrée au Sénat

L’élection inédite de deux sénateurs FN a été rendue possible par le ralliement de «grands électeurs» de la droite traditionnelle
Image
France : le Front National fait son entrée au Sénat
Le Sénat
(AFP)
Partager 3 minutes de lecture
Une par une, les portes des institutions républicaines françaises s’ouvrent au Front national (FN). A l’issue du renouvellement par moitié des sénateurs ce dimanche, deux élus de l’extrême droite vont rejoindre le très symbolique Palais du Luxembourg. Ils siégeront au sein d’un Sénat de nouveau contrôlé par la droite, qui déboulonne, avec une quinzaine de sièges d’avance, la majorité socialiste après la parenthèse inédite des trois ans de la dernière législature. Censé représenter les élus provinciaux et servir de contrepoids aux députés (qui ont le dernier mot législatif), le Sénat a toujours été, sous la Ve République, un bastion conservateur. Les deux sénateurs frontistes sont Stéphane Ravier, 45 ans, maire du VIIe arrondissement de Marseille, et David Rachline, 26 ans, maire de Fréjus. Tous deux ont profité du très bon score réalisé par le FN aux municipales de mars. Le parti de Marine Le Pen, déjà représenté à l’Assemblée nationale avec deux députés (l’avocat Gilbert Collard et Marion Maréchal-Le Pen), dispose de 1500 conseillers municipaux, dont un grand nombre étaient hier qualifiés pour voter parmi les grands électeurs conviés en préfecture. Leur élection n’aurait néanmoins pas été possible sans le soutien de votants d’autres formations, ce qui semble confirmer l’émergence progressive d’une droite dissidente prête à s’allier au FN contre l’UMP et les centristes de l’UDI. Cela est notamment vrai à Marseille, où Stéphane Ravier a arraché son siège au détriment de la liste du maire Jean-Claude Gaudin, cacique de l’UMP, en débauchant une centaine d’électeurs d’autres partis. Cette capacité à «ratisser large» a été saluée par Marine Le Pen, qui entend faire de même lors de la présidentielle de 2017. Même si l’opposition de droite parle d’une nouvelle «claque» pour la gauche au pouvoir, et pour le président François Hollande, l’impact de sa reconquête du Sénat ne va pas modifier profondément l’équilibre actuel des pouvoirs. La gauche, en revanche, ne peut pas se cacher derrière le fait qu’elle a perdu environ 20 sièges sur les 179 en lice (sur 358 sénateurs). Le mode de scrutin indirect et le fait que la majorité des sénateurs sont élus à la proportionnelle ont amorti le choc. Mais le fait que le PS garde un seul élu à Marseille (derrière la liste du dissident Jean-Noël Guérini), qu’il perde ses deux élus en Corrèze, le département du président, et que son allié radical Jean-Michel Baylet soit battu à Toulouse témoigne de graves fractures. njustement considéré comme la «maison de retraite» des politiques, le Sénat a perdu lors de ce scrutin des personnalités comme le socialiste Jean-Pierre Chevènement ou l’UMP Christian Poncelet, qui ne se représentaient pas. L’ancien premier ministre UMP Jean-Pierre Raffarin et l’ancien ministre Gérard Larcher seront tous deux candidats, mercredi, au poste de président de cette assemblée, le deuxième personnage de l’Etat dans l’ordre protocolaire.